(Washington) Une dure bataille s’annonce cette semaine au Congrès américain, qui va examiner l’accord sur la dette scellé durant le week-end par le président Joe Biden et le dirigeant républicain Kevin McCarthy pour éviter aux États-Unis un défaut de paiement cataclysmique.

« Nous sommes parvenus à un accord budgétaire bipartisan que nous sommes prêts à soumettre à l’ensemble du Congrès », a déclaré M. Biden lors d’une brève apparition devant les médias dimanche soir à la Maison-Blanche.

« L’accord permet d’éviter la pire crise possible : un défaut de paiement pour la première fois dans l’histoire de notre pays, une récession économique, des comptes d’épargne retraite dévastés, des millions d’emplois perdus », a poursuivi le président. « Cet accord part maintenant à la Chambre des représentants et au Sénat. J’invite fermement les deux chambres à l’adopter », a-t-il ajouté.

M. Biden et le chef républicain au Congrès, Kevin McCarthy, ont mis la dernière main dimanche à cet accord de principe sur le relèvement du plafond de la dette américaine, annoncé la veille après des négociations marathons et qui permet d’éloigner la menace d’un défaut de paiement à partir du 5 juin.

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Le leader républicain de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy

Mais l’accord doit recevoir l’aval d’un Congrès divisé et fait déjà l’objet d’une fronde d’élus progressistes et conservateurs, certains parlant d’une « capitulation ».

« Il ne satisfait peut-être pas tout le monde, mais c’est un pas dans la bonne direction auquel personne ne s’attendait », s’est défendu dimanche le leader républicain sur la chaîne Fox News.

Il a prédit qu’une « majorité » d’élus républicains voteraient pour le texte.

La Chambre des représentants, où les républicains disposent d’une fragile majorité de 222 contre 213, votera mercredi. Viendra ensuite le Sénat, contrôlé de peu par les démocrates (51-49).

Le chef des démocrates au Sénat, Charles Schumer, qui contrôle l’ordre du jour parlementaire, a d’ores et déjà prévenu s’attendre à des votes vendredi et samedi prochains, avant-veille de la date butoir d’un défaut de paiement.

« Continuons à aller de l’avant en respectant nos obligations et en construisant l’économie la plus forte de l’histoire du monde », a déclaré M. Biden, qui a toutefois admis n’avoir « aucune idée » si M. McCarthy disposait des voix suffisantes pour faire adopter le texte par le Parlement.

Kevin McCarthy a quant à lui estimé que l’accord était « tout à fait digne du peuple américain ».

« Victoire » pour Biden

Les marchés ont réagi avec soulagement lundi à l’annonce de l’accord. À la Bourse de Tokyo, l’indice Nikkei a gagné 1,53 % à l’ouverture.

Le texte de l’accord a été publié dimanche soir. Dans ses grandes lignes, il relève pendant deux ans, donc jusqu’après l’élection présidentielle de 2024, le plafond d’endettement public des États-Unis.

Celui-ci est actuellement fixé à 31 400 milliards de dollars.

Les dépenses non liées à la défense resteront inchangées l’année prochaine et n’augmenteront que nominalement en 2025.

L’accord prévoit par ailleurs une baisse de 10 milliards de dollars des fonds alloués aux services fiscaux pour se moderniser et renforcer les contrôles, ainsi que le recouvrement de fonds alloués à la lutte contre la COVID-19 et n’ayant pas encore été dépensés.

Le compromis inclut aussi de nouvelles conditions imposées pour bénéficier de certaines aides sociales, dont les coupons alimentaires.

« Globalement, l’accord représente plutôt une victoire pour Biden et les démocrates, car il contient des coupes budgétaires relativement limitées et évite un autre bras de fer pour le président durant le restant de son mandat », indique le politologue Nicholas Creel, en prédisant « in fine » son adoption au Congrès.

Crédit politique

MM. Biden et McCarthy jouent leur crédit politique dans cette affaire.

Le premier, qui est candidat à sa réélection, se doit d’éviter une banqueroute aux conséquences potentiellement catastrophiques. Le second cherche à asseoir son autorité après avoir été mal élu au perchoir en début d’année.

Le président Biden avait longtemps refusé de venir à la table des négociations, accusant l’opposition de prendre l’économie américaine en « otage », mais s’y était finalement résolu.

Reste qu’une alliance de circonstance entre élus progressistes et conservateurs pourrait tout faire dérailler.

Des républicains conservateurs ont déjà annoncé leur opposition au texte, comme le représentant Dan Bishop, qui a vilipendé M. McCarthy pour n’avoir « presque rien obtenu ».

Comme toutes les grandes économies ou presque, les États-Unis vivent à crédit.

Mais contrairement aux autres pays développés, les États-Unis butent régulièrement sur une contrainte juridique : le plafond de la dette, le montant maximal d’endettement du pays, qui doit être formellement relevé par le Congrès.

Cela a longtemps été une procédure législative de routine. Les républicains en ont fait un instrument de pression politique.