Les libéraux fédéraux amorceront l'année 2011 aux prises avec une programme électoral amputé d'environ 1,8 milliard $. Les entreprises canadiennes accueilleront l'arrivée de la nouvelle année, puisque celle-ci leur permettra de bénéficier de réductions d'impôt de l'ordre de 1,5 pour cent.

Ce manque à gagner est tributaire des économies réalisées par les sociétés. Et il représente un défi de taille pour les stratèges libéraux, qui tentent de déterminer où et comment ils pourraient dégager les fonds nécessaires à la réalisation de promesses faites par Michael Ignatieff, notamment celles d'investir dans les services à la petite enfance et les services de soins à domicile.

«C'est un problème difficile à gérer», a confié une source libérale.

Car aucune des options n'est particulièrement intéressante. Entre resserrer les engagements déjà coûteux de Michael Ignatieff, promettre de revenir sur la proposition de baisser les impôts des entreprises, réduire les dépenses ou augmenter les impôts ailleurs, le choix est ardu.

Aucune décision n'a encore été prise, mais des sources proches des libéraux ont laissé entendre que le chef libéral choisirait probablement de revenir sur la proposition de baisser les impôts des entreprises. Évidemment, cela fournirait des munitions aux conservateurs, qui allèguent qu'un gouvernement libéral qui «taxe et qui dépense» reverrait sans doute les impôts à la hausse.

Michael Ignatieff avait cherché à éviter de faire face à de telles critiques au mois de mars alors qu'il avait annoncé qu'un gouvernement dirigé par les libéraux imposerait un gel des impôts corporatifs au taux actuel, qui est de 18 pour cent. Ce faisant, il choisissait de retarder le projet libéral visant à réduire les impôts des entreprises à 16,5 pour cent en 2011, puis en 15 pour cent l'année suivante.

Les libéraux avaient évalué que le gel permettrait d'économiser annuellement entre cinq et six milliards $. Michael Ignatieff avait par ailleurs promis d'utiliser cet argent pour éponger le déficit record de 54 milliards $ qu'affiche le Canada. Simultanément, il investirait dans des mesures visant à permettre au pays de faire face au vieillissement de la population, la réduction du nombre de travailleurs et les coûts de santé qui montent en flèche.

La réplique des conservateurs n'avait pas tardé. À l'étiquette de chef qui «taxe et qui dépense» qui colle déjà à la peau de Michael Ignatieff s'était ajoutée celle du leader qui veut augmenter «des taxes corporatives qui tuent des emplois».

À ce moment, les libéraux s'étaient contentés de répliquer qu'ils refuseraient tout simplement de réduire davantage les taux d'imposition.

Mais après le 1er janvier, le chef libéral n'aura pas seulement à reporter des hausses d'imposition futures: il devra décider s'il souhaite s'opposer aux mesures qui entreront en vigueur pour l'année 2011 - des réductions qui, selon le ministère des Finances, se chiffrent à environ 1,8 milliard $.

«C'est là-dessus que nous nous penchons en ce moment», a confié une source libérale.

À n'en pas douter, les stratèges conservateurs se questionnent présentement à savoir si les libéraux ne cherchent tout simplement pas à trouver un prétexte pour défaire le gouvernement minoritaire de Stephen Harper avant le début de la nouvelle année. Essentiellement, croient-ils, parce qu'ils souhaitent éviter d'avoir à régler l'épineux dossier.

Pour certains libéraux, cela permettrait à Michael Ignatieff de se positionner comme étant le chef le plus apte à comprendre et à défendre les priorités des familles de la classe moyenne.