Devant un groupe de députés sceptiques, les grands patrons des principales chaînes d’alimentation au pays ont fermement rejeté mercredi les accusations voulant qu’ils profitent de la période inflationniste actuelle pour engranger des profits records tandis qu’un nombre croissant de Canadiens peinent à payer leur facture d’épicerie.

Invités à expliquer devant un comité parlementaire la hausse importante des prix des aliments au cours des derniers mois, les PDG de Métro inc, Éric La Flèche, de Loblaw, Galen G. Weston, et d’Empire Company Limited (IGA), Michael Medline, ont tenu essentiellement le même discours.

La hausse des prix des aliments est attribuable à une panoplie de facteurs sur lesquels ils ont peu de contrôle tels que le coût des transports, la pénurie de main-d’œuvre, la congestion dans les ports et la chute de la valeur du dollar canadien face à la devise américaine, entre autres choses.

Et si leurs compagnies affichent des bilans financiers en forte hausse, cela s’explique en bonne partie grâce aux services financiers, aux vêtements et aux ventes en pharmacies qu’elles détiennent, et non pas par une hausse des profits dans les épiceries, a notamment signalé Galen Weston.

« Les prix des aliments ont augmenté 25 fois plus vite que les bénéfices. Et chez Loblaw, aucun de ces bénéfices ne provenait de marges plus élevées. Les prix de détail n’ont pas augmenté plus rapidement que nos coûts. L’idée que les chaînes d’alimentation sont à l’origine de l’inflation alimentaire n’est pas seulement fausse, c’est impossible, peu importe le nombre de fois que vous lisez cela sur Twitter », a déclaré M. Weston.

Il a affirmé à plus d’une reprise devant les élus que la compagnie qu’il dirige empoche un dollar de profit sur un panier d’épicerie de 25 $. Même en enlevant ce dollar de profit, le panier resterait quand même à 24 $ a-t-il fait valoir.

Il a aussi soutenu que Loblaw fait tout en son possible pour limiter la hausse des coûts des aliments, rappelant au passage le gel des prix d’une durée limitée au début de l’année dans les épiceries à rabais comme Maxi et No Frills.

« La forte inflation que nous connaissons est une réalité mondiale. Mais le Canada s’en sort mieux que la plupart des autres pays du G7. Il n’y a aucun doute que le prix des aliments a augmenté en raison de la hausse des coûts des fournisseurs et des producteurs. La pandémie, la guerre en Ukraine, les conditions météorologiques défavorables et les enjeux reliés au transport et à la main-d’œuvre sont parmi les nombreux facteurs qui contribuent à la hausse des prix », a affirmé de son côté le PDG de Métro Eric La Flèche.

Selon Statistique Canada, les prix des aliments achetés en épiceries ont augmenté de près de 10 % en 2022. Il s’agit de la hausse la plus rapide depuis 1981. L’augmentation des prix a touché toutes les catégories d’aliments, à l’exception du saumon en boîte. En janvier, l’augmentation a atteint 11,4 % comparativement au même mois l’an dernier, soit le double du taux d’inflation pour l’ensemble des secteurs (5,9 %).

Les explications des grands patrons n’ont pas semblé convaincre les élus. À tour de rôle, ils ont mis en relief les profits records qu’ont engrangés les grandes chaînes d’alimentations en 2022 au moment où plusieurs Canadiens peinent joindre les deux bouts.

Le chef du NPD, Jagmeet Singh, s’est montré particulièrement incisif dans plusieurs des échanges qu’il a eus avec le PDG de Loblaw. « Vous réalisez des profits sans précédent alors que les gens éprouvent des difficultés. Comment pouvez-vous réconcilier vos profits records qui dépassent le million de dollars par jour avec ce que vous dites ? J’ai plus de 2000 personnes qui m’ont envoyé leurs questions et qui disent qu’ils sont dans la misère », a notamment lâché M. Singh. « Vos explications ne vont pas leur donner beaucoup de réconfort ».

M. Weston a riposté que son entreprise a rejeté une hausse des coûts équivalant à 500 millions de dollars l’an dernier.

« Des profits raisonnables sont un élément important dans l’exploitation d’une entreprise prospère. Je pense qu’un dollar de profit sur un panier de 25 $ est un profit raisonnable », a-t-il insisté. Il a aussi affirmé que les profits sont réinvestis dans la construction de nouveaux marchés d’alimentation, entre autres, ce qui crée des emplois.

À la fin de la rencontre, les députés ont adopté une motion invitant les dirigeants de Costco et de Walmart à comparaître devant le comité.