Le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, s'est dit prêt, vendredi, à intervenir si la situation économique se détériore, mais il a rejeté les demandes des partis de l'opposition, qui réclament la mise en place d'un plan détaillé à cet effet.

«Si nous devions voir la situation se détériorer gravement à l'échelle mondiale, nous ferions évidemment ce qu'il faut pour protéger nos emplois, notre économie et nos familles au Canada», a déclaré M. Flaherty devant le comité des finances de la Chambre des communes.

«Nous agirions de façon pragmatique comme nous l'avons déjà fait avec succès», a-t-il ajouté.

Le ministre a reconnu que l'incertitude économique mondiale, qui s'est traduite récemment par une forte chute des Bourses, allait avoir un impact sur l'économie canadienne.

«Alors que le Canada a connu une croissance meilleure que prévu au premier trimestre, on s'attend à ce que le deuxième trimestre soit plus faible», a-t-il noté.

Pour l'instant, toutefois, le ralentissement de l'économie n'a pas trop affecté les rentrées fiscales d'Ottawa. Les projections établies dans le budget du printemps tiennent «probablement» encore la route, a indiqué Jim Flaherty. On en saura plus lors de la mise à jour de l'automne.

Invité par la députée néo-démocrate Peggy Nash à instaurer des mesures pour combattre le chômage, M. Flaherty est resté coi. Selon lui, ce n'est pas le moment d'augmenter les dépenses, mais plutôt de réduire le déficit.

«Il est important de trouver le juste équilibre», a insisté le ministre, en accusant la gauche de vouloir faire exploser les dépenses gouvernementales et la droite de prôner des compressions «draconiennes».

À ce moment-ci, «la consolidation fiscale et les restrictions budgétaires s'imposent», a-t-il martelé.

Le député libéral Scott Brison a déploré l'attitude du ministre, rappelant que le gouvernement de Stephen Harper avait été lent à réagir à la crise financière de 2008.

Jim Flaherty a maintenu que la stratégie mise en place dans le dernier budget est encore la bonne et qu'aucune mesure additionnelle n'est requise à court terme. Le gouvernement continue de tabler sur un retour à l'équilibre budgétaire dès 2014.

Le grand argentier du pays a refusé d'envisager de nouveaux investissements dans les infrastructures, malgré les besoins criants, notamment au Québec.

«Nous avons effectué des dépenses majeures en matière d'infrastructures, a-t-il déclaré. C'est pourquoi nous avons un déficit de plus de 30 milliards $ à l'heure actuelle. Nous devons revenir à l'équilibre budgétaire. Si nous ne le faisons pas, nous allons suivre le chemin emprunté par certains pays européens et, dans une moindre mesure, par les États-Unis.»

Depuis plusieurs semaines, la crise de la dette qui afflige les pays européens ainsi que les craintes entourant une nouvelle récession aux États-Unis préoccupent les investisseurs à travers le monde.

Carney modérément optimiste

Comparaissant également devant les députés vendredi, le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, a prévenu que « l'assainissement du bilan des banques, des ménages et des pays» prendrait des années.

Le banquier a admis que les compressions budgétaires prévues en Europe et aux États-Unis ainsi que l'appauvrissement des ménages allaient peser sur la croissance du Canada d'ici la fin de l'année et jusqu'en 2012.

Selon lui, l'économie mondiale et celle des États-Unis devraient toutefois continuer à croître pendant cette période.

À l'instar du ministre des Finances, il a affirmé que le Canada est en bonne posture pour traverser la zone de turbulences actuelle sans trop de dégâts.

«Les défis qui se présentent dans le contexte économique mondial actuel sont importants, mais les occasions qui s'offrent au Canada le sont tout autant», a-t-il souligné.

«La situation financière de nos entreprises et de nos administrations publiques est saine, nos institutions financières comptent parmi les plus résilientes du globe, et notre économie peut être adaptée aux sources futures de croissance mondiale», a-t-il fait valoir.

Pour tirer son épingle du jeu, le secteur privé devra toutefois prendre le relais du gouvernement et des consommateurs comme pilier de la croissance, puisque les mesures de relance annoncées en 2008 viendront bientôt à échéance.

Habile, Mark Carney a refusé de prendre position sur l'opportunité de prolonger certaines modalités du plan ou d'investir dans les infrastructures pour créer des emplois.

Il a plutôt répété qu'il était «essentiel» que les entreprises continuent à investir dans leur productivité et qu'elles multiplient les efforts pour diversifier leurs marchés.

La Banque du Canada estime que les mesures de relance gouvernementales ont alimenté environ le tiers de la croissance économique récente.

Les économistes s'attendent désormais à ce que la banque centrale maintienne son taux directeur à un pour cent jusqu'à l'année prochaine. M. Carney n'a rien dit, vendredi, pour les contredire.