Le débat sur le projet fédéral de commission nationale de valeurs mobilières se déplace maintenant en Cour suprême, après avoir été entendu en Cour d'appel du Québec et de l'Alberta au cours des derniers jours.

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L'audition devant le plus haut tribunal du pays est prévue pour le 12 avril prochain. Mais, d'ici là, les préparatifs vont bon train avec le dépôt de mémoire par les divers intervenants politiques et financiers qui ont été autorisés par la cour.

La prochaine échéance d'importance surviendra dans deux semaines, le 11 février, la date limite fixée par la Cour suprême pour la réception des mémoires.

C'est à ce moment que l'on saura entre autres si d'autres provinces se joignent au Québec et à l'Alberta dans leur opposition au projet fédéral, pour des motifs économiques et constitutionnels. Car depuis quelques semaines, au moins quatre provinces ont exprimé publiquement des doutes sur le projet fédéral, dont la Colombie-Britannique que l'on croyait favorable.

Si ces quatre provinces se rallient au Québec et à l'Alberta en Cour suprême, l'Ontario demeurerait la seule province d'importance en appui au projet fédéral.

De l'avis de juristes, la position des provinces est importante dans ce débat parce que les récentes auditions en Cour d'appel au Québec et en Alberta ont été dominées par des questions de droit constitutionnel, plutôt que les arguments de nature financière et boursière.

«Ce débat sur une commission nationale de valeurs mobilières est devenu l'un des plus importants cas de droit constitutionnel au Canada depuis une trentaine d'années, au-delà des considérations économiques», explique un avocat montréalais proche du dossier.

«Avec son projet de commission nationale, le fédéral cherche à accaparer une juridiction consentie aux provinces dans la Constitution de 1867 sous prétexte que ce secteur a complètement changé depuis cette époque. Si la justice va dans ce sens, ça créerait tout un précédent en faveur du fédéral à l'égard de nombreux autres domaines de juridiction provinciale.»

C'est d'ailleurs l'essentiel des arguments que le Barreau du Québec a déposés en Cour d'appel du Québec, en opposition au projet fédéral.

Dans leur requête devant leur Cour d'appel respective, faut-il rappeler, le Québec et l'Alberta demandent si le projet de loi fédérale sur les valeurs mobilières «excède la compétence législative du parlement du Canada» selon la Constitution de 1867.

Pour le Barreau du Québec, la réponse est carrément oui. La proposition fédérale contient des éléments «inconstitutionnels» et elle «équivaut à une modification de la Constitution», lit-on dans le mémoire du Barreau, qui fut l'un des rares intervenants non gouvernementaux en Cour d'appel.

La réplique comparable est venue de l'Association des banquiers canadiens (ABC), qui est le principal allié non gouvernemental du fédéral dans toute cette affaire.

Devant la Cour d'appel du Québec, l'ABC a prétendu que la Constitution canadienne doit être interprétée de façon «évolutive» selon les «réalités changeantes de la société».

Par conséquent, selon l'ABC, en demandant le rejet du projet fédéral de commission nationale, le Québec et de l'Alberta demandent aussi à la Cour d'appel «d'ignorer la mondialisation des marchés des capitaux».

Après trois jours d'audience, la semaine dernière, la décision du groupe de cinq juges de la Cour d'appel du Québec est attendue dans quelques semaines. Et de préférence avant l'audience de la mi-avril en Cour suprême, espère-t-on au gouvernement du Québec.

Car, devant le plus haut tribunal du pays, le fédéral se présente appuyé d'un bon contingent d'intervenants financiers et boursiers, dont l'Association canadienne du commerce des valeurs mobilières.

On y trouve aussi l'important investisseur Teachers', ainsi que la Fondation canadienne pour l'avancement du droit des actionnaires (FAIR).