La Suède se prépare à enterrer son constructeur automobile Saab après l'échec de sa cession par General Motors à Koenigsegg, un épilogue probable qui entraînerait des milliers de licenciements, à moins d'un miraculeux sauvetage chinois.

Le géant américain GM, qui cherche à vendre la marque suédoise depuis près d'un an et veut s'en débarrasser avant la fin de l'année, doit se prononcer sur ses intentions mardi lors d'un conseil d'administration à Detroit.

«Le scénario le plus probable est la fermeture», estime Paul Newton, analyste automobile pour IHS Global Insights, à l'unisson de la presse suédoise.

«Le coup de grâce», «c'est fini»: les grands journaux du pays scandinave ont rivalisé de titres pessimistes depuis l'annonce du retrait de Koenigsegg, le petit producteur suédois de bolides de luxe qui menait le consortium d'investisseurs destiné à reprendre Saab.

La dernière option jugée possible est que le chinois Beijing Automotive (BAIC), qui s'était allié à l'offre de Koenigsegg en septembre, se décide à faire cavalier seul ou s'allie à un autre partenaire. Le cinquième constructeur chinois, qui cherche à s'internationaliser, a indiqué mercredi qu'il allait «prudemment réévaluer» le projet.

«Le problème est que Beijing est intéressé par la seule chose qu'il ne pourra probablement pas obtenir de General Motors -la technologie- et c'est pour ça qu'il est peu probable qu'il arrive à un accord pour empêcher Saab de disparaître», souligne Paul Newton.

Le chinois Geely, qui est en négociations avancées avec Ford pour reprendre l'autre constructeur suédois Volvo Cars, a dit qu'il se concentrait sur ce dernier.

La fermeture de Saab, une des marques suédoises les plus connues dans le monde, serait non seulement un déchirement pour les Suédois, mais constituerait une catastrophe sociale dans son fief de Trollhättan, dans le sud-ouest, et pour le secteur automobile du pays nordique.

«Maintenant, on doit attendre ce que GM a à dire, mais j'espère que l'entreprise aura conscience de l'importance de Saab pour la Suède», a dit Gert-Inge Andersson, le maire de Trollhättan.

Outre les 3.400 employés de Saab, entre 5000 et 10 000 emplois supplémentaires pourraient être supprimés, principalement chez les sous-traitants. Les difficultés des fournisseurs pourraient à leur tour affecter Volvo, a averti le syndicat IF Metall.

Mais le gouvernement suédois s'est depuis le début montré intraitable, répétant inlassablement qu'il ne prendrait pas de participation dans une entreprise déficitaire qu'un groupe privé n'a pas réussi à rendre rentable.

«Je ne crois pas à cette économie où les Etats dirigent les sociétés privées», a renchéri le Premier ministre Fredrik Reinfeldt.

A moins d'un an des élections, le sort de Saab a déclenché une passe d'armes politique, la chef de l'opposition, la sociale-démocrate Mona Sahlin, appelant à l'«union nationale» pour sauver le constructeur et ses emplois.

Selon le gouvernement, un prêt d'urgence du gouvernement reste envisageable, mais à la condition de trouver un repreneur. Saab, qui a besoin de liquidités, a demandé un prêt de 400 millions d'euros à la Banque européenne d'investissement et souhaite le faire garantir par l'Etat.

Déjà infime dans l'océan de General Motors lorsqu'il écoulait bon an mal an autour de 100 000 voitures, Saab a vu ses ventes s'effondrer de 65% cette année, plombé par les inquiétudes sur son avenir.

Une dernière possibilité serait que le suédois reste dans le giron de General Motors, qui a déjà retourné sa veste début novembre sur ses autres marques européennes Opel et Vauxhall, qu'il devait initialement céder.

Mais GM, qui restructure à tout va pour survivre, a dit plusieurs fois que Saab n'entrait plus dans ses plans.