Accusé d'avoir abandonné à leur sort les retraités ayant perdu une partie ou la totalité de leur fonds de retraite, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a annoncé mardi un train de mesures visant à rendre davantage solvables les régimes de retraite d'entreprises tombant sous la juridiction d'Ottawa.

La pérennité des régimes de retraite est devenue un enjeu important au pays à la suite de la faillite de grandes entreprises comme Nortel et l'effondrement des marchés boursiers l'an dernier.

Plusieurs travailleurs ayant contribué toute leur vie à un régime de retraite se retrouvent aujourd'hui le bec à l'eau puisque les entreprises qui les employaient ne peuvent plus les financer adéquatement. Selon certaines évaluations, les régimes de retraite seraient sous-financés de quelque 50 milliards de dollars au pays.

Les réformes proposées par le ministre Flaherty visent notamment à :

* limiter la possibilité pour les employeurs de suspendre leurs cotisations, sauf s'ils disposent d'un coussin financier de 5% ;

* modifier la méthode de capitalisation pour la rendre moins volatile en utilisant une moyenne sur trois ans pour établir la capitalisation requise ;

* obliger les employeurs à assurer la capitalisation intégrale des prestations de pension à la cessation des régimes ;

* augmenter de 10% à 25% le seuil du surplus des caisses de retraite prévu par la Loi de l'impôt sur le revenu, qui s'applique à tous les régimes à prestations déterminées, qu'ils soient de compétence fédérale ou provinciale.

Ces mesures ne s'appliqueront toutefois qu'aux entreprises qui tombent sous la compétence fédérale, dont les sociétés de télécommunications, les compagnies aériennes et les banques, entre autres. Au pays, il n'y a qu'environ 7% des régimes de retraite qui sont réglementés par Ottawa.

«Notre gouvernement a prêté une oreille attentive aux Canadiens et nous comprenons la valeur que revêtent la sécurité et la viabilité des régimes de retraite. Nous proposons un ensemble équilibré de mesures avantageuses pour les répondants des régimes, leurs participants et les retraités», a affirmé le ministre des Finances.

M. Flaherty a annoncé ces réformes moins de deux heures avant de témoigner devant le comité des finances de la Chambre des communes.

D'autres mesures seront aussi dévoilées en décembre quand le ministre Flaherty rencontrera ses homologues des provinces à Whitehorse, au Yukon. Le fruit du travail du comité présidé par le secrétaire parlementaire de M. Flaherty, Ted Menzies, sur cette délicate question sera également discuté.

Plus tôt cette année, le gouvernement fédéral a lancé une sorte de bouée de sauvetage aux entreprises en leur permettant de combler le déficit de leur régime de retraite sur une période de 10 ans au lieu de cinq ans.

S'ils ont salué ces nouvelles mesures, les experts ont affirmé qu'elles demeurent insuffisantes pour régler les problèmes de solvabilité à court terme de plusieurs régimes de retraite.

«Je ne m'attends pas à ce que cela ait un impact important ou des effets immédiats», a affirmé à La Presse Canadienne Malcolm Hamilton, de la firme Mercer Human Resource Consulting.

Le critique libéral en matière de finances, John McCallum, a tenu des propos semblables au comité parlementaire, soulignant que les réformes proposées n'auront pas d'impact sur les régimes de retraite qui accusent un déficit.

«C'est un peu tard pour annoncer de telles choses. La plupart des fonds de retraite accusent des déficits de 20 à 30%. Qu'on permette un surplus dans la caisse de retraite de 25% est une question discutable», a dit M. McCallum.

L'ancien économiste en chef de la Banque royale a affirmé que le ministre aurait dû adopter ces mesures en 2007, comme le proposait le comité des finances. «Si vous aviez fait cela en 2007, avant que la crise ne frappe, cela aurait peut-être eu un effet. Il est malheureux que vous ayez choisi de ne pas suivre les recommandations du comité plus tôt», a-t-il dit.

Le ministre Flaherty a répondu que personne n'avait prédit l'ampleur de la crise économique mondiale l'an dernier.

La semaine dernière, le NPD a proposé son remède à la crise qui frappe les régimes de retraite au pays. Entre autres choses, le NPD a suggéré la création d'un régime national d'assurance pension, financé par les caisses de retraite, qui garantirait aux retraités jusqu'à 2500 $ par mois advenant une faillite de l'entreprise ou la liquidation de la caisse.

Le Parti libéral compte proposer des mesures pour consolider les régimes de retraite au pays d'ici un mois.