Quelques choix s'offrent au Canada si celui-ci décide de se lancer dans une séance de magasinage pour remplacer ses chasseurs CF-18 vieillissants.

Le problème, c'est que le chasseur qui présente le meilleur rapport qualité-prix, le F-16, est produit par Lockheed Martin, qui fabrique également le F-35, le Joint Strike Fighter, un appareil plus avancé et bien plus coûteux, mais qui soulève une vive polémique à Ottawa.

«L'ironie, c'est que Lockheed Martin a tout avantage à ne pas faire la promotion du F-16», lance Richard Aboulafia, de la firme de consultation américaine The Teal Group.

Il fait observer que Lockheed Martin vient tout juste de livrer son 4500e appareil F-16.

«C'est un produit de masse, c'est un excellent appareil, affirme M. Aboulafia. Le problème, c'est que sa conception date des années 70 et qu'à un moment donné, il n'y aura plus de mise à niveau des équipements. Les forces américaines vont graduellement retirer ses appareils et le Canada perdra des occasions en fait de logistique et de mise à niveau.»

M. Aboulafia croit toutefois que le F-16 sera pleinement opérationnel pendant les 30 prochaines années. Le modèle de base coûte autour de 45 millions de dollars.

Dans la catégorie des appareils pas trop dispendieux, on trouve le Gripen de la société suédoise Saab, qui se détaille quand même autour de 60 millions US.

«L'ennui, c'est que le niveau de production n'est pas très élevé, déclare M. Aboulafia. C'est ce qui explique le prix relativement élevé pour cette catégorie.»

Le Gripen est un «chasseur minimaliste», selon l'analyste. Toutefois, on a étendu son rayon d'action et augmenté sa capacité de chargement dans sa version la plus récente. En outre, l'appareil scandinave est bien adapté pour les régions nordiques du Canada.

Deux autres appareils européens qui pourraient intéresser le Canada sont cependant beaucoup plus dispendieux. Plusieurs pays se sont montrés intéressés au chasseur français Rafale, pour finalement se défiler devant un prix qui voisine les 100 millions de dollars par appareil. L'Eurofighter Typhoon d'EADS, est tout aussi cher.

«Les prix de ces appareils sont similaires à celui du F-35, mais sans les raisons stratégiques qui rendent le Joint Strike Fighter intéressant, affirme M. Aboulafia. La possibilité d'offrir de la formation et des activités communes avec les États-Unis constitue un énorme avantage pour le Canada.»

Il pointe un autre appareil qui pourrait intéresser le Canada, soit le F-18/F Super Hornet de Boeing, le successeur du vieux F-18 Hornet qu'exploite la Défense nationale canadienne. À 60 millions US, il est moins cher que le F-35, mais plus que le F-16.

«Il a plusieurs points communs avec le CF-18 canadien, affirme M. Aboulafia. La Marine américaine l'achète encore et il sera toujours utilisé dans 30 ans.»

L'analyste affirme que le choix dépend avant tout des besoins du Canada. Les caractéristiques perfectionnées du F-35, comme la furtivité, peuvent se révéler nécessaires.

«Si on parle de coalition pour mener des guerres comme en 1991, il est très sensé de regarder du côté du F-35, explique-t-il. Mais si on parle d'opérations de maintien de la paix, de protection de la souveraineté et d'interception de quelques avions russes désuets, probablement pas.»

Par contre, si le Canada pense que la Russie risque de redevenir une menace et que les ressources de l'Arctique risquent de provoquer des conflits, le F-35 peut se révéler essentiel.

«Personnellement, je crois à cette menace, mais le Canada peut décider de choisir une façon plus diplomatique de régler le problème.»

M. Aboulafia rappelle qu'à l'origine, le F-35 devait répondre à tous les besoins à un prix raisonnable. Or, les coûts de développement n'ont cessé d'augmenter et personne ne sait maintenant ce que coûtera le Joint Strike Fighter. Lockheed Martin a parlé de 70 à 80 millions US par appareil lorsque la production sera à son sommet, mais pour l'instant, on parle plutôt de 110 à 120 millions US par appareil.