Un producteur de cannabis a présenté ses installations dans l'ouest de l'île de Montréal, vendredi, accueillant les médias avec du champagne, du saumon fumé et des documents... unilingues anglais.

Dans la foulée de l'incident survenu à l'inauguration d'un magasin Adidas à Montréal, où le gérant a prononcé quelques mots en français en disant vouloir «accommoder» les médias francophones, le producteur de cannabis albertain Aurora a remis aux médias à leur arrivée une entente de confidentialité rédigée uniquement en anglais.

Cette entente de confidentialité restreignait le droit des signataires de parler du produit de l'entreprise et de prendre des images et les journalistes, qui étaient sur place pour, justement, parler du produit et prendre des images, ont collectivement refusé de la signer.

Le directeur des opérations d'Aurora, Allan Cleiren, a cherché à expliquer - en anglais - l'unilinguisme du document en invoquant le fait que l'entreprise n'avait son permis d'exploitation que depuis trois semaines et que tout se déroulait très rapidement, ajoutant qu'il n'avait pas de traducteur à son emploi dans ses bureaux d'Edmonton.

Aurora a toutefois pris possession de l'édifice à Pointe-Claire en avril dernier et y a investi plus de 11 millions $.

«Nous pouvons certainement faire mieux», a reconnu M. Cleiren, tout en réaffirmant que les médias n'auraient pas le droit de prendre des images.

Cette interdiction a toutefois été levée lorsque la responsable des relations gouvernementales de l'entreprise, Andrea Paine, s'est présentée pour aplanir toutes ces questions.

L'événement a finalement pu débuter avec beaucoup de retard, l'entreprise étant mal préparée pour accueillir tant les médias que les visiteurs invités.

Après cette entrée en matière cahoteuse, la presse et les invités ont eu droit à une allocution du vice-président d'Aurora, Cam Battley, avant de procéder à la visite de l'usine.

M. Battley a insisté sur les mesures mises en place pour veiller à ce que la production soit faite avec respect et responsabilité. «Les yeux du monde sont tournés vers le Canada maintenant et, avec nos partenaires au gouvernement, nous allons montrer au monde comment ça se fait», a-t-il soutenu.

114 000 kilos de pot par année

L'usine de Pointe-Claire, qui produira 4000 kilogrammes de cannabis par année, n'avait cependant pas de grande culture à montrer, la production étant à ses premiers balbutiements. En tout, seulement 216 jeunes plants de cannabis mesurant tout au plus 20 centimètres  s'y trouvaient.

La tournée aura à tout le moins permis de constater que des mesures de sécurité extrêmement sévères ont été déployées afin de répondre aux exigences gouvernementales en la matière.

Aurora a cependant de grandes ambitions. Outre l'installation de Pointe-Claire, qui emploiera de 40 à 50 personnes, la firme avait annoncé la veille l'acquisition des installations de H2 Biopharma à Lachute, où elle compte produire avec un nombre équivalent d'employés, 4800 kilos de cannabis par année.

Les installations québécoises s'ajoutent à une usine existante située à Cramona, près de Calgary, qui produit annuellement 5500 kilos, et Aurora a l'intention d'ouvrir une méga-usine de 800 000 pieds carrés près d'Edmonton qui, elle, produira environ 100 000 kilos de cannabis par année. La production totale annuelle d'Aurora atteindra donc près de 115 000 kilos de cannabis au Canada lorsque tout sera en place.

Toute la littérature et le discours de l'entreprise portent sur la marijuana à des fins médicales, pour laquelle est détient déjà les permis, mais Aurora ne cache pas son intention d'investir le marché récréatif dès qu'il sera légal et qu'elle aura obtenu les autorisations nécessaires.

«Le cannabis qui va être produit ici, premièrement, c'est pour nos patients de cannabis médical», a expliqué Mme Paine, ajoutant immédiatement qu'Aurora «a bien l'intention d'accéder» au marché récréatif.

L'entreprise vise aussi le marché d'exportation, s'étant déjà portée acquéreur d'installations de distribution en Allemagne et en Australie.