Longtemps prospère grâce à sa vitalité économique et à sa proximité de l'Asie, la Colombie-Britannique a particulièrement souffert durant la présente récession. Avec ce portrait de la province la plus à l'ouest de la Confédération, Stéphane Paquet poursuit sa série de portraits provinciaux qui le mèneront de Vancouver à St.John's, Terre-Neuve. Intitulée Comment ça va ?, cette série prend le pouls de l'économie canadienne alors que se profilent une reprise et des élections à Ottawa.

«C'est la baisse la plus brutale que j'aie vue de ma vie. »

En 20 ans au port de Vancouver, le directeur de l'exploitation, Chris Badger, n'a jamais vécu une année comme celle-ci : depuis le début de 2009, le trafic cargo est en baisse de 15 % par rapport à l'an dernier.

Évidemment, le port de Vancouver, cette « porte sur l'Asie » comme on l'appelle, sert aussi à exporter des produits d'autres provinces et des États-Unis. Mais quand M. Badger regarde les chiffres du trafic intérieur, la baisse est encore plus grande, à 36 %. « Ça te dit que les affaires ont diminué en Colombie-Britannique », constate-t-il.

Diminuer ? Parlez-en à Charlie Cornfield, maire de Campbell River, située dans l'île de Vancouver. Le maire récite par coeur les chiffres de pertes d'emplois : 350 à la société papetière, 440 à l'usine de pâtes Kraft, 275 à la scierie, 803 bûcherons de moins en forêt... tous ces emplois perdus en à peine un an dans une ville de 30 000 âmes. Cette situation transposée à l'échelle montréalaise, c'est comme si 200 000 personnes avaient perdu leur job.

Au cours de la fin de semaine, il a tenu une session d'urgence avec ses conseillers et les hauts fonctionnaires de la ville, question de voir ce qui pouvait être fait. « On doit développer la stratégie de diversification », explique-t-il à La Presse Affaires.

Diversifier, oui, mais vers quoi, M. le maire ? « On n'est pas arrivés avec une solution précise », admet-il, un peu dépité par moments.

Au Business Council of British Columbia, l'économiste Ken Peacock rappelle que la valeur des exportations de produits forestiers de la province est passée de plus de 10 milliards de dollars en 2004 à quelque 3 milliards estimés cette année. Une baisse des deux tiers en cinq ans. « C'est un coup dur », lance-t-il.

En fait, fait-il remarquer, l'industrie forestière britanno-colombienne - comme celle du Québec - a été frappée par le ralentissement américain. Mais ce qui a fait encore plus mal à ce bout-ci du pays, c'est l'éclatement de la bulle immobilière provinciale à l'automne 2008, elle qui tenait depuis cinq ans.

Cet éclatement a fait fondre de presque le cinquième le prix de l'immobilier, entre le sommet du cycle et son creux récent. Les dépenses de consommation ont suivi, surtout celles qu'on fait à l'achat d'une maison : meubles, électronique, peinture, alouette.

Pas surprenant dans ces conditions que la Colombie-Britannique, qui compte 1,5 million de travailleurs de moins que le Québec, ait perdu presque autant d'emplois que la Belle Province depuis l'automne dernier. Le produit intérieur brut (PIB) réel, qui a reculé de 0,3 % l'an dernier, devrait enregistrer une autre baisse de quelque 2,5 % cette année. « Avoir deux années de suite de recul, c'est une nouvelle donne pour nous », souligne encore M. Peacock, dont l'organisme regroupe les grandes entreprises de la province.

Et maintenant ?

À déambuler dans les rues de Vancouver, on remarque que les grues sont moins présentes qu'il y a deux ans, en plein boum immobilier, tant résidentiel qu'olympique. Mais on se sent loin des images de la Grande Dépression... un concessionnaire Rolls-Royce vient même d'ouvrir ses portes !

Les dirigeants du Port de Vancouver, eux, ont le temps de souffler un peu et de planifier leur expansion sans être pris par de trop graves problèmes de congestion.

Même à Campbell River, des bûcherons viennent d'être rappelés. « On est prêts à rebondir », lance le maire Cornfield.

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EN CHIFFRES

Taux de chômage

7,8%

Pertes d'emplois depuis octobre

-53 300 (-2,23%)

Immobilier (baisse des prix entre le sommet et le creux qui a suivi)

-18,1%

Ventes au détail (juin à juin)

-8,4%

Déficit provincial prévu

2,8 milliards, soit 1,5% du PIB

Prévisions de croissance (PIB réel)

2009 = -2,9%

2010 = +2,0%

Source: Statistique Canada, banque laurentienne, Association canadienne de l'immeuble

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SUR LA ROUTE



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Bizarre de voir la Bourse ouvrir à 6 h 30 et fermer à 13 h.

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