L'inquiétude montait lundi en Allemagne devant le retard de General Motors à trancher entre deux repreneurs en lice pour sa filiale européenne Opel, certains craignant qu'il renonce à la vendre.

Le sort d'Opel et de sa jumelle britannique Vauxhall est en suspens depuis que sa maison mère a frôlé la faillite au printemps. Au fil des mois, l'affaire a pris les dimensions d'une affaire d'Etat en Allemagne, où le groupe emploie environ 25 000 personnes, à quelques semaines d'élections législatives, et a connu de nombreux rebondissements.

Mais jusqu'à présent, une chose au moins paraissait certaine: la volonté de GM de vendre la marque à l'éclair.

La semaine dernière, le fait que le constructeur de Detroit ne se soit pas prononcé en faveur de l'un ou l'autre candidat au rachat a ébranlé cette certitude. L'équipementier canadien Magna, adossé à la banque russe Sberbank, et l'investisseur financier belge RHJ, sont dans la course.

Du coup, le syndicat de l'industrie IG Metall s'inquiète que GM puisse finalement vouloir conserver Opel, quitte à fermer des sites de production.

«Ce serait la deuxième plus mauvaise solution après le dépôt de bilan; en fait, ce n'est pas une solution», s'est alarmé le syndicaliste Armin Schild, qui siège au conseil de surveillance du constructeur, à la télévision ZDF.

Pour Berlin, ce scénario n'est toutefois pas d'actualité: «Il s'agit de questions spéculatives dont GM n'a pas fait part pour l'instant au gouvernement», a déclaré un porte-parole du ministère de l'Economie lors d'une conférence de presse.

Le gouvernement a encore fait preuve de bonne volonté en invitant un membre du conseil d'administration de GM à venir cette semaine à Berlin pour discuter.

L'Allemagne pèse de tout son poids depuis plusieurs mois pour assurer la survie d'Opel. Elle lui a fourni 1,5 milliard d'euros et est prête à apporter des milliards supplémentaires d'aides publiques pour faciliter une vente à son candidat favori, Magna.

La chancelière Angela Merkel s'est impliquée personnellement dans le dossier, appelant de nouveau ce week-end à une solution rapide; et le chef de la diplomatie Frank-Walter Steinmeier s'est entretenu samedi par téléphone avec son homologue américaine Hillary Clinton.

Mais ces efforts sont restés vains pour l'instant. GM n'a ainsi pas hésité à revenir sur un accord trouvé en mai avec Magna pour tout remettre à plat.

Cette attitude aurait aussi irrité Washington et lundi, Berlin s'efforçait de calmer le jeu. «Il est important d'éviter une confrontation, a déclaré le porte-parole du gouvernement.

Reste à savoir pourquoi GM ne prend pas de décision concernant Opel.

Pour Christoph Stürmer, analyste chez Global Insight, General Motors n'aurait jamais été très chaud pour céder Opel, mais avait dû s'y résoudre lorsqu'il était en quasi-faillite. A présent que le groupe est sauvé, «ce plan initial est remis en cause et de nouvelles réflexions sont en cours», explique-t-il à l'AFP.

L'expert automobile Willi Diez est du même avis: GM «pense de nouveau sur le long terme et dans ce cadre, Opel et les ventes en Europe constituent un facteur important», indique-t-il dans la Berliner Zeitung.

Cette pilule serait toutefois difficile à faire avaler aux responsables politiques allemands, mais aussi aux salariés d'Opel, qui n'imaginent plus leur avenir sous la férule du constructeur américain.

«La situation que nous avons vécue au cours des deux dernières décennies a conduit à ce que la marque Opel soit abîmée», dénonce M. Schild. Et Klaus Franz, président du comité d'entreprise, a d'ores et déjà promis des «actions spectaculaires» des employés.