Des entreprises québécoises sont parvenues, malgré la crise économique, à mobiliser leurs troupes et les amener à se dépasser. Quels sont les secrets de ces championnes des ressources humaines? Quatre d'entre elles nous en dévoilent quelques bribes.

JTI-MACDONALD

Quatre générations de Bisaillon

Stéphane Champagne, collaboration spéciale

Le cigarettier JTI-MacDonald, en septième position sur le palmarès des 50 employeurs de choix au Canada, doit, de toute évidence, être un très bon employeur. Car Robert Bisaillon y représente la quatrième génération de travailleurs issus d'une même famille. Avant lui, son père, son grand-père et son arrière-grand-tante ont bossé pour celle qui est aujourd'hui la division tabac internationale de Japan Tobacco Inc. et le troisième fabricant de tabac au monde.

JTI-MacDonald en est à sa 10e participation à ce concours où les meilleurs employeurs au pays se font la lutte. Et en 10 tentatives, elle s'est classée 9 fois parmi les 50 meilleurs, avec un score qui a fluctué de la 18e (en 2005) à la 6e position (en 2008).

Le taux de mobilisation chez JTI-MacDonald atteint 86%, ce qui dépasse la moyenne générale de 80%.

Les fabricants de cigarettes n'ont pas bonne presse depuis une vingtaine d'années. En dépit de cela, JTI-MacDonald arrive à recruter d'excellents travailleurs, à les mobiliser et surtout, à les garder. Bref, l'entreprise prend un soin jaloux de ses troupes, lesquelles le lui rendent bien. Le taux de rétention de l'entreprise serait de 99%.

«C'est vraiment un outil qui sert à prendre le pouls de nos gens. (...) Si je suis resté ici depuis aussi longtemps, c'est parce qu'on peut se réaliser et que nous sommes une grande famille. À Montréal, tout le monde se connaît par son prénom» explique Robert Bisaillon, vice-président pour les Amériques et le Royaume-Uni.

Il existe plusieurs exemples qui font que les employés de JTI-MacDonald ont envie de demeurer au sein de l'entreprise, de s'y dépasser et d'en parler en bien à leur entourage. Au-delà des conditions salariales et des avantages sociaux, l'entreprise compte une infirmière à temps plein et un médecin à temps partiel. Ces deux professionnels de la santé peuvent être consultés par tous les employés sans exception, peu importe la raison.

JTI-MacDonald a été fondé en 1858 à Montréal et compte près de 500 employés au Canada, dont près de 300 à Montréal, où se trouve la seule usine du groupe pour les Amériques. Winston, Camel, Benson & Hedges et autres Export A font partie des marques les plus connues de l'entreprise qui compte 23 000 travailleurs partout dans le monde.

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STIKEMAN ELLIOTT

Un baromètre des progrès accomplis

Caroline Rodgers, collaboration spéciale

Il y a environ cinq ans, chez Stikeman Elliott, on a entrepris d'améliorer la satisfaction au travail des employés. Participer à l'étude d'Hewitt était une façon de mesurer les progrès accomplis à cet égard. Et les résultats sont au rendez-vous. Le cabinet d'avocats, qui en est à sa première participation au sondage, se classe au 12e rang.

«Ici, on ne fabrique pas des chaises ou des ordinateurs, dit Me Pierre Raymond, président du conseil de Stikeman Elliott. Ce que nous vendons ce sont nos gens, jeunes et moins jeunes, leur savoir, leur sagesse. Nous sommes en contact avec nos clients de façon quotidienne. Il est évident qu'en créant une atmosphère stimulante, les employés vont interagir avec les clients de façon plus efficace.»

Avec plus de 400 employés répartis dans huit bureaux à Montréal, Toronto, Ottawa, Calgary, Vancouver, New York, Londres et Sydney, les besoins sont variés. Certains sont intéressés par des avantages sociaux concurrentiels. D'autres veulent des moyens technologiques à la fine pointe, et d'autres aiment que la hiérarchie entre avocats et employés ne soit pas trop marquée.

«Obtenir de bons résultats nécessite une multitude d'attitudes et de facettes dans la façon de travailler avec le personnel, dit-il. On s'assure d'être compétitifs en ce qui concerne le salaire et les avantages sociaux. Et d'un autre côté, on essaie de faire en sorte que tous les employés se sentent appréciés pour ce qu'ils sont.»

Selon lui, il revient aux dirigeants de donner l'exemple en ce sens. «Plus les gens voient le respect qu'une personne porte aux autres, plus ils ont envie de faire la même chose. Si je traite une employée avec gentillesse, elle me renverra l'ascenseur et cela crée une atmosphère de travail beaucoup plus agréable. On aime garder nos employés longtemps.»

C'est le cas de Johanne Proulx, qui travaille depuis 16 ans au cabinet auprès du même avocat. Ses tâches ont évolué en même temps que la carrière de son patron, d'abord jeune avocat, devenu plus tard associé.

«Les adjointes sont invitées à participer de près aux affaires des avocats pour qui elles travaillent, dit-elle. Nous sommes des agents de service à la clientèle et on a une relation importante avec les clients. Quand une transaction est complétée, on ressent un accomplissement.»

Au cours de sa carrière, Mme Proulx a déjà eu l'occasion d'aller travailler ailleurs, mais elle a préféré rester chez Stikeman. Pour l'ambiance agréable, mais aussi pour les outils de travail à la fine pointe de la technologie, un élément qui ressort comme un levier de mobilisation important dans l'enquête.

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ERICSSON

Attirer de nouveaux talents

Stéphane Champagne, collaboration spéciale

La réputation d'Ericsson n'est plus à faire. Pourtant, celui qui se présente comme le plus grand fournisseur au monde de technologies et de services aux exploitants en télécommunications sentait le besoin de se faire connaître davantage. L'entreprise ne s'en cache pas: elle est actuellement en mode recrutement à son centre montréalais de recherches et de services. Et une place au palmarès des 50 employeurs de choix au Canada l'aidera à attirer de nouveaux talents.

Et, bonne nouvelle pour Ericsson, à sa première participation, elle se classe en 37e position. «On y croyait beaucoup. J'aurais été étonnée qu'on ne se classe pas. Mais qu'on se le fasse confirmer, c'est une très grande source de fierté pour tout le monde dans l'entreprise», explique Anne-Marie Doin, vice-présidente Ressources humaines et communications.

Ce n'est pas d'hier qu'Ericsson sonde ses troupes. Depuis plusieurs années, elle consulte ses employés à l'aide d'un sondage annuel interne. L'entreprise a donc compris depuis longtemps qu'un employé informé est un employé heureux. «Tout le monde est continuellement informé de ce qui se passe dans l'entreprise», affirme Anne-Marie Doin.

Ericsson se targue d'offrir une grande flexibilité d'horaires à ses troupes. Certains employés auront bientôt la possibilité de travailler à domicile huit jours par mois. L'employeur de choix offre également des cours de français, d'anglais, d'espagnol et bien sûr, de suédois (le siège social mondial d'Ericsson est en Suède).

Garderie et conditionnement physique

Pour rendre service à ses travailleurs, l'entreprise a mis en place une garderie de 50 places au nom évocateur de «Les petites cellules». Aussi, un programme baptisé «mieux-être» permet notamment l'accès à une salle de conditionnement physique dernier-cri et à des cours de yoga.

L'entreprise de téléphonie fait également confiance aux employés. Hubert Gagnon-Lamonde en est une preuve vivante. À 25 ans, ce jeune diplômé en génie de l'Université de Sherbrooke est intégrateur de produits chez les clients d'Ericsson. Il voyage constamment et a déjà fait le tour du monde pour le compte de son employeur. Il est responsable de la gestion de son propre budget pour ses séjours à l'étranger.

Le jeune homme connaissait déjà la réputation d'Ericsson. «On en parlait entre finissants. Quand j'ai su que l'entreprise serait présente à la foire de l'emploi de l'université, je me suis préparé quelques lettres de motivation», explique-t-il.

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NOVARTIS PHARMA

Motiver en misant sur le patient

Caroline Rodgers, collaboration spéciale

L'année a peut-être été difficile pour l'économie, cela n'a pas empêché Novartis Pharma de la terminer avec de bons résultats commerciaux. Ni de passer de la 37e à la 29e position parmi les employeurs de choix!

«Nous avons été capables de retenir les gens et de les motiver, constate Julie Bellani, vice-présidente aux ressources humaines. Et on fait tout pour s'assurer que le patient reste au coeur de cette motivation.»

Ainsi, pour que les employés demeurent conscients de cette réalité, on organise une réunion générale tous les deux mois. Un patient est invité à les rencontrer pour leur parler des effets bénéfiques des médicaments dans sa vie.

«Nous avons reçu un greffé, une personne souffrant de la malade d'Alzheimer, et une autre de la maladie de Parkinson, dit Mme Bellani. Ils ont parlé de leur expérience avec la maladie. Ce sont des moments remplis d'émotion et cela fait une énorme différence dans la motivation des employés.»

Le plus enthousiaste d'entre eux est sûrement Mark Lazarovits. Cet employé qui travaille depuis cinq ans en comptabilité chez Novartis revient tout juste d'un séjour en Tanzanie. Là-bas, il a participé à l'implantation d'un programme d'inventaire des médicaments contre la malaria. Celui-ci permet aux quelque 5000 petites cliniques situées en régions éloignées de déterminer la quantité de médicaments disponibles à chaque endroit par messagerie-texte. C'est une façon d'améliorer leur accès à ces médicaments. Grâce au nouveau système, les cliniques peuvent savoir avec exactitude à quel endroit envoyer un messager à moto pour s'en procurer en cas de besoin. Ce projet, approuvé par le gouvernement tanzanien, s'inscrit dans le cadre d'un nouveau programme de responsabilité sociale outremer instauré par l'entreprise.

Mais pour Mark Lazarovits, c'est le genre d'expérience qui change une vie. «Je reviens à la maison avec un sens renouvelé de la pertinence de mon travail, dit-il. Sur le terrain, j'ai eu la chance de voir comment on peut faire la différence dans la vie des gens et je reviens en étant plus concentré sur cet objectif.» M. Lazarovits était le premier à participer au programme. L'an prochain, ce sera le tour d'un autre employé.