L'économie canadienne a pris une étonnante pause en août, affichant son premier déclin depuis février et dressant la table pour son pire trimestre d'activité en plus d'un an.

Le produit intérieur brut (PIB) réel s'est contracté de 0,1 pour cent pendant ce mois, ce qui est attribuable tant à des facteurs temporaires qu'à d'autres plus fondamentaux. Les analystes misaient plutôt sur une croissance relativement saine de 0,2 pour cent.

Le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, a estimé qu'il valait ne pas trop s'en faire avec ce recul d'un mois, affirmant que l'économie continuait de croître malgré tout.

«Ce n'est qu'un mois», a-t-il indiqué aux journalistes alors qu'il se rendait à un caucus du Parti conservateur. «Il y a certainement une faiblesse en Europe et la reprise américaine est lente. Nous allons observer des variations de mois en mois, mais dans l'ensemble, pour l'année, nous sommes sur la bonne voie en ce qui a trait à la croissance du PIB.»

Étant donné que 10 des 18 secteurs industriels étudiés par Statistique Canada ont connu des reculs - incluant certains des plus importants, comme ceux de la fabrication, de la construction et de l'extraction minière, pétrolière et gazière -, «ceci n'est pas un hasard», a observé l'économiste Doug Porter, de la Banque de Montréal.

«Même si des facteurs temporaires ont pesé sur l'activité du mois d'août, le principal message est que l'économie a de la difficulté à engendrer quelque croissance que ce soit.»

Recul attendu par la Banque du Canada

Malgré les attentes des économistes du secteur privé, la Banque du Canada avait prédit, en quelque sorte, cette faiblesse la semaine dernière en réduisant ses perspectives de croissance pour le troisième trimestre au niveau anémique d'un pour cent. Elle avait alors attribué ce faux pas aux fermetures temporaires dans le secteur des ressources naturelles.

Mais la banque centrale devra se considérer chanceuse si ses prévisions finissent par s'avérer, a nuancé l'économiste de la Banque Scotia Derek Holt, puisque la croissance du trimestre, qui a pris fin en septembre, est maintenant en voie de s'établir à 0,5 pour cent. Et selon lui, les facteurs temporaires n'expliquent pas tout.

«L'élément le plus dérangeant dans ce rapport est la profondeur du déclin dans un si grand nombre de secteurs différents», a-t-il noté.

«À mon avis, cela s'inscrit dans un portrait plus large qui verra la Banque du Canada réduire encore davantage ses prévisions dans son rapport sur la politique monétaire de janvier, d'une façon qui éliminera toute éventualité de hausse des taux d'intérêt dans un avenir rapproché. Nous avons besoin d'une politique monétaire relativement souple dans ce genre d'environnement.»

Lors d'un témoignage devant le comité des finances des Communes, mardi, le gouverneur de la banque centrale, Mark Carney, a indiqué croire que de modestes hausses des taux d'intérêt seraient nécessaires d'ici 2015, ce qui laisse présager que le taux directeur pourrait rester à son niveau actuel d'un pour cent au moins jusqu'à un certain moment en 2014.

Selon les prévisions de M. Carney, l'économie pourrait commencer à prendre de la vitesse au quatrième trimestre, qui a débuté en octobre.

Des analystes jugent un tel scénario probable, mais se demandent si le rebond sera aussi important que celui prévu par la banque centrale, soit 2,5 pour cent.

Pas de grand gagnant parmi les secteurs

Parmi les secteurs étudiés, aucun gagnant clair ne s'est démarqué en août. Les secteurs d'activité qui ont progressé n'ont affiché que des gains timides.

En contrepartie, certaines pertes ont été assez marquées, notamment le plongeon de 6,6 pour cent réalisé par le groupe des agents et courtiers en immobilier. Cette chute laisse croire que les changements sur les règles hypothécaires mis en place en juillet par Ottawa ont produit un effet notable dans le marché de la revente de logements.

Dans l'ensemble, les industries productrices de biens ont vu leur activité réduite de 0,5 pour cent en août, après avoir connu une progression de 0,2 pour cent en juillet.

L'extraction minière, pétrolière et gazière a retraité de 0,7 pour cent. Le sous-secteur minier a cédé à lui seul 2,8 pour cent.

Le groupe du pétrole et du gaz naturel a rendu 0,4 pour cent, victime d'une baisse de production de pétrole brut qui a surpassé l'augmentation de l'activité d'extraction de gaz naturel. La tenue d'opérations de maintenance dans les champs pétroliers a réduit la production en août.

Le secteur de la fabrication a reculé de 0,6 pour cent, après avoir grimpé de 0,9 pour cent en juillet. La production de biens durables a chuté de 1,3 pour cent en août, essentiellement en raison des baisses dans les industries des produits métalliques ouvrés, des meubles et des produits connexes, des produits métalliques de première transformation, de même que dans la fabrication de matériel, d'appareils et de composants électriques. Par ailleurs, la production des fabricants de machines a augmenté.

L'activité des fabricants de biens non durables a progressé de 0,3 pour cent grâce à des hausses dans la production de papier, de produits du pétrole et du charbon et des produits du tabac.

Le groupe de la construction a glissé de 0,1 pour cent, mais des analystes ont noté que l'impact des règles hypothécaires plus sévères pourrait se faire sentir bientôt dans les chiffres sur la construction de nouvelles maisons.

Le commerce de gros a avancé d'un pour cent en août grâce aux hausses appréciables des produits alimentaires, de machines matériel et fournitures, de matériaux de construction, de produits pétroliers et de produits agricoles.

Le secteur du commerce de détail a laissé 0,5 pour cent en août, après avoir avancé de 0,4 pour cent en juillet. Des diminutions ont été enregistrées chez les marchands de véhicules automobiles et de leurs pièces, dans les magasins de produits de santé et de soins personnels, dans les magasins d'alimentation et chez les marchands de matériaux de construction et de matériel et fournitures de jardinage. Les ventes ont cependant augmenté chez les détaillants de fournitures de tout genre ainsi que dans les magasins d'articles de sports, de loisirs, de musique et de livres.

Le secteur des services publics a retraité de 0,8 pour cent en août, après quatre mois de hausses consécutives.