Le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, a lancé lundi une mise en garde à l'intention des Canadiens, des entreprises et des gouvernements, affirmant que la crise économique est loin d'être terminée et leur demandant de contrôler leur appétit pour l'argent à faible coût.

À l'occasion d'un discours prononcé devant l'Economic Club du Canada, M. Carney a indiqué que la reprise mondiale était si faible que les grandes économies avancées pourraient devoir maintenir leurs taux d'intérêt à des niveaux très peu élevés pendant une longue période de temps, et que les États-Unis pourraient de nouveau être contraints d'imprimer de l'argent.

«Des conditions de financement bon marché ne représentent pas une stratégie de croissance à long terme», a cependant affirmé M. Carney.

«L'expérience donne à penser que des périodes prolongées de taux inhabituellement bas peuvent embrouiller l'évaluation des risques financiers, provoquer une quête de rendement et retarder les ajustements des bilans», a-t-il ajouté.

M. Carney a par ailleurs observé avec inquiétude que le crédit aux ménages avait crû d'environ sept pour au pays depuis que la récession a touché son creux, alors qu'il a chuté de 3,5 pour cent aux États-Unis, ce qui laisse peut-être entendre que les Canadiens croient que le répit offert par les faibles taux d'intérêt sera permanent.

L'heure des comptes pourrait être brutale, a prévenu le gouverneur. La Banque du Canada va établir ses taux d'intérêt en fonction de l'inflation, et non pas de la dette contractée par les Canadiens, a-t-il dit. En fait, l'institution pourrait intervenir afin de décourager tout comportement jugé risqué.

«Même si la barre est haute quand il s'agit d'apporter de nouveaux changements au cadre de conduite de la politique monétaire, il incombe à la banque de tirer les leçons appropriées de l'expérience d'autres pays qui, dans un environnement caractérisé par la stabilité des prix, ont été plongés dans un désastre financier», a-t-il indiqué.

Dans son discours, M. Carney n'a fait aucune prévision quant aux économies du Canada et d'ailleurs dans le monde - il garde ses cartouches en vue de la prochaine annonce du taux directeur de la banque centrale, le 18 janvier - mais il est évident que le gouverneur est préoccupé par ce qu'il observe en ce moment en Europe et aux États-Unis.

À deux reprises, il a brandit le spectre de la décennie perdue au Japon et même de la Crise de 1929, laissant entendre que les problèmes actuels sont de nature très sérieuse.

«La turbulence que traverse l'Europe en ce moment nous rappelle que la crise n'est pas terminée, mais qu'elle vient simplement d'entrer dans une nouvelle phase, a-t-il dit. Dans un monde submergé par les dettes, l'assainissement du bilan des banques, des ménages et des pays exigera des années. Par conséquent, le rythme, le profil et la variabilité de la croissance à l'échelle du globe se modifient, et le Canada doit s'adapter.»