Un consommateur, qui dénonce le prix «exorbitant» du vin au Québec, s'attaque au monopole de la Société des alcools du Québec (SAQ).

Jean-René Jasmin, client montréalais de la SAQ, a demandé cette semaine à la Cour supérieure l'autorisation d'exercer un recours collectif contre la société d'État. Dans la requête, préparée par le cabinet de Québec BGA Avocats, le consommateur allègue que la SAQ abuse de sa situation monopolistique et vend ses produits au moins 30% trop cher.

Plus grand acheteur

Même si la SAQ détient un monopole, elle «n'est soumise à aucun mécanisme de contrôle par un organisme indépendant, contrairement à une société d'État comme Hydro-Québec, dont les augmentations tarifaires sont balisées, vérifiées et approuvées par la Régie de l'énergie», précise la requête.

«C'est comme un bar ouvert à la SAQ!», lance Me David Bourgoin, de BGA Avocats.

La SAQ est le plus grand acheteur de vin du monde, ce qui lui confère un pouvoir d'achat permettant de négocier de très bons prix, poursuit la requête en s'appuyant sur une étude publiée en mars dernier par Frédéric Laurin, professeur d'économie à l'Université du Québec à Trois-Rivières.

Mais les clients ne profitent pas des économies découlant de ce pouvoir d'achat, car la SAQ applique une marge bénéficiaire brute de 145% en moyenne sur ses produits, notamment sur le vin qui forme 70% de ses ventes. La marge de profit est particulièrement élevée sur les bouteilles de moins de 15$ qui forment l'essentiel des stocks de la SAQ.

Même en soustrayant toutes les charges d'exploitation, la marge de la SAQ s'élève encore à 74%. Cela gonfle non seulement les prix de vente, mais aussi les taxes (TVQ et taxe sur l'alcool) qui sont calculées sur ce prix, explique Me Bourgoin.

L'avocat considère que la marge de la SAQ est disproportionnée, déraisonnable et exorbitante. Il estime qu'elle ne devrait, en aucun cas, dépasser 30%. Ce faisant, il évalue que les prix sont au moins 30% trop élevés, voire abusifs, ce qui contreviendrait à la Loi sur la protection du consommateur et au Code civil.

La SAQ a déjà fait l'objet d'une demande de recours collectif, en 2008. Des clients déploraient que la SAQ ait gonflé artificiellement ses prix de vente, en s'organisant avec ses fournisseurs pour ne pas refléter l'effet de la hausse du dollar canadien, comme l'avait dévoilé une série d'articles de La Presse. Mais le recours n'a pas été autorisé. Le juge a considéré que la fixation des prix et l'encadrement de la SAQ relevaient de la sphère politique.

La SAQ n'a pas voulu faire de commentaire sur le nouveau recours. «Nous sommes en train de prendre connaissance de la requête», a dit son porte-parole, Renaud Dugas.