Combien vaut la médaille d'or du skieur acrobatique Alexandre Bilodeau? Pour l'instant, une somme forfaitaire d'au moins 45 000$. Et jusqu'à 200 000$ par année en commandites si la nouvelle coqueluche du sport au pays parvient à bien moyenner la première médaille d'or olympique du Canada remportée à domicile.

Au cours des prochains jours, trois chèques attendent Alexandre Bilodeau. Tout d'abord, le bonus de 20 000$ versé par le Comité olympique canadien aux médaillés d'or à Vancouver. Ensuite, une prime à la performance de 25 000$ de son commanditaire principal, Cascades. Un autre de ses commanditaires, La Cage aux Sports, lui versera aussi une prime. «Si ce n'était pas dans son contrat, on le rajoutera, dit le PDG Jean Bédard. Alexandre a fait le travail et il mérite qu'on le récompense!»

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Et ce n'est qu'un début. Selon le publicitaire Jean Gosselin, Alexandre Bilodeau pourrait se négocier des revenus publicitaires de 200 000$ par année, ce qui approche du seuil maximal pour un athlète olympique au Canada.

«Il y a trois ou quatre athlètes olympiques au Québec qui peuvent demander plus de 75 000$ à un commanditaire et Alexandre Bilodeau fait maintenant partie de ceux-là. Il pourrait demander deux ou trois gros contrats de commandites à 75 000$ chacun. C'est toutefois rare qu'un athlète olympique puisse avoir des commandites de plus de 150 000$ au Québec et 200 000$ au Canada anglais», dit Jean Gosselin, un spécialiste du marketing sportif qui a notamment travaillé avec Alexandre Despatie (plongeon), Sylvie Fréchette (nage synchronisée), Isabelle Charest (patinage de vitesse courte piste) et Jean-Luc Brassard (ski acrobatique).

Alexandre Bilodeau, 22 ans, obtient déjà environ 75 000$ par année de son commanditaire principal, Cascades. Il est aussi commandité par le cabinet comptable KPMG, les restaurants La Cage aux Sports, les lunettes Oakley, la station de ski Mont Saint-Sauveur et les skis Hart. Pour la durée des Jeux olympiques de Vancouver, il est aussi porte-parole de McDonald's.

Ses vêtements de sport sont fournis par Nike, mais le célèbre équipementier ne lui verse aucune somme d'argent. «Nike, ç'a l'air gros comme ça, mais ils ne fournissent pas le jet», blaguait Alexandre Bilodeau en entrevue à La Presse Affaires avant son départ pour Vancouver.

Selon Jean Gosselin, Alexandre Bilodeau a toutes les qualités recherchées par un commanditaire. «Il est jeune, intelligent, affable et il a un entourage exceptionnel, particulièrement son entraîneur Dominick Gauthier», dit-il.

Décisions importantes

La nouvelle coqueluche du sport canadien aura des décisions importantes à prendre au cours des prochains mois. Alexandre Bilodeau renouvellera-t-il ses ententes venant à échéance à la fin de la saison? Vantera-t-il de nouveaux produits? «À chaque commanditaire s'ajoutent des obligations, dit Jean Gosselin. Alexandre Despatie et son père ont décidé il y a longtemps de limiter le nombre de commanditaires d'Alexandre afin qu'il puisse se concentrer sur son sport.»

Le principal commanditaire d'Alexandre Bilodeau, Cascades, est pleinement conscient que la valeur de son champion olympique vient de monter en flèche. «Nous savons qu'il y a de la surenchère pour un champion olympique, mais nous avons un budget de 25 0000$ par année pour neuf athlètes et nous ne pouvons pas faire de surenchère. Nous voulions aider Alexandre à accomplir son rêve olympique et il a réussi. Tant mieux si nous l'avons aidé à aller plus loin en terme de commandites», dit Marie-Ève Chapdeleine, responsable des fonds et commandites chez Cascades.

L'entente entre Cascades et Alexandre Bilodeau prévoit une commandite de base de 25 000$. Les primes à la performance du skieur acrobatique ont atteint 50 000$ la saison dernière. Pour sa qualification olympique, il a reçu un bonus de 5000$. Pour sa médaille d'or, une prime de 25 000$.

Avant de partir pour Vancouver, Alexandre Bilodeau a laissé entendre qu'il voulait continuer son association avec ses commanditaires actuels. «Ça fait très longtemps que je suis avec ces compagnies-là, disait-il à La Presse Affaires. Nous avons été fidèles l'un envers l'autre. Habituellement, ce ne sont pas des grosses négos.»

Le skieur acrobatique laissera le dossier de ses commandites à son agent J.D. Miller et à son père Serge, fiscaliste chez KPMG. «L'important, c'est d'être bien entouré, dit Alexandre Bilodeau. Aucun athlète ne veut négocier ses contrats. Mon père est fiscaliste et il y a aussi mon agent, J.D. Miller. J'ai confiance qu'ils vont obtenir ce que je vaux. Je les laisse s'occuper de ça. Moi, je veux skier.»

Comme autres sources de revenus que ses commandites, Alexandre Bilodeau touche une allocation gouvernementale non imposable de 28 000$ (18 000$ du fédéral, 10 000$ du Québec). Il touche aussi des bourses sur le circuit de la Coupe du monde. L'hiver dernier, ses cinq victoires en Coupe du monde lui ont valu des bourses d'environ 32 980$CAN.

CASCADES NE PEUT FÉLICITER PUBLIQUEMENT BILODEAU

Cascades est le principal commanditaire d'Alexandre Bilodeau, mais l'entreprise québécoise ne pourra pas féliciter publiquement son protégé ni utiliser sa victoire à des fins publicitaires durant les Jeux olympiques de Vancouver. Les règles du Comité olympique canadien sont claires: les commanditaires non autorisés ne peuvent se servir de l'image des olympiens jusqu'au 3 mars prochain. C'est pourquoi le skieur acrobatique n'avait pas son traditionnel logo de Cascades sur son casque lors de l'épreuve des bosses dimanche soir. «Nous avons pris connaissance des règles avant les Jeux et nous avons préféré ne pas payer pour obtenir le droit de s'associer à nos athlètes durant les Jeux», dit Marie-Ève Chapdeleine, de Cascades.

DES DÉPENSES MINIMES

Adolescent, Alexandre Bilodeau pouvait coûter jusqu'à 30 000 $ par saison de ski à ses parents. Depuis qu'il est devenu membre de l'équipe nationale, il y a cinq ans, la plupart de ses dépenses sportives ont été prises en charge par l'Association canadienne de ski acrobatique. Alexandre Bilodeau reçoit aussi le soutien de B2Dix, un organisme privé qui a amassé 3 millions de dollars auprès des gens d'affaires du Canada afin de mieux préparer les athlètes canadiens aux Jeux de Vancouver. B2Dix, qui fournit une aide à 23 olympiens, a été fondé par Dominick Gauthier, l'entraîneur d'Alexandre Bilodeau.

LA FIDUCIE DU CHAMPION

Avoir un papa fiscaliste, c'est pratique quand on est un champion olympique populaire auprès des commanditaires. Quand son fils a commencé à avoir du succès en ski acrobatique, Serge Bilodeau a créé une fiducie à son nom où il dépose toutes ses commandites et ses bourses en Coupe du monde. L'avantage? « La fiducie permet de reporter l'imposition des sommes jusqu'à huit ans après la retraite sportive de l'athlète, dit Serge Bilodeau. Les intérêts générés par ces revenus s'accumulent à l'abri de l'impôt, un peu comme dans un REER.»