Même si la récente baisse du coût du carburant a été accueillie avec soulagement par le secteur agricole canadien, plusieurs fermiers de l'Alberta préfèrent demeurer prudents et ne pas se réjouir trop vite.

«Pour le moment, tout va bien. Mais si les bas prix durent jusqu'au printemps, nous en reparlerons, affirme Lynn Jacobson, président de la Fédération de l'agriculture de l'Alberta. À long terme, il faudra réfléchir à toutes les infrastructures qui dépendent du prix du carburant. Si certains projets sont repoussés ou tout simplement annulés à cause de cette baisse, cela pourrait éventuellement nous causer du tort.»

Dans les Prairies, le prix du diesel est descendu sous la barre du 1$ le litre. «Pouvoir réduire ses coûts de carburant du tiers a un impact significatif sur les grandes fermes», fait remarquer Gary Stanford, qui exploite une ferme de 2 000 hectares près de Lethbridge, au sud-est de Calgary.

Lynn Jacobson, qui a dépensé entre 50 000$ et 60 000$ en carburant pour sa machinerie agricole l'an dernier, s'attend lui aussi à réaliser de bonnes économies si la situation perdure. «Avec des prix aussi bas qu'aujourd'hui, cela pourrait représenter une réduction de 20 % ou 25 % de nos dépenses en essence et en carburant par rapport à l'an dernier. C'est une économie majeure pour notre ferme, qui pourrait potentiellement atteindre 10 000$ cette année.»

Gary Stanford a tout de même une inquiétude. «Si le prix du pétrole demeure trop bas et que le gouvernement fédéral se met à chercher de nouveaux revenus pour respecter son budget, j'espère qu'il n'essaiera pas de le faire sur le dos des agriculteurs en augmentant nos taxes.»

Selon Joel Jackson, un analyste de BMO Marchés des capitaux qui se spécialise dans les compagnies de fertilisants, ce n'est cependant pas uniquement prix du carburant qui affectera les agriculteurs. L'engrais et les semences représentent également de grosses dépenses. «La baisse du prix du carburant a certains impacts, mais ils sont facilement compensés par la température et la volatilité des cours et des rendements», explique-t-il. Il ajoute que le prix de certaines cultures, dont celle du maïs, suit historiquement les hauts et les bas des prix du pétrole.