Mamadou est cuisinier. Il gagne 10$ l'heure, soit un dollar de plus que le salaire minimum. Par contre, ses patrons le font travailler seulement trente heures par semaine. Avec 300$ brut, c'est bien insuffisant pour le faire vivre correctement lui et son fils, d'autant plus que son loyer lui coûte 700$ par mois.

«Ce qui est épouvantable, c'est qu'aujourd'hui des gens travaillent à 9 ou 10$ l'heure à temps plein et ils sont dans la pauvreté, alors que dans la tête de bien des gens, les pauvres ne travaillent pas», affirme Isabelle Thibeault, conseillère budgétaire à l'ACEF du Sud-Ouest. Il y a aussi toute la question de la précarité qui a un effet sur le revenu des travailleurs.

Jason, contractuel oeuvrant dans le domaine de la publicité, charge un taux horaire tout de même assez élevé, mais jusqu'à très récemment, son revenu annuel était semblable à celui d'un travailleur au salaire minimum.

«Quand je bosse sur quelque chose, je fais des heures de fou, mais par la suite, je peux passer plusieurs jours avec rien, à me chercher d'autres contrats», explique-t-il.

À l'ACEF, on constate que les travailleurs qui ont un revenu annuel équivalent au salaire d'une personne qui travaille 40 heures par semaine à 9$ l'heure sont plutôt en mode survie qu'en mode réalisation.

«Tout est compté et il faut être très ingénieux pour arriver à s'en sortir. Même une dépense annuelle ordinaire, comme l'achat d'un manteau d'hiver, c'est hyper compliqué pour une personne seule qui travaille au salaire minimum», explique Mme Thibeault.

Au Front de défense des non-syndiqué-e-s, on croit que pour arriver à se sortir de la pauvreté, un travailleur doit gagner 10,66$ l'heure.

«C'est le salaire qui permet à une personne seule qui travaille 40 heures par semaine de dépasser de quelques dollars le seuil de pauvreté de Statistiques Canada», affirme Mélanie Gauvin, porte-parole de l'organisme.

Comment améliorer son sort?

Nombre de travailleurs rémunérés au salaire minimum ne peuvent se négocier une augmentation avec leur employeur. Ils doivent donc compter sur le gouvernement.

«En ce moment, on est dans une bonne période, indique Mme Gauvin. Le salaire minimum a été augmenté de 50 cents l'heure l'an dernier et si Jean Charest tient sa promesse, il devrait le hausser d'un autre 50 cents en mai. Mais nous faisons du rattrapage, parce que pendant de nombreuses années, le salaire minimum a été gelé.»

Pour améliorer leur qualité de vie, beaucoup de travailleurs au salaire minimum tentent de se trouver un emploi mieux rémunéré, mais ce n'est pas toujours facile. Mamadou, par exemple, a immigré au Québec il y a deux ans.

«J'ai une maîtrise en relation internationale, mais on ne reconnaît pas mon diplôme ici. Après avoir envoyé des tonnes de C.V. je me suis découragé.»

Retour aux études

Jusqu'à récemment, Mathilde travaillait dans un laboratoire à 10$ l'heure. Elle vient tout juste de décider de retourner aux études, une bonne avenue pour tenter de se hisser au-dessus du seuil de pauvreté.

«J'aimerais devenir infirmière auxiliaire. Je saurai en novembre si je suis admise dans le programme, mais d'ici là, j'essayerai aussi d'être acceptée en technique d'éducation à l'enfance.»

Pour Jason, la persévérance a finalement été payante. «J'ai maintenant fait ma réputation et je ne cours plus après les contrats. Je suis donc rendu loin du salaire minimum.»

D'après le Front de défense des non-syndiqué-e-s, 90 % des travailleurs au salaire minimum sont non-syndiqués. Et ce ne sont pas que des jeunes: 35 % des gens payés 9$ l'heure sont âgés de 25 ans et plus.