Au lever, chaque matin de semaine, Nathalie (nom fictif) se demande si cela vaut la peine qu'elle se rende au travail. Pire encore, elle se demande si cela vaudrait la peine qu'elle avertisse quelqu'un si jamais elle décidait de ne pas s'y rendre.

Promue et mutée dans une nouvelle équipe depuis bientôt un an, Nathalie ne s'est jamais sentie acceptée.

«Je suis arrivée dans l'équipe avec une collègue qui a le même profil que moi: dans la trentaine, diplômée de deuxième cycle à l'université et comptant environ sept ans d'expérience dans l'entreprise. Dans notre nouvelle équipe, les gens sont plus vieux et la majorité n'a même pas l'équivalent de son cinquième secondaire. Nous n'avons pas du tout la même vision des choses et nous sommes perçues comme une menace», explique-t-elle.

 

Le rejet d'une personne par l'équipe, les conflits entre les nouveaux arrivés et les plus anciens, l'intimidation insidieuse ou, encore, le harcèlement sont des problèmes fréquents dans les milieux de travail, soutient Marie Claude Lamarche, psychologue spécialisée en santé psychologique au travail.

Que faire lorsqu'une telle situation se produit? «Il faut en parler, essayer de régler le problème», affirme-t-elle.

Olivier Doucet, spécialiste de la mobilisation des ressources humaines à HEC Montréal, croit aussi qu'il est important que la direction d'une entreprise prenne ces problèmes au sérieux pour éviter qu'ils ne s'étendent à l'ensemble de l'équipe.

Or, bien souvent, la haute direction d'une entreprise ne sait pas trop quoi faire lorsqu'elle est confrontée à de telles situations. C'est particulièrement le cas des entreprises qui n'ont pas de département de ressources humaines doté de professionnels qualifiés pour gérer ce genre de conflits.

«Pourtant, intervenir pour assainir un milieu de travail demeure souvent assez simple. Il faut d'abord faire un diagnostic organisationnel pour voir où est le problème et comment on peut le régler», affirme la psychologue.

Nathalie aurait bien aimé que son patron prenne le problème au sérieux et tente de le résoudre.

«Il a fait un diagnostic rapide qui dit en gros que ma collègue et moi avons un problème de communication parce que nous utilisons un vocabulaire que le reste de l'équipe ne comprend pas. Pour régler le problème, le patron s'en tient à répéter que l'antipathie doit cesser! Il ne tient pas en compte que nous avons l'impression que ce que nous disons n'a jamais d'impact.»

Des conséquences importantes

À long terme, demeurer dans un environnement de travail malsain peut avoir des impacts importants sur le travailleur.

«Lorsqu'on se fait agresser, on a le réflexe de devenir agressif. Et la personne doit décharger cette agressivité lorsqu'elle quitte le travail. Souvent, c'est la famille qui la reçoit ou, encore, le travailleur se jette dans l'alcool ou autres impulsions. On peut aussi voir apparaître une perte d'appétit ou des problèmes d'insomnie», indique la psychologue.

Pour sa part, Nathalie fait fréquemment des cauchemars qui la mettent en scène dans son milieu de travail. «Souvent, dans mes rêves, j'explose, je vide mon sac devant mes collègues.»

Un milieu de travail malsain peut aussi causer une démobilisation du personnel, une diminution de la productivité, une augmentation du niveau de stress et, même, des problèmes d'épuisement professionnel, d'après Olivier Doucet.

D'ailleurs, avant Noël, Nathalie a commencé à se sentir près du «burn-out». Elle a donc lâché prise.

«Maintenant, je ne travaille presque plus! Mais moi, je veux me réaliser, me sentir utile.»

Ce qui conduit à un autre grand danger pour l'entreprise dans laquelle les employés ne peuvent s'épanouir: subir des départs fréquents des membres de son personnel. Une option qu'envisage sérieusement Nathalie.

«Et ce sont souvent les travailleurs les meilleurs qui partent, ceux qui ont une plus grande employabilité», remarque M. Doucet.

QUELQUES TRUCS

Que faire pour favoriser un climat de travail sain dans son entreprise? Voici quelques trucs d'Olivier Doucet, spécialiste de la mobilisation des ressources humaines à HEC Montréal.

> Être attentif aux conflits.

> Prendre rapidement des mesures pour régler les conflits avant qu'ils ne s'étendent.

> Assurer l'équité entre les employés en établissant des règles claires d'obtention de promotion ou de primes pour éviter de créer un sentiment d'injustice chez certains employés.

> Favoriser la bonne communication entre les employés et la direction.

> Mettre à la disposition des cadres des outils pour gérer les conflits entre les employés.

> Créer des objectifs d'équipe à atteindre, particulièrement si le travail à réaliser dans l'entreprise est de nature individualiste.

> Ne pas hésiter à aller chercher l'aide de professionnels.