Le site de ventes éclair Beyond the Rack, en graves difficultés financières, a été acquis par le Montréalais Nonu Ifergan, propriétaire des lunetteries Farhat et d'Aspex Eyeware. Une transaction qui n'empêche pas les clients de dénigrer avec ardeur le service à la clientèle du détaillant sur Facebook.

Nonu Ifergan a mis la main sur le détaillant montréalais le 25 mai. La transaction, dont le montant n'est pas mentionné dans les documents légaux, avait été autorisée par le juge Michel A. Pinsonnault la veille. Une trentaine d'acheteurs potentiels avaient signé une entente de confidentialité pour consulter les livres de l'entreprise.

Beyond the Rack (BTR) s'était placé à l'abri de ses créanciers en mars. Depuis trois ans, le détaillant avait réalisé une perte nette de 58 millions sur des ventes de 361 millions.

Fondé en 1965, le groupe Aspex se décrit comme « l'un des plus importants distributeurs de lunettes de vue et de lunettes solaires de qualité au monde », desservant 50 000 clients dans 80 pays. L'entreprise est connue pour ses marques EasyClip et EasyTwist.

Nonu Ifergan était déjà impliqué dans le dossier de BTR à titre de prêteur intérimaire (DIP, dans le jargon).

LES CRÉANCIERS OBTIENDRONT 0,58 %

Le plus récent rapport du contrôleur, Richter, nous apprend par ailleurs que les nombreux créanciers se partageront moins de 250 000 $. Une somme de 310 000 $ est disponible, mais des « frais professionnels » grèveront ce montant de 68 000 $.

Étant donné que le total des créances non garanties avoisine 45 millions, la distribution équivaudra à 0,58 % des sommes dues. Richter recommande l'acceptation du plan car autrement, la seule autre « option réaliste » serait la faillite.

La liste des créanciers ordinaires, qui s'étend sur 69 pages, compte 20 créances de plus de 100 000 $. On y trouve notamment Amazon (110 000 $), Google (570 000 $), Postes Canada (383 000 $), UPS (541 000 $) et FedEx (441 000 $). Les comptes clients se chiffrent à 7 millions de dollars et les notes de crédit, à 4,4 millions.

Quant aux créances garanties (qui dépassaient 20 millions de dollars, à l'origine), elles sont devenues des créances ordinaires lors de la vente de l'entreprise « puisque l'offre ne permettait pas de les payer », nous a indiqué le responsable du dossier chez Richter, Benoît Gingues.

5 $ OU 15 $

Pour le moment, le site de BTR semble poursuivre ses activités en vendant de la marchandise en stock via PayPal. Les paiements par carte de crédit ne sont plus acceptés.

Il n'a pas été possible de savoir quels étaient les plans à moyen et à long terme de Nonu Ifergan. Il n'a pas rappelé La Presse.

Chose certaine, les internautes sont nombreux à pester publiquement contre le service à la clientèle du détaillant. Sa page Facebook est remplie de mises en garde et d'accusations. Certains disent que le détaillant arnaque les consommateurs en vendant des marchandises qui ne seront jamais livrées. « Ne commandez pas de cette entreprise. Ils fraudent! »

D'autres clients, qui attendent leur commande depuis des mois, s'impatientent. « Je ne veux pas un crédit. Je veux ravoir mon argent! » Plusieurs se plaignent de ne pas être capables de parler à un employé. « BTR est maintenant un gros gâchis », tranche une cliente frustrée.

Les documents légaux indiquent que les 45 000 clients ayant une note de crédit ou ayant passé une commande avant le 24 mars (jamais reçue) obtiendront un chèque de 5 $ ou un crédit de 15 $ pouvant être utilisé sur btr.com. Ils recevront dans les prochaines heures un courriel leur indiquant qu'ils doivent effectuer leur choix avant le 18 juillet. « Le nouvel acquéreur travaille fort pour honorer les commandes passées après le 25 mars », précise Benoît Gingues.

Les personnes s'estimant flouées peuvent aussi contacter l'Office de la protection du consommateur (OPC). Jusqu'ici, l'organisme n'a pas été inondé de plaintes. Depuis la fin de mars, il n'en a reçu que 28.

PHOTO TIRÉE DE TWITTER

Nonu Ifergan

BTR en quelques dates

• Décembre 2008 : incorporation

• Janvier 2009 : début des activités

• 2014 : L'entreprise est à vendre. Une centaine d'investisseurs et d'acquéreurs potentiels sont été contactés par BMO Nesbitt Burns et Canaccord Genuity. Sans succès.

• 2014-2015 : Environ 30 % des employés sont mis à pied et certaines catégories de marchandises cessent d'être vendues.

• 24 mars 2016 : l'entreprise se place sous Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC)

• 25 mai 2016 : BTR est vendue à une entreprise à numéro détenue par Nonu Ifergan, propriétaire d'Aspex Eyeware Group et des lunetteries Farhat, entre autres.

• 3 août 2016 : assemblée des créanciers