Il y a de ces emplois qu'on ne décroche pas du jour au lendemain. Parlez-en à Karine Dubois qui, après avoir fait des études en journalisme, a décidé qu'elle voulait devenir productrice de documentaires. Le job alimentaire, elle connaît!

Étudiante, Karine était serveuse dans un restaurant. «Pendant mon dernier trimestre à l'université, j'ai aussi décroché un contrat de recherchiste et après avoir fait les deux jobs pendant un bout, je me suis résignée à lâcher le restaurant parce que cela ne m'apportait rien professionnellement: pas de contacts, ni d'expérience dans le domaine du documentaire», raconte-t-elle.

Abordant la question dans son livre Écrire pour vivre: conseils pratiques à ceux qui veulent vivre pour écrire, Jean-Benoît Nadeau, croit que le job alimentaire est essentiel dans bien des domaines et qu'il faut le choisir méticuleusement.

«Le job alimentaire doit idéalement être conséquent avec ce que nous voulons faire dans la vie, parce qu'ainsi, il a plus de chances d'être satisfaisant et de nous rapprocher de notre but», affirme l'auteur qui travaille également comme journaliste pigiste.

Il donne aussi l'exemple du comédien qui fait de la publicité comme job alimentaire et qui peut ainsi rencontrer des réalisateurs et apprendre les rouages du métier.

Karine voit également bien des avantages à réaliser des contrats de recherche en plus de travailler sur des projets personnels.

«Je rencontre beaucoup de gens importants avec ces contrats, je me fais un nom et j'apprends énormément de choses qui me seront très utiles dans ma carrière de productrice et me permettront d'avoir une vision d'ensemble sur mes projets.»

Garder un bon équilibre

Le photographe Alexis Aubin, qui a travaillé dans un restaurant branché de la métropole pour s'assurer une certaine stabilité de revenus, apporte toutefois quelques nuances.

«Même si mon travail en restauration était très éloigné de la photographie, j'ai quand même appris beaucoup avec ce job et j'ai rencontré bien des gens influents. En plus, ça me permettait de bien gagner ma vie tout en faisant mes contrats de photographe.»

La grande difficulté à devoir gérer deux emplois, c'est d'être en mesure de garder un bon équilibre. Pour réaliser son rêve de devenir auteur, Jean-Benoît Nadeau, avait au départ entrepris des études en génie.

«Je me disais que je pourrais bien gagner ma vie comme ingénieur tout en travaillant sur mes projets de livre. Heureusement, j'ai vite réalisé que comme ingénieur, je travaillerais comme un débile et que je n'aurais plus de temps pour écrire!» C'est par la suite qu'il s'est tourné vers le journalisme.

Alexis Aubin s'est également fait prendre au piège. «Mes patrons étaient très compréhensifs lorsque j'avais des contrats. Toutefois, comme je travaillais 40 ou 50 heures par semaine au restaurant, je n'avais plus beaucoup de temps pour me trouver de nouveaux clients», explique celui qui cherche maintenant un job alimentaire moins prenant et plus près de la photographie.

Pour sa part, Karine a toujours eu la chance de pouvoir travailler à temps partiel sur ses contrats alimentaires de façon à toujours continuer à travailler sur ses projets qui la passionnent vraiment. Même s'il lui arrive de refuser des contrats, Karine fait toujours attention pour entretenir ses bons contacts.

«Pour qu'une personne continue à penser à moi lorsqu'elle a un contrat à offrir, je ne lui dis jamais non deux fois d'affilée», affirme celle qui, en ce moment, fait de la recherche en plus de préparer une tournée pour le premier documentaire qu'elle a produit l'an dernier, Un trou dans le temps, en association avec les Productions Virage.

Fantasme

Et quand doit-on lâcher son job alimentaire?

«Il faut que les planètes soient bien alignées, croit M. Nadeau. Tout dépendant de sa situation, il se peut aussi qu'on doive faire un va-et-vient entre des périodes où on n'a pas besoin de job alimentaire et d'autres, où il est essentiel. D'où l'importance de retirer le plus possible de satisfaction de son job alimentaire.»

Il se peut aussi qu'on réalise, en cours de route, que son job de rêve n'est finalement qu'un fantasme.

«Par exemple, je remarque que bien des journalistes rêvent de couvrir la guerre, alors que 99% d'entre eux n'en seraient même pas capables! Il faut donc aussi accepter nos limites, être curieux et ouvert, parce que bien souvent, le job alimentaire nous permet de découvrir des talents qui peuvent nous mener loin.»

CINQ CONSEILS POUR GÉRER UN JOB ALIMENTAIRE

- Accepter qu'il est parfois essentiel.

> Chercher un job alimentaire cohérent avec son job de rêve.

> Garder un bon équilibre entre ses deux emplois.

> S'ouvrir aux occasions intéressantes données par son job alimentaire.

> Accepter qu'il soit possible que son job de rêve ne soit finalement qu'un fantasme.