La crise politique et les turbulences économiques au Brésil ne freinent pas les ambitions de Saputo, qui souhaite toujours mettre le pied dans le plus grand pays d'Amérique latine.

Pour son chef de la direction, Lino Saputo fils, les circonstances actuelles pourraient même présenter des occasions alléchantes pour la multinationale québécoise, si elle parvient à identifier la bonne cible.

«Il y a 200 millions de consommateurs au Brésil et l'industrie laitière est très fragmentée», a-t-il expliqué, mardi, en marge de l'assemblée des actionnaires de la société qui se déroulait à Laval.

M. Saputo a rappelé que l'Argentine était en pleine crise économique en 2002, ce qui n'a pas empêché Saputo de réaliser une acquisition afin de percer ce marché. Depuis, a-t-il ajouté, cette division occupe une place importante dans la stratégie du transformateur laitier.

Malgré «quatre ou cinq» visites au Brésil du grand patron de la société et l'étude de plusieurs dossiers, la bonne cible n'a toujours pas été identifiée, a affirmé M. Saputo.

Sans s'avancer sur le prix qu'il serait prêt à payer, le chef de la direction se dit «très confortable» d'acquérir une entreprise avec un chiffre d'affaires oscillant entre 250 millions et 1 milliard.

«Nous ne sommes pas à la recherche d'aubaines, a-t-il dit. Actuellement, les prix d'acquisition dans l'industrie sont à 10 ou 12 fois le bénéfice d'exploitation ajusté. Si nous trouvons un actif qui a beaucoup de valeur, nous pouvons dépasser ce ratio.»

Saputo se dit être prête à allonger entre 3 milliards et 3,5 milliards pour réaliser une ou plusieurs acquisitions.

En plus du Brésil, l'entreprise lorgne également du côté des États-Unis - son plus important marché -, de l'Australie, où elle est présente depuis deux ans, et de la Nouvelle-Zélande.

«Nous sommes dans des pays où il y a une forte infrastructure laitière, a dit M. Saputo. Nous ne sommes pas là pour bâtir l'infrastructure. Nous voulons l'acquérir pour acheter le lait des fermiers et le transformer.»

De plus, même après s'être retirée d'Europe en 2013, Saputo n'écarte pas non plus un retour sur le Vieux-Continent.

Privatisation et représentativité féminine

Au cours de la période des questions, un actionnaire a demandé au président du conseil, Lino Saputo père, s'il songeait à une éventuelle privatisation de l'entreprise - dont la valeur boursière est de 15 milliards -, ce qu'il a aussitôt écarté.

Le fondateur de Saputo a répliqué s'être tourné vers la Bourse en 1997 afin d'assurer la pérennité de la société, ajoutant que la performance financière actuelle justifiait sa décision.

«Je l'ai fait pour protéger ma famille et les personnes importantes pour moi, a dit le président du conseil. Ça été la pire chose pour moi (d'aller en Bourse). Avant cela, je n'avais qu'un patron et c'était mon épouse.»

Par ailleurs, même si Saputo compte maintenant autant d'hommes que de femmes au sein des 10 membres de son conseil d'administration, la proposition du Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires (Médac) visant l'instauration de cibles en matière de représentation féminine au sein de la direction de l'entreprise a été rejetée à 98%.

S'il a salué la parité au sein du conseil d'administration, le représentant du Médac, Willie Gagnon, a déploré que les femmes n'occupent qu'environ 12% des postes de direction chez Saputo.

Quant à l'adoption du vote consultatif sur la rémunération des hauts dirigeants de l'entreprise, 31% des actionnaires ont voté en faveur de la proposition de l'organisme, ce qui a été insuffisant pour la faire adopter.

Saputo a également profité de son assemblée annuelle pour divulguer ses résultats du premier trimestre.

L'entreprise a engrangé un bénéfice ajusté de 176,7 millions ou 44 cents par action diluée, en hausse de 29,5%. En l'absence d'éléments exceptionnels, le bénéfice ajusté a été identique.

Quant aux revenus, ils ont affiché une croissance de 2,6% pour s'établir à 2,63 milliards.

Les analystes sondés par Thomson Reuters tablaient sur un bénéfice par action de 40 cents et sur des recettes de 2,65 milliards.