Respirez par le nez, c'est la faute du tsunami et ça ne durera pas longtemps. C'est le message qu'ont envoyé les économistes jeudi, quand on a appris que l'économie canadienne n'a pas progressé d'une miette en avril.

Même si Statistique Canada nous annonçait la veille que l'inflation a atteint un sommet en huit ans au pays, ceux qui font des cauchemars dans lesquels clignote en grosses lettres le mot «stagflation» (de l'inflation sans croissance économique comme dans les années 1970) doivent se préparer une bonne tisane.

Rebond en vue

«On n'en est pas là du tout. On parle davantage d'un passage à vide temporaire de l'économie canadienne. De notre côté, on table sur un rebond dès le troisième trimestre», dit Matthieu Arseneau, économiste à la Banque Nationale.

Cette brève séance de surplace du PIB canadien en avril, si elle n'a rien pour sabrer le champagne, n'est pas surprenante non plus. Les économistes avaient même prédit légèrement pire, tablant sur un minuscule recul de 0,1%.

Francis Généreux, économiste au Mouvement Desjardins, note que des 19 secteurs analysés par Statistique Canada, seuls cinq d'entre eux ont en fait connu un recul en avril. Le pire est de loin la fabrication de véhicules automobiles, qui a plongé de 6,9%.

Toyota

Pour comprendre pourquoi, il suffit de passer un coup de fil chez Toyota Motor Manufacturing Canada, qui fabrique des Corolla, des Matrix, des RAV4 et des Lexus dans ses deux usines de Cambridge et Woodstock, en Ontario.

Or, en avril, c'était bien tranquille là-bas.

«Notre production est tombée à environ 30% de sa capacité normale», explique Greig Mordue, porte-parole de l'entreprise.

Le coupable: le tsunami qui a balayé le Japon le 11 mars, compromettant l'approvisionnement en pièces japonaises des usines canadiennes.

«Ce dont on manquait surtout, ce sont des pièces de caoutchouc et des unités de contrôle électronique», dit M. Mordue.

La situation a touché d'autres constructeurs automobiles canadiens, plombant du même coup le commerce de gros, qui a reculé de 0,5% en avril.

Encore les ressources

Ces reculs ont annulé les croissances observées dans d'autres secteurs. L'extraction minière, par exemple, a gagné 1% en avril.

«On est dans un cycle de ressources naturelles, c'est la croissance mondiale», commente l'économiste Matthieu Arseneau.

Après avoir reculé en mars, le commerce de détail a aussi repris du poil de la bête, progressant de 0,5% en avril. Les Canadiens ont acheté autant des meubles et des accessoires de maison que des voitures et des vêtements.

Tous les économistes interrogés par La Presse Affaires s'attendent à une amélioration rapide des statistiques. Sébastien Lavoie, à la Banque Laurentienne, croit qu'on terminera le deuxième trimestre avec une croissance de 1,5%, et que celle-ci grimpera à 2,5% au troisième trimestre.

L'effet du tsunami, en tout cas, s'estompe. Chez Toyota, la production de Corolla est déjà revenue à la normale et on construit des Lexus à 60% du rythme habituel. Seule la production de RAV4 reste encore problématique, à 25% de sa capacité. L'entreprise prévoit que tout sera complètement rentré dans l'ordre en septembre.

«Nous allons voir une amélioration générale des conditions économiques, dit l'économiste Sébastien Lavoie. L'inflation sera plus modérée, la croissance plus forte et le chômage plus faible.»