Malgré une mobilisation tous azimuts au Québec pour réclamer le maintien des crédits d'impôt dont jouissent les fonds de travailleurs, Ottawa va de l'avant avec leur élimination. Une mesure prévue dans le budget du printemps dernier.

«Nous sommes très déçus que le gouvernement fédéral n'ait pas changé d'idée, a commenté Patrick McQuilken, porte-parole du Fonds de solidarité FTQ. Lors des consultations publiques, nous avons pourtant fait une proposition qui tenait compte des objectifs du gouvernement en termes de création d'emplois, d'épargne-retraite et de capital de risque.»

«Ce sont malheureusement les épargnants à faible revenu qui seront les plus pénalisés par la disparition de ces crédits d'impôt», déplore Alain Vallières, directeur des souscriptions pour Fondaction, affilié à la CSN.

La mobilisation des derniers mois en appui aux fonds de travailleurs n'a donc eu aucun effet. L'avant-projet de loi visant à mettre en oeuvre plusieurs mesures fiscales découlant du plus récent budget a été déposé vendredi dernier à la Chambre des communes. La disparition des avantages fiscaux aux fonds de travailleurs y est confirmée: le crédit d'impôt fédéral, qui est actuellement de 15%, sera réduit à 10% en 2015, puis à 5% en 2016, avant d'être éliminé totalement l'année suivante.

Cette décision du ministre des Finances, Jim Flaherty, a provoqué une levée de boucliers dans tous les milieux au Québec. Tant les syndicats que le Conseil du patronat et la Chambre de commerce du Montréal métropolitain l'ont dénoncée. Une motion s'y opposant a aussi été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale. À la suite d'une campagne orchestrée par le Fonds de solidarité, 23 000 courriels ont été envoyés au ministre des Finances, et 80 000 signatures ont été recueillies sur une pétition demandant le maintien des crédits d'impôt.

Impacts au Québec

Les deux plus importants fonds de travailleurs au Canada sont le Fonds de solidarité FTQ et Fondaction. Le Québec est donc beaucoup plus touché que les autres provinces par la décision d'Ottawa: selon le ministre québécois des Affaires intergouvernementales, Alexandre Cloutier, 90% des économies réalisées en cinq ans par le fédéral avec cette mesure proviendront du Québec (312 millions de dollars sur 355 millions).

Les défenseurs des fonds de travailleurs font valoir que ces outils sont essentiels au développement économique du Québec, tout en stimulant l'épargne au sein de la population. «Au moment où l'on parle de plus en plus de l'importance d'épargner pour la retraite, les fonds de travailleurs permettent de promouvoir de bonnes habitudes et de faire de l'éducation économique», note le président du Conseil du patronat, Yves-Thomas Dorval, qui déplore que le gouvernement fédéral ne semble pas avoir mené d'études d'impact avant de prendre sa décision.

Des entreprises telles que Renaud-Bray, Robert Transport, Air Transat, Sail, Biochem Pharma et Sonaca aérospatiale ont bénéficié de l'aide de l'un des fonds de travailleurs québécois.

Les partisans des fonds de travailleurs pourront se faire entendre des parlementaires à l'occasion de l'étude du projet de loi, dans les prochains mois. Ottawa a déjà annoncé qu'il préférait consacrer 400 millions au cours des 10 prochaines années au développement de fonds de capital de risque dirigés par le privé.