Le ministre des Finances Jim Flaherty évoque des scénarios catastrophiques si le Parti libéral prend le pouvoir aux prochaines élections en formant une coalition avec le NPD et le soutien du Bloc québécois.

Une telle coalition augmenterait les taxes et les impôts, mettrait en péril la fragile reprise économique et pourrait même faire disparaître 400 000 emplois, soit le même nombre d'emplois perdus durant la récession économique mondiale, selon le ministre dans une rare sortie à saveur électorale.

Dans un discours devant le Canadian Club d'Ottawa, hier, M. Flaherty a affirmé que les conservateurs ne veulent pas d'élections cet automne. L'économie doit être la priorité de tous les élus à la Chambre des communes.

Mais il a ajouté du même souffle qu'il y aura des élections tôt ou tard et que les choix qui se présenteront aux Canadiens seront «un gouvernement majoritaire stable» dirigé par Stephen Harper ou encore «une coalition dangereuse de Michael Ignatieff avec le NDP et le Bloc québécois».

«La coalition dirigée par Michael Ignatieff a son agenda ­ le pouvoir, le pouvoir, le pouvoir. (...) Toute coalition qui donnerait au NPD un accès aux portefeuilles des contribuables devrait inquiéter les Canadiens ordinaires. Et toute coalition qui donnerait un veto sur les politiques nationales à un parti qui veut détruire notre pays est inacceptable», a affirmé le ministre au gratin du monde des affaires.

«Les Canadiens sont fatigués de l'instabilité politique. Ils sont fatigués des élections aux deux ans. Et ils savent qu'il nous faut un gouvernement stable afin d'assurer la reprise économique et la croissance à long terme», a ajouté M. Flaherty.

Selon le ministre, les politiques économiques du gouvernement commencent à porter fruits, faisant du Canada l'envie des pays industrialisés. L'économie canadienne a créé 430 000 emplois depuis la fin de la récession, le secteur bancaire est solide, le fardeau des entreprises est le plus avantageux des pays du G7,  l'endettement du Canada demeure le plus faible des pays industrialisés et le gouvernement fédéral planche pour éliminer le déficit d'ici 2014.

Mais selon lui, «une élection inutile risquerait de tout compromettre», surtout si la coalition qu'il évoque prend le pouvoir. «Rien ne serait épargné au pays sous un gouvernement Ignatieff appuyé par le NPD et le Bloc québécois. Aucun secteur de notre économie ne serait à l'abri. Aucun contribuable ne serait épargné», a-t-il dit.

Le ministre a brandi la menace d'une coalition alors que M. Ignatieff a déjà écarté cette option au cours des derniers mois. Le chef libéral a aussi affirmé qu'un gouvernement libéral n'augmenterait pas à nouveau la TPS ou les impôts des contribuables. Toutefois, il s'est dit opposé à la nouvelle ronde de baisses d'impôts des entreprises qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2011 compte tenu que le déficit frise encore les 45 milliards de dollars. 

Les conservateurs tentent de rappeler aux Canadiens la coalition créée par le Parti libéral et le NPD et appuyée par le Bloc québécois en décembre 2008. Cette coalition était venue à un cheveu de renverser les élections, quelques semaines après les élections fédérales. Cette coalition était fort impopulaire à l'extérieur du Québec. Fait intéressant, le chef de cabinet de Stephen Harper, Guy Giorno, s'était déplacé pour venir entendre le discours de M. Flaherty. 

Les partis de l'opposition ont réagi avec colère aux attaques de M.Flaherty. Le critique libéral en matière de finances, Scott Brison, a affirmé que ces propos étaient indignes d'un ministre des Finances. Il a aussi mis en doute la sincérité des conservateurs qui disent vouloir faire fonctionner le Parlement au lieu de provoquer des élections.

«Ce n'était pas un discours digne d'un ministre de la Couronne. C'était une tirade partisane qui s'attaquait à ses adversaires politiques au lieu de présenter des idées pour l'avenir. (...) Tout cela était choquant et tout à fait inapproprié. Il n'y a personne qui parle de tenir des élections maintenant sauf Jim Flaherty et Stephen Harper», a dit M. Brison qui était présent lors du discours du ministre.

Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a invité le ministre à cesser de jouer au «guignol» et de régler les différends qui existent entre Québec et Ottawa, notamment le contentieux concernant la compensation au Québec pour avoir harmonisé la TVQ et la TPS dans les années 1990.

Le député du NPD Thomas Mulcair a ajouté : «La partisannerie crasse, c'est la marque de commerce du Parti conservateur, en tous lieux et à tous moments.  M. Flaherty n'est pas une exception.»