La FAO et des spécialistes ont lancé lundi un cri d'alarme face à la résurgence de la jaunisse fusarienne, une maladie ravageuse pour les plantations de banane, qui pourrait se propager à l'Amérique latine, l'un des principaux producteurs de la planète.

D'ores et déjà signalée en Asie, en Afrique et au Moyen-Orient, cette maladie qui prend la forme d'un champignon très résistant endommage fortement les bananiers en réduisant leur production sans pour autant nuire à la comestibilité du fruit.

Aussi appelée «maladie de Panama», la jaunisse fusarienne «pourrait avoir de sérieuses conséquences pour les planteurs, les négociants et les familles qui tirent leurs moyens d'existence de la filière bananière», a mis en garde Fazil Dusunceli, un phytopathologiste de la FAO, cité dans le communiqué de l'organisation.

«Plus de 100 000 hectares sont pour le moment contaminés», a révélé à l'AFP Gert Kema, directeur du programme de recherche sur la banane mené par l'Université de Wageningen aux Pays-Bas et responsable du site panamadisease.org.

La souche dite TR4 de la maladie infecte principalement les bananes Cavendish, qui avec une présence à hauteur de 47% est la variété la plus commercialisée dans le monde.

Dans les années 50 puis en 1992, la maladie avait déjà frappé causant des dégâts économiques énormes, respectivement de 2,3 milliards de dollars et 400 millions de dollars, selon le site panamadisease.org.

Avec ses 17 millions de tonnes de bananes en circulation (pour une production totale de 130 millions de tonnes, dont la plupart consommés sur place), le commerce international de ce fruit tropical s'élève aujourd'hui à 7 milliards de dollars par an, selon les statistiques de l'organisation onusienne installée à Rome.

La banane est la huitième culture alimentaire mondiale et la quatrième dans les pays les moins avancés, selon la FAO.

«L'Europe et les États-Unis (le plus gros marché avec une consommation de quasi 12 kg par an par Américain, NDLR) sont principalement alimentés par la production latino-américaine. Ils ne sont donc pas encore affectés», explique M. Kema.

Avant de se montrer plus alarmiste: «La question n'est pas de savoir si l'Amérique Latine sera touchée, mais plutôt quand elle le sera"

La Colombie et l'Équateur sont les plus gros producteurs au monde de bananes.

Alors qu'il n'existe aucun remède pour l'éradiquer, la maladie continue à se diffuser à travers la planète véhiculée par les humains et les moyens de transports.

Selon la FAO, la meilleure manière de combattre efficacement la jaunisse fusarienne est d'en prévenir la propagation.

Dans ce sens, Gianluca Gondolini, secrétaire du Forum mondial de la banane auprès de la FAO, préconise «d'augmenter les contrôles gouvernementaux, l'inspection des voyageurs en provenance de zones infectées. La sensibilisation et la formation doivent être renforcées, et les moyens de diagnostic développés.»

«La meilleure mesure de prévention reste la quarantaine», ajoute Gert Kema, avant de préciser la nécessité absolue pour les producteurs «de se laver les pieds, les bottes et leurs véhicules à l'intérieur et hors de leurs exploitations agricoles».

Une série de réunions en présence de scientifiques sont prévues au Kenya, en Afrique du Sud et à la Trinité-et-Tobago, dans les prochains jours pour préparer un plan d'action afin d'endiguer l'épidémie et d'anticiper de futures crises.

«De nouvelles espèces de bananes plus résistantes à ce genre de pandémie sont à l'étude», confie Gert Kema.

Ainsi la banane Goldfinger, imperméable à la «maladie de Panama», a déjà été créée par des chercheurs en génétique. Problème: elle aurait un goût de pomme.

«Il faudra des années de recherche pour obtenir un résultat satisfaisant», selon le spécialiste hollandais.