À quelques heures du sommet Canada-UE, la finalisation de l'accord de libre-échange se bute toujours à l'insatisfaction de l'Allemagne concernant les clauses qui pourraient permettre à une entreprise de poursuivre un État, mais Ottawa continue à promettre un dénouement positif.

Berlin a de nouveau jeté un pavé dans la mare alors que le premier ministre canadien Stephen Harper s'apprête à accueillir deux hauts dirigeants de l'Union européenne (UE) - Herman Van Rompuy, président du Conseil européen, et José Manuel Barroso, président de la Commission européenne.

Le ministre allemand de l'Économie, Sigmar Gabriel, a en effet déclaré jeudi qu'il était «totalement clair» que l'Allemagne rejetterait les dispositions sur la protection juridique des entreprises, selon l'agence de presse Reuters.

Du côté d'Ottawa, le ministre de l'Emploi, Jason Kenney, a voulu se montrer rassurant.

«Je n'ai pas entendu ses propos (du ministre allemand), mais j'ai déjeuné avec l'ambassadeur de l'Allemagne hier (mercredi) et il m'a dit qu'il n'y avait aucune barrière à la ratification de l'entente de libre-échange», a-t-il soutenu jeudi à l'issue de la période des questions aux Communes.

Le ministre du Commerce international, Ed Fast, a abondé dans le même sens que son collègue: de bonnes nouvelles seront au menu vendredi.

«Demain, les présidents de l'UE se joindront au premier ministre Harper pour souligner la conclusion fructueuse de cet accord historique qui favorisera la création d'emplois et la croissance économique», a écrit dans un courriel son attachée de presse, Shannon Gutoskie, sans faire mention des réticences allemandes.

Étant donné que l'aval des dix provinces canadiennes et des 28 pays membres de l'UE est nécessaire pour que l'accord entre en vigueur, un vote défavorable de l'Allemagne mettrait le projet en péril.

Le Nouveau Parti démocratique (NPD), attend de pouvoir étudier le rapport dans son ensemble avant de donner sa position.

«On comprend pourquoi il soulève cette question. Notre gouvernement insiste, dans l'ensemble de ses négociations, pour inclure une telle clause. Il s'agit d'un acharnement idéologique», a déclaré le député de Rimouski-Neigette-Témiscouata-Les Basques, jeudi après-midi.

«Avec un partenaire commercial comme l'Europe, il faudrait pouvoir démontrer le besoin d'avoir une telle clause, a poursuivi M. Caron. C'est préoccupant que notre gouvernement soit prêt à mettre l'entente à risque en raison de cet acharnement.»

Selon les informations qui ont été publiées à la fin juillet dans le quotidien allemand «Süeddeutsche Zeitung», les dispositions qui soulèvent l'ire de Berlin s'apparentent au controversé chapitre 11 de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA).

Depuis l'entrée en vigueur de l'accord, en 1994, plusieurs entreprises étrangères se sont prévalues de ce droit d'intenter des recours judiciaires contre le gouvernement du Canada.

Le Parti libéral s'est montré moins enclin à se prononcer sur l'esprit des clauses litigieuses, mais ne s'est pas privé de l'occasion pour fustiger le manque de transparence du gouvernement Harper.

«Le vrai enjeu, c'est que le gouvernement nous dit depuis près d'un an que l'entente est bouclée. (...) Je suis très préoccupée par les échos que nous avons de l'Allemagne à la veille du sommet», a souligné la porte-parole libérale en matière de commerce international, Chrystia Freeland.

Ottawa et Bruxelles ont conclu une entente de principe en octobre dernier, après environ quatre années de négociations.

Selon le gouvernement fédéral, l'accord permettra au Canada d'avoir accès à un marché de 500 millions d'habitants dont le produit intérieur brut (PIB) atteint 17 000 milliards $.

Le premier ministre Stephen Harper doit annoncer ce qu'il en advient vendredi midi au parlement dans le cadre d'une conférence de presse conjointe avec Herman Van Rompuy et José Manuel Barroso.