Malgré les efforts de restructuration des derniers mois et l'embauche de l'ex-députée Élaine Zakaïb il y a trois semaines, les boutiques Jacob ne survivront pas. L'entreprise est officiellement en faillite.

En affaires depuis 37 ans, Jacob a finalement fait une cession volontaire de ses biens, hier, et demandé au cabinet Raymond Chabot Grant Thornton d'agir à titre de syndic de faillite. Au moment de se placer à l'abri de ses créanciers, en mai, sa dette frôlait les 90 millions de dollars.

«Le plan de relance de Jacob avait énormément de sens. On s'était même trouvé une banque traditionnelle pour nous financer. [...] On s'est battus jusqu'à la fin», a indiqué en entrevue Élaine Zakaïb, qui avait démissionné le 29 septembre pour devenir vice-présidente, stratégies et finances, et chef de la restructuration de Jacob.

«Le problème, c'est l'achalandage. Y a une grande baisse d'achalandage dans les magasins. [...] Le plan d'affaires était basé sur les chiffres de vente de l'an passé, ce qui n'était pas complètement absurde. [...] Notre taux de clôture [de conversion] était bon, on avait une bonne facture moyenne, mais on avait deux fois moins d'achalandage que l'année passée.»

Le responsable du dossier chez Raymond Chabot Grant Thornton, Jean Gagnon, a précisé que la liquidation des stocks (valeur de plus ou moins 5 millions au coûtant) et de l'équipement de magasins commencera dans les prochains jours. Le processus prendra quelques semaines. Jacob ne possède aucun autre actif de valeur. «C'est très rare que des baux soient vendus. Généralement, ils sont abandonnés aux propriétaires immobiliers», a-t-il ajouté.

Changement de dernière minute

Le fondateur de Jacob, Joseph Basmaji, prévoyait racheter les actifs de l'entreprise, dont personne d'autre ne voulait. Le processus de vente mis en place par le syndic à l'avis d'intention, PricewaterhouseCoopers (PwC), n'avait en effet rien donné.

Cette transaction devait être soumise à la Cour supérieure pour approbation hier. Les plans ont changé à la toute dernière minute.

«En fin de semaine, ils ont révisé leurs projections. Ils ont vu que les ventes récemment ne sont vraiment pas satisfaisantes. Donc, que c'était mieux de déclarer faillite, que c'était mieux pour tout le monde, plutôt que de prendre d'autres risques», a raconté à La Presse Affaires Claudio Filippone, associé chez PwC.

En annonçant sa démission, Élaine Zakaïb avait répété qu'elle ne se le pardonnerait jamais si jamais Jacob devait disparaître.

Aujourd'hui, elle dit bien vivre avec sa décision d'avoir tenté le tout pour le tout. «Si j'avais appris la nouvelle [de la faillite de Jacob] assise à l'Assemblée nationale, si je n'avais rien fait, je ne me le pardonnerais pas. Là, je ne peux rien regretter, je suis allée jusqu'au bout.»

Pour sauver le détaillant, l'ex-députée péquiste de Richelieu souhaitait faire un virage local et vendre uniquement des vêtements dessinés et fabriqués au Québec. Elle espérait ainsi entraîner «la création de centaines d'emplois dans la province».

Joseph Basmaji et la créatrice du programme des Gazelles (alors qu'elle était ministre déléguée à la Politique industrielle sous Pauline Marois) sont tous les deux originaires de Sorel. Ils se connaissaient «depuis des années» puisqu'elle avait été avocate pour Jacob à la fin des années 80. C'est l'homme d'affaires qui l'a convaincue de travailler au sauvetage du détaillant, souvent qualifié de «fleuron québécois». Un choix qu'elle avait qualifié de «déchirant».