Malgré l'adhésion d'autres provinces au projet fédéral d'organisme national de réglementation boursière, le Québec et l'Alberta entendent continuer de mener l'opposition contre «une solution à un problème qui n'existe pas», selon le ministre des Finances du Québec, Carlos Leitao.

En résumé, le point de presse impromptu du ministre Leitao en marge d'une réunion du Conseil des ministres du gouvernement Couillard, hier à Québec.

Q M. Leitao, vos premiers commentaires après l'annonce fédérale avec son nouveau projet d'un régulateur national de valeurs mobilières?

R Nous sommes déçus que le gouvernement fédéral continue d'aller de l'avant avec une solution à un problème qui n'existe pas. De toute évidence, le système actuel de «passeport» réglementaire [entre les commissions provinciales, dont l'AMF au Québec] nous a très bien servis, même durant la pire crise financière en 70 ans.

Le système actuel fonctionne et il a fait ses preuves, tout en étant assez flexible pour répondre aux inquiétudes du gouvernement fédéral. Nous sommes donc déçus qu'il maintienne son obstination à créer une commission nationale.

Q Est-ce que certains aspects du nouveau projet fédéral (un organisme de coopération au lieu d'une commission proprement dite) pourraient vous tenter?

R Même après l'annonce d'aujourd'hui [deux provinces de plus en appui], c'est clair que nous n'allons pas embarquer là-dedans. C'est la position traditionnelle du Québec, et on a toujours dit qu'on ne le ferait pas.

J'ai parlé avec mon collègue de l'Alberta [Doug Horner, ministre des Finances] et eux non plus ne sont pas prêts à joindre cet organisme national.

Donc, le Québec et l'Alberta maintiennent leur position: nous voulons protéger notre juridiction en matière de réglementation de valeurs mobilières.

Et nous pensons toujours que l'approche fédérale est contre-productive parce qu'elle risque de balkaniser un système qui fonctionne déjà bien tel qu'il est.

Q Prévoyez-vous une contestation légale de ce projet fédéral, comme celle de 2011 jusqu'en Cour suprême?

R Avec l'annonce d'aujourd'hui [hier], il n'y a rien de nouveau en ce sens. Il y aura un projet de loi fédéral qui sera déposé vers la fin du mois d'août et à ce moment-là, on pourra voir si vraiment il y a matière à contester, s'il y a un risque constitutionnel pour le Québec.

Mais je vous rappelle qu'en 2011, la Cour suprême avait bel et bien souligné que la réglementation des valeurs mobilières est de juridiction provinciale.

Après cette décision [rejet] en Cour suprême, le gouvernement fédéral essaie maintenant de créer un système coopératif avec certaines provinces qui y adhèrent volontairement. Pour nous, il va falloir s'assurer qu'il ne s'agit pas d'une approche par la porte arrière pour ce qui ne pourrait pas se faire directement.

Q Avec plus de provinces adhérant au projet fédéral, le Québec se retrouve-t-il isolé dans son opposition?

R Non, pas isolé. Le Québec et l'Alberta représentent près de 40% du marché des valeurs mobilières au Canada. Que le Nouveau-Brunswick ou la Saskatchewan joignent [le projet fédéral], elles ont leurs raisons. Mais il reste un gros morceau avec le Québec et l'Alberta qui ne sont pas prêts à embarquer dans un tel système fédéral. On ne peut pas ignorer ça.