Les principaux constructeurs et équipementiers mondiaux se sont pressés samedi à Téhéran pour prendre le pouls d'un marché iranien au potentiel «considérable», une semaine seulement après l'accord historique conclu avec les grandes puissances sur le dossier nucléaire.

La Conférence internationale de l'industrie automobile, première du genre en Iran, a rassemblé plus de 150 sociétés du secteur, selon les organisateurs. Elle se veut le signe d'un «retour à la normale» pour l'un des fleurons de son industrie malmenée depuis plus d'un an par les sanctions occidentales.

Le ministre iranien de l'Industrie Mohammad Reza Nematzadeh a dit espérer une levée des sanctions «d'ici fin décembre». Il a souhaité «plus de coopération avec les compagnies étrangères», dont les Français Peugeot et Renault qui ont «une longue expérience de coopération avec l'Iran».

L'Iran, 11e marché mondial et 13e producteur automobile en 2011, «a un potentiel considérable qui est sous-exploité depuis 2012», rappelle Patrick Blain, président de l'Organisation internationale des constructeurs automobiles (OICA).

L'accord conclu le 24 novembre à Genève entre l'Iran et le groupe 5+1 (Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie, Allemagne) limite les activités nucléaires de Téhéran et allège certaines sanctions, dont celles frappant l'automobile. En juin 2013, un décret présidentiel américain a limité le commerce avec l'Iran aux véhicules complets et interdit la fourniture de pièces détachées ou d'assistance technique.

L'objectif de l'Iran est de développer les volumes au niveau domestique et les exportations dans les pays environnants, assurent des participants.

«Les partenaires sont en place, il n'y a pas de raison de ne pas revenir» dès 2014 à un chiffre de production de 1,6 million de véhicules par an, comme en 2011, «et pourquoi ne pas atteindre à terme les 2 millions», déclare à l'AFP M. Blain.

Il souligne le taux de motorisation faible avec seulement 89 véhicules pour 1 000 habitants, soit moins que la Chine, et un PIB par habitant de près de 12 500 dollars par an.

Gilles Normand, directeur des opérations de Renault pour l'Asie-Pacifique, souligne que le Moyen-Orient représente un «marché d'avenir» pour l'ensemble des constructeurs.

Soutien très clair

Dans cette région, «50 % du parc automobile, qui compte plus de 20 millions d'unités, a plus de 25 ans», rappelle-t-il.

Les activités de la marque au losange ont été sévèrement affectées par les sanctions américaines.

Renault, présent en Iran depuis 2004, avait vendu plus de 100 000 voitures en 2012 et représentait 10 % du marché. L'activité avait plongé à 30 000 unités à fin juin 2013.

Peugeot a pour sa part quitté au printemps 2012 son deuxième marché en volume. La marque au lion avait vendu l'année précédente 458 000 véhicules en Iran et son retrait avait provoqué un manque à gagner d'une centaine de millions d'euros entre les résultats 2011 et 2012.

Sasan Ghorbani, président des équipementiers iraniens et organisateur de la conférence, souligne que les représentants du gouvernement «ont été très clairs sur leur soutien aux investisseurs étrangers».

«Il y a eu de très bonnes réunions, qui mèneront dans l'avenir à des accords», dit-il à l'AFP.

Peugeot a ainsi repris contact avec son partenaire historique, Iran Khodro, a indiqué à l'AFP une source au sein du premier constructeur iranien. «Nous avons eu de bonnes négociations».

Mais, pour les participants, la relance économique ne se fera pas sans un allègement des sanctions sur les flux financiers, aussi vite que possible.

«L'important, c'est la vitesse. Les Iraniens sont pressés», dit Patrick Blain. «Il faut que l'Iran se retrouve avec des financements internes et internationaux comme n'importe quel autre pays».

Gilles Normand préfère attendre une clarification des termes de l'accord intérimaire signé à Genève, attendue «aux alentours de janvier 2014».

«On reste dans un politique pragmatique, on respecte les sanctions internationales», souligne le dirigeant, qui a toutefois commencé à «travailler en amont» avec ses fournisseurs pour un redémarrage de l'activité.

Les équipementiers français, présents à travers la Fédération des industries et équipements de véhicules (FIEV), soulignent «la position majeure» de la filière auto française en Iran avant les sanctions. «Il serait dommage de la perdre», dit à l'AFP le vice-président de la FIEV, Arnaud de David-Beauregard.