La caisse de l'assurance emploi accusera un déficit qui frisera les 15 milliards de dollars d'ici trois ans. Les employés et les employeurs seront donc mis à contribution à partir de janvier 2011 pour venir à bout d'ici cinq ans.

Les cotisations des employés pourraient être majorées de près de 50% d'ici 2015. Celles des employeurs pourraient bondir de 40%, selon les estimations de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI).

La décision du gouvernement Harper de geler les cotisations des employés et des employeurs en 2009 et en 2010 ainsi que l'augmentation du taux de chômage expliquent ce déficit. À lui seul, le gel temporaire des cotisations prive la caisse d'au moins 820 millions de dollars par année en revenus. En 2009-2010, Ottawa devrait avoir versé 5,8 milliards de plus que l'année précédente en prestations aux Canadiens qui ont perdu leur emploi à cause de la récession.

En 2009-2010, le déficit du gouvernement fédéral frisera les 56 milliards. De cette somme, 6,2 milliards proviendront du dépassement des coûts du programme de l'assurance emploi.

En 2010-2011, le déficit devrait être ramené à 45,3 milliards grâce à une reprise de l'activité économique. Mais au moins 10 milliards de ce manque à gagner s'expliqueraient par le déficit de la caisse de l'assurance emploi, selon des chiffres obtenus par La Presse hier. La caisse devrait afficher à nouveau un surplus d'environ 2 milliards à partir de 2016.

«On parle beaucoup du déficit du gouvernement fédéral, mais on oublie qu'une partie de ce déficit provient des dépassements de coûts liés à l'assurance emploi. Et on oublie aussi que la caisse de l'assurance emploi sera renflouée par une hausse des cotisations des employés et des employeurs», a affirmé hier Ted Mallitt, économiste à la FCEI.

Éliminer le déficit

Le gouvernement Harper s'est formellement engagé à éliminer le déficit de 56 milliards sans augmenter les impôts ou les taxes et sans réduire les transferts aux provinces. Mais en réalité, une partie de ce déficit sera épongée grâce à une hausse des cotisations de l'assurance-emploi, soutiennent les partis de l'opposition. Le ministre des Finances Jim Flaherty déposera son prochain budget aux Communes jeudi prochain.

Le directeur parlementaire du budget, Kevin Page, est en train de rédiger un rapport sur la viabilité de la caisse de l'assurance emploi. Ce rapport devrait être rendu public d'ici trois semaines.

Le gouvernement Harper a créé une caisse de l'assurance emploi autonome en 2009 qui est gérée par une société d'État, l'Office de financement de l'assurance emploi (OFAE). Cette caisse autonome a été créée afin d'éviter que le gouvernement fédéral pige dans les surplus afin de financer d'autres mesures, comme c'était le cas sous les libéraux de Jean Chrétien. Ces surplus cumulatifs - qui n'existaient que sur papier parce les revenus des cotisations étaient versés dans le fonds consolidé du gouvernement - ont atteint 57 milliards de dollars en 2007.

Le mandat de l'OFAE est de gérer le compte de l'assurance emploi de manière à générer suffisamment de revenus pour couvrir les montants des prestations versées aux chômeurs.

Le gouvernement Harper avait alors versé une somme forfaitaire de 2 milliards à cette société d'État pour lui permettre de surmonter les contrecoups d'une récession sans avoir à hausser les cotisations de manière substantielle d'une année à l'autre. Or, cette somme ne sera manifestement pas suffisante.

La loi actuelle autorise l'OFAE à augmenter ou à réduire les cotisations d'une somme maximale de 15 cents par année par tranche de 100$ de gain assurable. En 2010, les cotisations sont de 1,73$ par tranche de 100$ de gain assurable (43 200$), pour une contribution totale maximale annuelle de 747$. La contribution des employeurs est de 1,4 fois supérieure à celle des employés (1046$). En 2011, les cotisations des employés devraient donc passer à 1,88 par tranche de 100$.

Pour renflouer la caisse de l'assurance emploi d'ici 2015, les employés risquent donc de voir leurs cotisations augmenter graduellement jusqu'à 350$ environ par année avant d'être diminuées à nouveau. Et les employeurs devront aussi faire leur part.

L'augmentation des coûts de l'assurance emploi risque de mettre en péril quelque 200 000 emplois, selon la FCEI. Selon l'organisation, le gouvernement fédéral devrait autoriser une réduction plus rapide des cotisations une fois la caisse renflouée. En outre, la caisse devrait disposer d'une réserve d'au moins 10 milliards afin pour affronter une récession.