Quatre milliards de nouvelles dépenses dans des programmes favorisant l'accès à la propriété, la formation de la main-d'oeuvre, la protection des frontières, l'achat de véhicules électriques ou la réconciliation avec les peuples autochtones portent à tout près de 20 milliards le déficit prévu dans le dernier budget du gouvernement libéral actuel, présenté cet après-midi par le ministre des Finances, Bill Morneau.

Justin Trudeau aurait pu profiter de la bonne tenue de l'économie canadienne, qui a amélioré la santé financière de son gouvernement de 4,8 milliards uniquement depuis son énoncé économique de l'automne dernier, pour se présenter aux électeurs dans quelques mois avec un déficit inférieur à celui qui avait été prévu.

Le premier ministre et M. Morneau ont plutôt choisi de réinvestir immédiatement ces sommes. Les quatre milliards de dépenses supplémentaires annoncés hier pour l'année 2019-2020 s'ajoutent au milliard déjà inclus dans l'énoncé économique de l'automne pour porter à 19,8 milliards le déficit prévu. Il était de 19,6 milliards à l'automne.

Du coup, la promesse faite lors de la dernière campagne électorale d'effacer les déficits avant la fin du mandat est officiellement brisée. Ce n'est pas étonnant, dans la mesure où cela avait été télégraphié dès le premier des quatre budgets Morneau.

« Nous l'avons expliqué au début et nous continuons avec notre approche selon laquelle c'est nécessaire de faire des investissements dans la classe moyenne, s'est défendu hier M. Morneau. C'est une approche qui, clairement, fonctionne. Nous sommes dans une meilleure situation. Nous pouvons donc expliquer aujourd'hui, comme hier et comme demain, que c'était nécessaire de faire des investissements. »

Il s'est par ailleurs refusé à fournir un nouvel échéancier de retour à l'équilibre, mais a rappelé que le ratio du déficit et de la dette sur le produit intérieur brut, et donc leur poids sur l'économie canadienne, allait continuer de diminuer.

Accès à la propriété

Quelques éléments clés de ce nouveau budget touchent l'accès à une première propriété. Ottawa tente de s'attaquer au problème sans alimenter davantage la surchauffe du marché immobilier.

Il croit notamment y parvenir en créant un nouvel « Incitatif à l'achat d'une première propriété », en collaboration avec la Société canadienne d'hypothèque et de logement (SCHL). Celui-ci prendra la forme d'un ajout à la mise de fonds des acheteurs, versé par la SCHL, visant à réduire le montant du prêt hypothécaire, et donc des paiements mensuels, de ces derniers. Les modalités du remboursement n'ont pas encore été déterminées, mais celui-ci pourrait n'être exigible qu'à la revente.

Des ajustements seront également apportés aux règles entourant le Régime d'accession à la propriété (RAP), dont le rehaussement de 25 000 $ à 35 000 $ de son plafond.

Ottawa introduit aussi un nouveau concept pour la formation de la main-d'oeuvre, à savoir l'Allocation canadienne pour la formation. Celle-ci octroiera aux travailleurs canadiens un crédit annuel automatique de 250 $ applicable à la formation. Ce crédit pourra être accumulé, jusqu'à un maximum de 5000 $. Des modifications au régime d'assurance-emploi permettront aussi d'obtenir un congé de quatre semaines tous les quatre ans, accompagné d'un versement correspondant à 55 % du salaire, pour suivre une formation.

Une partie significative des surplus de 2018-2019, soit 2,2 milliards de dollars, sera aussi octroyée d'un seul coup, de façon non récurrente, aux municipalités pour augmenter les versements d'Ottawa dans le cadre de projets d'infrastructure.

Les automobilistes intéressés à un véhicule électrique ont aussi reçu une bonne nouvelle. Ottawa leur versera jusqu'à 5000 $ pour l'achat d'une voiture dont le prix est inférieur à 45 000 $. Les entreprises, quant à elles, pourront déduire dès la première année de leur entrée en service au sein de leur flotte les coûts d'acquisition de véhicules électriques.

Ottawa consacrera aussi 1,18 milliard sur cinq ans, dont 362 millions dès cette année, pour améliorer la sécurité à la frontière, « traiter 50 000 demandes d'asile reçues annuellement et faciliter le renvoi des auteurs d'une demande d'asile rejetée ».

La réconciliation avec les peuples autochtones, qui fait l'objet d'un chapitre entier du principal document budgétaire, bénéficiera quant à elle d'investissements de 3,8 milliards sur cinq ans, dont 694 millions cette année. Ces sommes serviront notamment à améliorer l'accès des jeunes autochtones aux services sociaux et à améliorer la disponibilité d'eau potable.