Un nouveau nuage d'incertitude vient de s'ajouter dans le ciel déjà gris au-dessus de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) avec l'élection d'un nouveau président au Mexique dimanche.

À la suite de sa victoire, le président élu Andres Manuel Lopez Obrador a dit être prêt à négocier un nouvel ALENA avec les États-Unis et le Canada. Les négociations entre les trois partenaires stagnent cependant depuis plusieurs semaines.

Le président mexicain élu, surnommé «AMLO», arrive au moment où la tension est vive entre le Canada et les États-Unis en raison de l'imposition de tarifs douaniers de part et d'autre de la frontière.

Les discussions sur le traité commercial ont aussi été refroidies par les demandes de la Maison-Blanche d'inclure une clause crépusculaire.

M. Lopez Obrador, qui s'est déjà montré critique de l'ALENA sous sa forme actuelle, compte ajouter sa propre équipe d'experts à la table de négociations. Il a l'intention de faire part de cette proposition au président sortant Enrique Peña Nieto lors d'une rencontre prévue mardi.

En entrevue avec le réseau Televisa, le politicien de gauche s'est néanmoins engagé à laisser l'équipe actuelle de négociateurs mexicains poursuivre son travail jusqu'à son entrée en poste, le 1er décembre.

Le premier ministre Justin Trudeau a félicité Andres Manuel Lopez Obrador pour sa victoire à l'élection présidentielle de dimanche.

Dans un communiqué publié lundi, M. Trudeau a rappelé les liens étroits qui unissent le Canada et le Mexique et affirmé que les deux pays entretenaient «une relation commerciale mutuellement profitable qui fait l'envie du reste du monde». Selon lui, les efforts déployés de part et d'autre pour renégocier l'ALENA en sont la preuve.

Le président américain Donald Trump a lui aussi souligné la victoire de M. Lopez Obrador, mais a laissé entendre qu'il attendrait après les élections de mi-mandat aux États-Unis pour signer une nouvelle version de l'ALENA.

Peu d'optimisme face aux négociations

Andres Manuel Lopez Obrador, un politicien de gauche, a promis aux Mexicains de profonds changements dans le pays, mais a assuré que les droits individuels et les droits de propriété seraient garantis et que l'autonomie de la Banque du Mexique serait respectée.

Justin Trudeau a travaillé étroitement avec M. Peña Nieto pour faire progresser les négociations sur l'ALENA et a discuté avec lui de l'accord commercial lors d'une conversation téléphonique vendredi, selon un communiqué publié samedi par le bureau du premier ministre.

Toutefois, avec la rhétorique incendiaire de Donald Trump, les mesures de rétorsion du Canada contre les États-Unis et l'arrivée d'un gouvernement contestataire de gauche au Mexique, plusieurs craignent que les discussions sur l'ALENA continuent de faire du surplace encore longtemps.

Les mesures de rétorsion mises en place par le Canada sur 16,6 milliards $ de produits américains sont entrées en vigueur dimanche. Au lendemain de l'application de ces tarifs punitifs, la porte-parole de la Maison-Blanche a soutenu que cette escalade «ne fait rien pour aider le Canada et ne fait que du tort aux travailleurs américains».

«Nous avons été très bons envers le Canada pendant plusieurs années et ils en ont profité», a déclaré Sarah Sanders lors de sa rencontre quotidienne avec les médias à Washington.

Considérant les accusations de l'administration Trump, qui prétend que le Canada représente une menace à la sécurité nationale pour justifier l'imposition de tarifs douaniers, puis la réplique canadienne d'imposer ses propres surtaxes ainsi que les élections de mi-mandat qui approchent aux États-Unis, l'économiste Moshe Lander, de l'Université Concordia, ne voit pas comment le dossier de l'ALENA pourrait progresser à court terme.

«Je ne vois pas comment Justin Trudeau peut obtenir une entente. Je crois que l'ALENA va être mis de côté pour les prochains six à douze mois», a prédit Moshe Lander.