C'est un fait rarissime.

Malgré l'annonce d'un sixième déficit budgétaire d'affilée, la dette fédérale contractée sur les marchés diminuera de 17 milliards en 2013-2014.

Le déficit prévu dans le budget dévoilé jeudi par le ministre des Finances, Jim Flaherty, s'élève à 18,7 milliards. Pourtant, Ottawa estime qu'il disposera de ressources financières nettes de 21,8 milliards. Pour l'exercice 2012-2013, soldé vraisemblablement par un déficit de 25,9 milliards, Ottawa a eu, comme on devait s'y attendre, des besoins financiers nets de 27,8 milliards.

Bref, c'est apparemment à n'y rien comprendre.

Pour trouver où réside l'explication, il y en bien une, remontons à la crise financière de 2008-2009.

À l'époque, aucune institution financière ne peut emprunter, les marchés étant gelés. Ni même les canadiennes, pourtant jugées les plus solides et les plus fiables au monde par le Forum économique mondial de Genève.

Pas question pour les détenteurs de capitaux de déposer leurs avoirs dans les banques: l'assurance-dépôt, en cas de défaillance étant limitée à 100 000$ environ, selon les pays.

Ils n'ont d'autre choix que de se réfugier dans les obligations des pays jugés les mieux gérés et détenant les meilleures notes de crédit. Le Canada est du nombre et reste encore aujourd'hui un des rares à détenir la meilleure note accordée par Moody's (Aaa), Standard & Poor's (AAA) et Fitch Rating (AAA), avec perspective stable. Ce n'est plus vrai des États-Unis, ni de la France, ni de l'Autriche, par exemple.

Pour dégeler le crédit aux banques et stimuler la reprise en leur permettant d'effectuer des prêts, Ottawa lance alors le Programme d'achat de prêts hypothécaires assurés (PAPHA).

Le PAPHA consiste à acheter des blocs de prêts hypothécaires détenus par les banques afin de leur fournir des liquidités pour faire d'autres prêts.

Le risque pour le contribuable est nul: ces prêts étant déjà garantis par la Société canadienne d'hypothèques et de logement.

Ottawa en acquiert pour 69 milliards pour une durée maximale de cinq ans.

Pour financer ces achats, il émet des obligations qu'il peut vendre cher.

Une obligation est jugée chère par l'acheteur quand son coupon (ou rendement facial) est peu élevé. Pour l'émetteur, le gouvernement du Canada en l'occurrence, c'est une aubaine: ses coûts d'emprunt étant moins élevés que les intérêts que rapportent les prêts hypothécaires.

En fait, Ottawa évalue aujourd'hui à quelque 2,5 milliards les revenus nets de cette opération de stimulus économique.

De ces émissions obligataires totalisant 69 milliards, 41,3 milliards viennent à échéance cette année. Ces emprunts ne seront pas refinancés.

La dette diminue donc.

D'ailleurs, la valeur des émissions obligataires s'élèvera à 87 milliards cette année, soit sept de moins que l'an dernier. Cela peut aussi s'expliquer par moins d'obligations qui arrivent à échéance cette année.

En revanche, la baisse de 181 à 149 milliards de l'encours des bons du Trésor est plus liée à l'échéance de la portion de 41,3 milliards du PAPHA qui prendra fin l'an prochain avec l'arrivée à terme d'une ultime tranche de 10,6 milliards.

Dernière remarque enfin, les documents budgétaires nous apprennent qu'Ottawa étudie la possibilité de lancer des obligations venant à échéance dans 40 ans afin de profiter au maximum de ses coûts d'emprunt actuels exceptionnellement faibles.