Toutes les entreprises canadiennes devront adopter des nouvelles normes d'information financière à partir du 1er janvier 2011. Dès lors, il existera deux ensembles de normes comptables: les normes internationales d'information financière (IFRS), obligatoires pour les sociétés cotées, et les normes pour les entreprises à capital fermé (PCGR pour entreprises à capital fermé).

Les sociétés à capital fermé, quant à elles, auront à décider lequel de ces deux ensembles de normes elles adopteront.

Pour les sociétés canadiennes cotées en Bourse, l'entrée en vigueur des IFRS entraînera des modifications substantielles de l'évaluation et de la présentation de leur information financière avec, notamment, un usage plus répandu de l'évaluation à la juste valeur et des exigences d'informations par voie de notes plus nombreuses. Il est à prévoir que le nombre de pages consacrées aux notes aux états financiers augmentera de 25% à 50%.

De leur côté, les PCGR pour les entreprises à capital fermé, bien que conçues à partir des normes actuellement en vigueur au Canada, proposent des normes «allégées» qui devraient mieux répondre aux besoins particuliers des utilisateurs de l'information financière de ces entreprises. Il est donc à prévoir une diminution importante des informations présentées par voie de notes aux états financiers pouvant atteindre jusqu'à 50% par rapport aux exigences actuelles. L'adoption de ces normes devrait permettre également aux entreprises de réduire le coût de la préparation de leurs états financiers, pour les années qui suivront celles de l'adoption des nouvelles normes.

La question qui se pose pour les sociétés à capital fermé est donc la suivante: puisque j'ai le choix d'adopter les IFRS ou les PCGR qui ont été conçues expressément pour répondre à mes besoins et à ceux de mes utilisateurs, existe-t-il des raisons pour lesquelles je devrais plutôt opter pour les IFRS? La réponse est peut-être oui. Voici des exemples de certaines circonstances qui pourraient faire en sorte qu'il serait préférable pour votre entreprise d'opter pour les IFRS. Vous prévoyez émettre des titres de capitaux propres par la voie d'un premier appel public à l'épargne, vous prévoyez étendre vos activités à l'échelle internationale, vous avez conclu des partenariats importants avec des partenaires étrangers, vous vous livrez à une concurrence pour avoir accès au crédit avec des sociétés dont les actions se transigent à la Bourse, vous planifiez vendre à une société ouverte, vous faites partie d'un groupe qui applique déjà les IFRS, vous prévoyez emprunter à l'étranger, ou encore, vos principaux concurrents sont des sociétés cotées.

Par ailleurs, si votre information financière est relativement simple, que vous avez peu recours à des analyses comparatives, que vous avez un minimum de ressources à consacrer à la formation et à la conformité, si vous préparez principalement votre information financière pour les propriétaires, les prêteurs et les autorités fiscales ou si encore vous optez pour la simplicité, alors le choix des PCGR pour les entreprises à capital fermé s'impose.

Que vous soyez une société cotée ou une société privée, une chose est certaine, l'adoption des nouvelles normes, quelles qu'elles soient, entraînera des changements en ce qui concerne vos états financiers. Certains changements toucheront l'évaluation de certaines informations financières alors que d'autres apporteront des modifications des notes présentées aux états financiers.

Bien que ces changements aient pour objectif de mieux refléter la réalité économique de votre entreprise, ils pourraient avoir des conséquences sur ses mesures de performance et par conséquent sur certains de ses engagements envers ses partenaires. À titre d'exemple, sachez que les deux nouveaux référentiels permettent, au moment de leur première application, de procéder à une nouvelle évaluation de vos immobilisations corporelles et d'utiliser cette nouvelle valeur à titre de coût réputé à cette date. Une telle mesure aura souvent pour effet d'augmenter la somme de vos actifs et de vos capitaux propres, ce qui produira un effet bénéfique sur votre ratio de dette/équité.

Toutefois, cette mesure pourrait également avoir pour effet de réduire les bénéfices ultérieurs puisqu'elle engendrera un accroissement de la charge d'amortissement. Ainsi, si vous accordez une rémunération incitative basée sur le profit, la somme de la prime au rendement pourrait être moins élevée et causer un mécontentement chez les employés. L'adoption de ces changements peut donc vous exposer à un risque de devoir renégocier certains contrats de rémunération incitative des cadres et employés de votre entreprise. Il est à prévoir que tous les contrats exigeant le respect de clauses restrictives basées sur des chiffres aux états financiers devront être revus.

Louise Martel, FCA, professeure titulaire, HEC Montréal

louise.martel@hec.ca