Beaucoup en rêvent, d'autres le jugent un luxe inaccessible. Le congé sabbatique peut être l'occasion de réaliser un projet, de se réorienter, de se rapprocher des siens, ou simplement d'aller voir ailleurs si on y est!

Quand elle a entrepris son congé sabbatique, Manon Allard voulait avant tout rester à la maison avec ses enfants. Mais elle avait aussi une autre idée derrière la tête: explorer de nouveaux domaines.

«Je n'avais jamais aimé le secrétariat, dit-elle. J'ai profité de mon congé pour essayer des choses. J'ai pris des cours de communication orale, j'ai animé une émission à la télévision communautaire et j'ai enseigné en alphabétisation. Mais aucune de ces occupations ne me plaisait assez pour en faire une profession.»

C'est après avoir exploré maintes avenues qu'elle a découvert une passion qui allait devenir son nouveau métier: la photographie. «Tout le temps que j'ai passé à chercher pendant mon année sabbatique m'a permis de trouver, par essais et erreurs, ce que j'aimais vraiment, dit-elle. Je savais que je voulais travailler avec des gens et qu'il y aurait du bonheur dans mon travail, mais je ne savais pas quelle forme cela prendrait au début.»

Manon Allard incite fortement tous ceux qui sont malheureux au travail à prendre un congé sabbatique pour faire le point. «Pour aller voir ce qu'il y a en dedans d'eux et ce que leur coeur leur dit», ajoute-t-elle.

Éviter l'épuisement

Pour d'autres, le congé sabbatique est une occasion de se retrouver et d'éviter l'épuisement. Ce fut le cas pour Mylène Grégoire. «Mère de deux jeunes enfants et consultante à mon compte en ressources humaines, je luttais comme la plupart des gens en vue d'obtenir un meilleur équilibre de vie, dit-elle. Je prenais tous les mandats qui m'étaient offerts, je disais oui à tout le monde et j'avais accumulé fatigue et irritants. Je commençais à me sentir désabusée et il était temps de faire autre chose que travailler.»

Le congé qui ne devait durer que quelques mois a fini par se prolonger en année sabbatique où la jeune femme a pris soin de sa famille, démarré un programme nommé «Brillo» pour aider les gens à vivre de leur passion, et s'est remise en forme en courant!

Si c'était à recommencer, elle planifierait toutefois mieux son congé, dit-elle. «Si vous avez l'option de prendre une année sabbatique, je suggère de bien l'organiser, la planifier, la gérer et prendre du recul de temps en temps pour ainsi apporter les modifications nécessaires afin qu'elle soit efficace.»

Les employeurs

Du point de vue de l'employeur

Comme patron, il n'est pas évident de laisser partir un employé pendant trois mois, six mois ou un an, surtout dans un contexte de rareté de la main d'oeuvre. Pourtant, les employeurs ont quelque chose à gagner en laissant leurs employés s'absenter, selon Ghislaine Labelle, psychologue organisationnelle, auteure et conférencière.

«L'employé revient stimulé, plein d'énergie, il ramène la passion au travail et de nouvelles idées. C'est une expérience de vie que ces gens accumulent et cela peut être une richesse incroyable dans la mesure où l'organisation la valorise. Si l'absence est bien gérée, l'organisation va en bénéficier», dit-elle.

De plus, les employeurs doivent garder en tête que la nouvelle génération de travailleurs est moins attachée à son organisation et plus encline à changer d'emploi.

«Si les plus jeunes perçoivent le congé sabbatique comme une occasion de réaliser un rêve et que c'est une priorité dans leur vie, ils seront moins patients face à une réponse négative, surtout que l'on est dans un marché qui favorise les employés, dit-elle. Ils peuvent facilement se dire: je réalise mon rêve et après je trouverai un autre emploi.»

Si on gère les effectifs de façon très serrée, il est certain que la marge de manoeuvre est plus étroite pour laisser partir quelqu'un pendant une période prolongée, ajoute la psychologue.

«Mais cela fait partie d'une approche pour les professionnels des ressources humaines, dit-elle. Il faut préparer les gestionnaires à avoir une culture d'ouverture envers les sabbatiques, sinon ils vont devoir gérer un problème de non rétention et subir des départs d'employés qui ont demandé des congés. Cela doit faire partie d'une réflexion sur la planification. Il ne faut pas oublier qu'une absence est un désavantage moins grand que celui d'être obligé de recruter une nouvelle personne.»