Le père d'un jeune homme de Granby, mort l'année dernière à la suite d'un accident causé par une défaillance de sa Chevrolet Cobalt, ne croit pas au mea-culpa de la PDG de General Motors, Mary Barra.

La patronne de GM a admis cette semaine que son entreprise avait été négligente en tardant à lancer le rappel de 2,6 millions de véhicules défectueux, ce qui aurait contribué au décès d'au moins 13 automobilistes. GM Canada a annoncé que le programme d'indemnisation déjà dévoilé aux États-Unis s'étendrait aussi aux victimes canadiennes et à leurs familles.

«Le but de ces annonces, c'est seulement de faire taire les familles et de calmer l'opinion publique», dénonce Normand Dubuc, qui a perdu son fils de 23 ans, Dany Dubuc-Marquis, en juin 2013. «Ils font de grandes déclarations, mais en réalité, ils ne cherchent qu'à se défiler pour éviter d'assumer leurs responsabilités.»

Dany Dubuc-Marquis est le seul Canadien parmi les 13 victimes pour lesquelles GM a reconnu officiellement sa responsabilité, en raison d'un problème du système d'allumage de ses voitures. Pourtant, Normand Dubuc n'a eu aucun contact avec des responsables de l'entreprise. Personne ne l'a rappelé lorsqu'il s'est adressé à GM Canada pour parler de l'accident de son fils et du problème électrique qui y aurait contribué.

Alors qu'il se prépare à commémorer le premier anniversaire de la mort de son jeune fils, avec ses proches, M. Dubuc est en colère en voyant l'exercice de relations publiques auquel se livre GM. «J'ai l'impression que, comme avant, ils ne pensent qu'à l'argent, au détriment de la vie des gens», dit-il.

Plusieurs groupes qui suivent ce dossier soutiennent que les défauts des voitures GM ont causé beaucoup plus de décès et de blessures que ce que veut bien reconnaître l'entreprise.

Pas de sanctions contre GM au Canada

Normand Dubuc déplore aussi l'inaction du gouvernement canadien, qui n'a toujours pas l'intention de sévir à l'endroit de GM, contrairement à ce qui se passe aux États-Unis. Le constructeur automobile a dû payer une amende de 35 millions US aux autorités fédérales américaines pour avoir failli à prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des automobilistes dans un délai raisonnable.

Jeudi, GM a dévoilé un rapport qui détaille l'enchaînement de gestes d'incompétence, de nonchalance et d'ignorance qui ont mené à 11 ans d'inaction de sa part, même si le problème de ses systèmes d'allumage était connu depuis longtemps. Le moteur et les circuits électriques peuvent s'éteindre à cause d'un choc ou du poids d'un porte-clés trop lourd, ce qui désactive les sacs gonflables, les ceintures de sécurité et parfois même la direction assistée et les freins antiblocage.

Des enquêtes sont toujours en cours sur les agissements de l'entreprise par le département américain de la Justice, la Securities and Exchange Commission et un groupe de procureurs du gouvernement.

Pourtant, au Canada, la ministre des Transports, Lisa Raitt, estime n'avoir aucune preuve d'actes répréhensibles de la part de GM Canada, a fait savoir hier sa porte-parole, Jana Régimbal. Les dirigeants de GM Canada ont toujours dit n'avoir été informés qu'en février dernier des défectuosités des systèmes d'allumage des voitures vendues au pays, peu de temps avant qu'ils n'émettent un rappel pour des milliers de véhicules.

S'il était établi que GM Canada était au courant des défectuosités et qu'elle n'a pas agi en temps opportun pour protéger les conducteurs, l'entreprise s'exposerait à une amende maximale de 1 million en vertu de la Loi canadienne sur la sécurité automobile.

Neuf accidents au Canada

Transports Canada indique avoir reçu neuf plaintes au sujet d'accidents possiblement causés par des défectuosités de voitures GM, dont celle du père de Dany Dubuc-Marquis. Deux des cas sont des accidents mortels. Les enquêteurs continuent d'examiner les circonstances de ces accidents, a indiqué hier une porte-parole de Transports Canada.

Reste à savoir combien de victimes se manifesteront auprès de GM Canada, au moment du lancement de son programme d'indemnisation. La mise en place de ce programme a été confiée à l'avocat américain Kenneth Feinberg, connu pour avoir piloté l'indemnisation des victimes des attentats du 11 septembre 2001, de celles de la fuite de la plate-forme pétrolière de BP dans le golfe du Mexique, en 2010, et de celles de l'attentat du marathon de Boston en 2013.

Une porte-parole de GM Canada a cependant été incapable de fournir plus de détails au sujet de l'admissibilité au programme, des fonds qui y seront alloués ou des procédures que doivent entreprendre les victimes pour y avoir droit.

Deux demandes de recours collectif ont également été déposées au Canada, en plus de procédures similaires entreprises aux États-Unis.

Pour le programme d'indemnisation de GM Canada: https://media.gm.ca/media/ca/fr/gm/news.detail.html/content/Pages/news/ca/fr/2014/Jun/0605_Ignition-Recall.html