Après des années d'intenses pressions, les restaurateurs ont finalement obtenu de la Régie des alcools qu'elle révise la loi qui encadre le commerce de la bière, du vin et des spiritueux.

L'Association des restaurateurs du Québec (ARQ) espère maintenant que le processus se traduira par des allègements significatifs à un encadrement réglementaire qu'elle juge digne de l'«ère jurassique».

L'ARQ souhaite notamment qu'on permette aux clients de repartir avec la bouteille de vin qu'ils ont achetée mais qu'ils n'ont pas bue au complet sur place, comme cela est possible en Ontario et dans plusieurs États américains.

Selon l'ARQ, ce changement irait de pair avec l'intention du gouvernement Charest de faire passer de 0,08 à 0,05% le taux maximal d'alcool permis au volant. À l'heure actuelle, certains clients ont tendance à boire davantage qu'ils ne le devraient pour finir leur bouteille.

Le regroupement demande également que la Régie clarifie la règle qui stipule que dans un restaurant, un client doit commander un repas pour pouvoir consommer une boisson alcoolisée. La loi actuelle ne précise pas ce qui constitue un repas, de sorte qu'un restaurateur a déjà été pris en défaut pour avoir servi de la bière à des policiers qui n'avaient commandé que des frites.

Dans un jugement rendu en novembre 2006, la Cour du Québec a donné raison à ce restaurateur en statuant que la loi «n'est pas claire et apparaît équivoque».

L'ARQ voudrait aussi repousser de 20 h à 21 h - ou même 22 h - l'heure à partir de laquelle les parents ne peuvent plus être accompagnés de leurs enfants sur une terrasse où l'on sert de l'alcool. Des touristes étrangers médusés ont déjà fait les frais de cette règle arbitraire.

Les restaurateurs se demandent de plus s'il est encore nécessaire d'obliger la Société des alcools du Québec (SAQ) à apposer un «timbre de droit» sur chacune des bouteilles de vin qui leur sont destinées. Ce système coûte cher à la SAQ, et en cas d'erreur humaine, ce sont les restaurateurs qui écopent, soutient François Meunier, vice-président de l'ARQ.

«On est allé sur la lune, on envoie des sondes sur Mars, mais on a encore un employé qui est obligé de mettre des petits collants sur des bouteilles pour que les inspecteurs puissent faire des vérifications», ironise-t-il.

C'est sans compter qu'un règlement empêche les bars et les restaurants de profiter des rabais que la SAQ offre aux particuliers tout en leur interdisant de faire de la publicité à propos de leurs promotions sur les produits alcoolisés.

Les restaurateurs aimeraient en outre qu'on modernise les articles de la loi qui les obligent à ouvrir une bouteille devant le client, même lorsqu'il s'agit d'une grande réception ou de la vente de vin au verre.

«Apportez votre vin» chez St-Hubert?

Par ailleurs, l'ARQ s'oppose à l'idée que les restaurants qui vendent de l'alcool puissent également permettre à leurs clients d'apporter leur vin ou leur bière.

«On a réussi à créer une paix commerciale (en interdisant aux restaurants «Apportez votre vin» de vendre de l'alcool) et on souhaite que ça reste comme ça», explique François Meunier.

La chaîne de rôtisseries St-Hubert évalue actuellement ce concept de «double vocation» et espère que la nouvelle loi permettra de l'implanter dans ses restaurants, indique une porte-parole, Josée Vaillancourt.

La Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec a elle aussi ses revendications, notamment l'assouplissement de la règle voulant qu'il faut un permis d'alcool, au coût unitaire de 549 $ par année, pour chaque pièce d'un établissement.

La Régie ne s'est pas fixée d'échéancier pour terminer son analyse. Après avoir consulté l'industrie, elle devra présenter son projet de réforme au ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil.

«On ne peut pas présumer s'il va être d'accord ou non avec les propositions qu'on va lui faire», relève Colette Lépinay, porte-parole de la Régie.