Pour pourvoir un poste sur cinq vacant par l’immigration, comme le recommande Québec, il faudrait que 90 000 immigrants de plus choisissent de s’établir en région d’ici 2025. Le défi s’annonce gigantesque alors qu’une étude de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) dénonce la lourdeur administrative et la rareté du logement pour attirer ces travailleurs à l’extérieur de Montréal.

75 %

Proportion des immigrants au Québec qui ont choisi de s’établir à Montréal durant la période 2015-2019, pour une moyenne de 37 260 immigrants par année sur un total de 49 233.

1 439 200

Nombre de postes à pourvoir pour la période 2021-2030, selon les prévisions d’Emploi-Québec. On estime que les personnes immigrantes pourvoiront 19 % de ces postes d’ici 2025, un taux qui augmente à 22 % par la suite jusqu’en 2030. La FCEI a retenu une moyenne de 20 % pour son analyse.

Déficit en région

Actuellement, « 68 % des postes vacants se trouvent en dehors de la région de Montréal, mais le reste du Québec n’accueille que 25 % des immigrants », note l’étude de la FCEI. « Il est évident qu’avec la moyenne des immigrants reçus actuellement dans la plupart des régions, pourvoir 1 poste sur 5 par cette voie est utopique à moins d’un virage important en faveur de la régionalisation de l’immigration, note par communiqué Francis Bérubé, directeur des affaires provinciales de la FCEI et auteur de l’étude. Nos régions sont celles qui vont encaisser le plus durement les effets de la pénurie de main-d’œuvre au cours des prochaines années si rien ne change. »

Par un croisement des statistiques officielles sur la pénurie de main-d’œuvre et de la région d’établissement des immigrants, M. Bérubé a dressé un portrait très précis de ce déficit des régions en matière d’immigration. On considère que chaque région devrait combler 20 % de sa pénurie de main-d’œuvre par l’immigration. D’entrée de jeu, deux des 16 régions administratives analysées, Montréal et Laval, ne sont pas touchées par ce déficit. Avec 79 660 postes vacants en 2022, par exemple, Montréal reçoit environ 37 000 immigrants chaque année, soit 46 %, bien au-delà des 20 % recommandés.

Dans les autres régions, c’est la Montérégie qui affichera le plus important déficit d’ici 2025, avec un manque prévu de 24 225 pour atteindre ce seuil de 20 %.

Au total, si rien n’est fait, l’étude de la FCEI établit un « déficit annuel » d’immigrants en région de 17 988 personnes, soit 89 940 pour la période 2021-2025. « La régionalisation de l’immigration est un dossier névralgique et indispensable pour assurer un avenir économique prospère pour toutes nos régions, déclare par communiqué François Vincent, vice-président pour le Québec à la FCEI. Le gouvernement du Québec doit le prioriser. »

Les obstacles

Les propriétaires québécois de PME en région sondés en octobre 2022 par la FCEI le confirment : 80 % estiment que l’adoption de mesures pour attirer les immigrants dans les régions afin de réduire les effets de la pénurie de main-d’œuvre locale « était une haute, voire une très haute, priorité ». À la même question, en janvier 2021, ils étaient 59 % à choisir cette réponse.

Quand on leur demande quels sont les principaux obstacles pour attirer les immigrants dans leur région, 571 membres de la FCEI interrogés en ligne en octobre 2022 choisissent d’abord les tracasseries administratives. Dans une proportion de 43 %, ils estiment que la « paperasse » et les « délais associés à l’embauche de travailleurs étrangers » sont le premier obstacle, suivi de la disponibilité des logements, nommée par 38 % des répondants. Les coûts financiers associés à l’embauche de travailleurs étrangers (27 %), l’accès à des organisations pour trouver ces travailleurs (23 %) et le manque de ressources spécialisées pour l’accueil (23 %) sont les autres principaux obstacles évoqués.