Augmenter le seuil de minimis - le seuil en dessous duquel un produit importé est exempté de taxes de vente et de droits de douane - à 200 $ ou plus, comme l'exigent les États-Unis dans le cadre des négociations visant à moderniser l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), pourrait entraîner la perte de 286 000 emplois dans le secteur du commerce de détail au Canada en trois ans, selon une étude réalisée par PwC qui sera dévoilée vendredi.

Les travailleurs aux revenus modestes et ayant des options limitées sur le marché de l'emploi feraient les frais de ces pertes d'emplois, toujours selon cette étude réalisée pour le compte du Conseil canadien du commerce de détail (CCCD).

La hausse du seuil de minimis ferait aussi mal aux finances des gouvernements. À lui seul, le gouvernement fédéral pourrait perdre 5,7 milliards de dollars en revenus de taxes de vente, de droits de douane et d'impôts des entreprises et des travailleurs dès la première année de la hausse. Les pertes de revenus friseraient les 8 milliards de dollars la deuxième année et les 10,7 milliards l'année suivante, selon les estimations de PwC.

Cette étude détaillée sonne véritablement l'alarme sur les conséquences négatives d'une hausse du seuil de minimis, présentement établi à 20 $ pour les envois par service de messagerie ou par la poste vers le Canada, sur les emplois au pays. Elle permet également de quantifier pour la première fois les dommages que cela pourrait causer à l'économie canadienne.

PRESSION DES GÉANTS AMÉRICAINS

Les géants américains du commerce en ligne tels que Amazon et eBay font pression depuis plusieurs années sur le gouvernement canadien pour qu'il augmente le seuil de minimis à au moins 200 $. Ottawa a toujours opposé une fin de non-recevoir catégorique à cette demande.

Aux États-Unis, ce seuil a été majoré de 200 $US à 800 $US en mars 2016. Et en juillet, l'administration de Donald Trump a fait savoir qu'une hausse du seuil de minimis à 800 $US fait partie de sa liste des demandes dans le cadre des négociations visant à moderniser l'ALENA.

« Une hausse du seuil de minimis, même à 200 $, aurait des conséquences désastreuses pour le pays », affirme sans ambages Karl Littler, du CCCD, dans une entrevue accordée à La Presse depuis Toronto. « Nous ne voulons pas de traitement de faveur. Mais il faut s'assurer que les règles du jeu soient équitables pour les détaillants du Canada devant la montée en force des géants du commerce en ligne que sont les eBay et Amazon », ajoute-t-il du même souffle.

Aux États-Unis, par exemple, il n'existe pas de taxe de vente fédérale, ce qui procure déjà un avantage concurrentiel non négligeable aux géants du commerce en ligne. En outre, les entreprises américaines dominent outrageusement le commerce en ligne sur le territoire des États-Unis, laissant peu de place aux entreprises étrangères, ce qui leur permet de réaliser des économies de volume.

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2,1 millions: Nombre approximatif de Canadiens qui travaillent dans le secteur du commerce au détail

22 %: Proportion des consommateurs américains ont déjà effectué des achats transfrontaliers en ligne, contre 67 % des consommateurs canadiens

Sources : Statistique Canada (2016) et étude de PwC