La sécheresse généralisée aux États-Unis pourrait créer des possibilités, mais aussi entraîner des défis pour les producteurs canadiens, a prévenu mardi Jean-Philippe Gervais, l'économiste agricole principal chez Financement agricole Canada.

«Les producteurs canadiens ne sont certainement pas à l'abri des répercussions que pourrait avoir cette sécheresse quasi historique sur le prix des produits de base, le coût des intrants et les industries liées à l'agriculture», a déclaré M. Gervais par voie de communiqué. L'effet d'entraînement se fait déjà sentir sur le prix de certains produits de base et tous les Canadiens sont concernés étant donné qu'un emploi sur huit au pays est lié au système agricole et agroalimentaire.»

Près de 40% de la production mondiale de maïs et 35% de la production mondiale de soja proviennent des États-Unis. Tout changement important dans la production américaine entraîne donc des répercussions majeures sur le prix de ces produits de base sur les marchés internationaux et, par ricochet, sur le prix de tous les produits agricoles. La sécheresse qui sévit cette année aux États-Unis est la plus importante depuis 1956.

Selon le département de l'Agriculture des États-Unis, la diminution de la production de maïs et de soja est sans précédent. On s'attend à ce que le rendement moyen national de maïs atteigne 123 boisseaux l'acre ou 10,8 milliards de boisseaux dans l'ensemble du pays, soit une diminution d'environ 20% par rapport aux prévisions de 146 boisseaux l'acre ou 13 milliards de boisseaux établies en juillet. Les prévisions quant aux rendements de soja ont également été revues à la baisse. Parallèlement, les projections de prix pour toutes les céréales fourragères ont été relevées considérablement.

M. Gervais précise que le maïs et le soja ont déjà connu une flambée des prix qui profite aux producteurs canadiens dans leur ensemble, de même qu'aux agriculteurs de l'Ouest canadien qui cultivent du canola et du blé, ces produits étant perçus comme des substituts au maïs et au soja.

Les conditions restent favorables pour la plupart des produits de base partout au Canada, à quelques exceptions près. Dans certaines régions du Québec et de l'Ontario, un temps sec et une faible humidité du sol sont susceptibles de réduire la production de maïs et de soja. Dans les Prairies, des producteurs font face à des conditions d'humidité excessive et aux maladies. Heureusement, la situation laisse entrevoir des perspectives encourageantes pour la majorité des producteurs de cultures du Canada. «Lorsque les producteurs de cultures profitent de prix élevés comme en ce moment, ils devraient revoir leur plan de gestion financière afin d'évaluer la possibilité d'accélérer le remboursement de leurs dettes», suggère M. Gervais.

La raréfaction de l'offre d'aliments traditionnels pour animaux entraîne une hausse de leur coût, ce qui a des répercussions défavorables sur les éleveurs de bétail. «Pour les éleveurs de bétail canadiens, cela signifie probablement qu'ils éprouveront des difficultés à court terme pour obtenir un gain à long terme», ajoute M. Gervais, qui fait remarquer que le prix des bovins devrait rebondir à long terme étant donné que les producteurs américains réduisent la taille de leur cheptel à cause de la sécheresse, comme cela s'est produit au Texas l'an dernier. Les répercussions de la hausse du coût des aliments pour animaux sur les producteurs de porcs du Canada sont aggravées par les difficultés qu'a connues cette industrie ces dernières années.

Les répercussions des conditions météorologiques défavorables sont habituellement de courte durée, mais M. Gervais souligne que la sécheresse actuelle s'est produite au moment où les stocks étaient déjà en deçà de la moyenne historique.