On le sait : sur les réseaux sociaux, bien des utilisateurs ne font pas dans la dentelle. Les entreprises font les frais du ras-le-bol ambiant plus souvent qu'à leur tour, révèle une nouvelle étude.

Cynisme omniprésentsSur une période d'un an, le cabinet de relations publiques National a analysé 44 000 conversations tenues sur Facebook, Twitter, des blogues, des forums et les sites web de médias traditionnels. La conclusion est effarante : 91 % des conversations étaient « fortement empreintes de cynisme ». « Les Canadiens ont l'impression d'avoir peu d'influence sur les choix des décideurs clés qui ont une incidence sur leur vie. Ils se sentent abandonnés par le "système" », écrit National, précisant que les Canadiens de tous les groupes démographiques partagent ce « désenchantement ». « Faire échec à ce cynisme constitue l'un des principaux défis que doivent relever les entreprises », dit National.

Responsables en partie

Yany Grégoire, professeur à HEC Montréal spécialisé notamment dans la « vengeance des consommateurs », n'est pas étonné par les résultats de l'étude. Il les attribue en partie au fait que les clients satisfaits se font moins entendre que ceux qui sont mécontents. Mais l'enseignant rappelle que les entreprises doivent accepter leur part de responsabilité. « Beaucoup d'entreprises, notamment dans les secteurs où la concurrence est limitée, ne veulent pas trop investir dans le service à la clientèle et dans des systèmes de traitement des plaintes », relève-t-il. De plus, des études indiquent que les entreprises réparent moins bien leurs « échecs de service » qu'auparavant.

Deux prismesSelon National, les Canadiens jugent les entreprises et leurs dirigeants à travers deux prismes : l'équité à l'égard de tous les membres de la société et la capacité de joindre le geste à la parole. « Sur les réseaux sociaux, il faut être à l'écoute non seulement de nos clients, mais de tout le monde qui peut être touché par nos actions », affirme Doris Juergens, associée chez National. Celle-ci reconnaît que même les entreprises qui traitent bien leurs clients peuvent être victimes de commentaires désobligeants. « Mais les entreprises responsables accumulent du capital de sympathie qui les aide à passer au travers des tempêtes », souligne-t-elle.

Les PME épargnées

Les pages Facebook de plusieurs grandes entreprises, les compagnies aériennes et les institutions financières notamment, ressemblent à de véritables défouloirs pour clients en colère. De quoi décourager les dirigeants de PME à avoir une présence sur les médias sociaux ? « Non, c'est rare qu'ils pensent à ça », assure Thoma Daneau, consultant en stratégies numériques. Pourquoi donc ? « Les PME offrent généralement une meilleure expérience client, alors elles s'exposent moins aux commentaires négatifs sur internet », explique-t-il. Quand il y en a, il faut y répondre rapidement, « sinon le consommateur va penser que l'entreprise ne veut pas répondre ou qu'elle n'a pas de réponse à fournir », dit-il.

Des antidotesEn s'appuyant sur leurs constats, les auteurs de l'étude de National ont cherché des façons pour les entreprises de combattre le cynisme des consommateurs. D'abord, il importe que toutes les décisions de l'entreprise concordent avec son positionnement externe. « S'il y a contradiction, le risque d'atteinte à la réputation est élevé », écrivent-ils. Ensuite, l'entreprise doit faire l'effort de « comprendre le point de vue de chacune des personnes et le considérer comme valable », même s'il est incompatible avec ses objectifs. Enfin, il faut faire preuve d'honnêteté et ne pas chercher à dissimuler ses erreurs.