La Banque du Canada n’a pas encore baissé les bras dans son combat contre l’inflation. Mais sa plus récente augmentation de 50 points de base du taux directeur, mercredi, pour un total de 400 points de hausse depuis mars dernier, est peut-être la dernière.

Est-ce que la hausse du 7 décembre est vraiment la dernière ?

C’est possible. C’est du moins ce que laisse entendre la Banque du Canada dans son communiqué de mercredi. Pour la première fois depuis qu’elle a entrepris de lutter contre la hausse des prix, la banque centrale n’annonce pas d’autres augmentations des taux d’intérêt. La formule « le Conseil de direction s’attend à ce que le taux directeur doive encore augmenter » de sa précédente annonce a été remplacée par « à l’avenir, le Conseil de direction évaluera s’il est nécessaire de relever encore le taux directeur ».

Pour la plupart des économistes, c’est un changement de ton important qui indique la fin des hausses de taux d’intérêt. « À nos yeux, il y a de bonnes chances que cette hausse de taux soit la dernière de la Banque », estiment Taylor Schleich et Warren Lovely, de la Banque Nationale.

Autre indice qui va dans le même sens, la Banque du Canada reconnaît que des progrès sont en cours sur le front de l’inflation. « Les pressions sur les prix pourraient être en train de s’alléger », avance-t-elle.

Qu’est-ce qui influencera la prochaine décision sur les taux ?

La prochaine décision de la Banque du Canada sur les taux d’intérêt sera annoncée le 25 janvier. D’ici là, deux rapports sur l’indice des prix à la consommation, pour novembre et décembre, et un portrait du marché de l’emploi en décembre seront publiés par Statistique Canada. Ces nouvelles données seront déterminantes pour la Banque du Canada. Actuellement, la banque centrale juge que le taux d’inflation de 6,9 % est encore trop élevé, que l’économie est toujours en surchauffe et que le marché de l’emploi est trop tendu, avec un taux de chômage tout près de son creux historique.

« L’évolution à court terme de l’économie et de l’indice des prix à la consommation déterminera si une autre hausse de 25 points de base est nécessaire ou non », explique Sébastien Lavoie, économiste en chef de la Banque Laurentienne.

Chose certaine, selon lui, d’autres grosses augmentations de 50 points de base sont à exclure et la probabilité est faible qu’une autre augmentation de 25 points de base soit nécessaire en janvier.

Avec cette nouvelle augmentation des taux, le risque de récession est-il plus élevé ?

Pour le Québec, la réponse est oui, selon Desjardins : le recul de l’Indice précurseur Desjardins (IPD) émet un signal clair de ralentissement. « L’économie du Québec subira une détérioration importante et la première moitié de 2023 sera particulièrement difficile », estime Hélène Bégin, économiste principale chez Desjardins.

« Presque tous les indicateurs qui entrent dans le calcul de l’IPD sont fortement négatifs », précise Desjardins, ce qui lui fait croire à une récession « imminente ».

Au Québec comme au Canada, l’économie n’a pas encore encaissé la totalité du choc des hausses successives des taux d’intérêt cette année. Même si la croissance du produit intérieur brut du troisième trimestre a été deux fois plus élevée que ce que prévoyait la Banque du Canada et que le dernier trimestre de l’année devrait aussi être meilleur que prévu, le pire de l’impact des hausses de taux est encore à venir, selon Marc Désormeaux, économiste principal chez Desjardins.

M. Désormeaux s’attend à un ralentissement plus prononcé que la croissance « pratiquement stagnante » prévue par la Banque du Canada au début de 2023. Les secteurs les plus sensibles aux taux d’intérêt, comme l’immobilier, montrent déjà des signes de faiblesse et « ce sera encore plus difficile pour ces secteurs l’an prochain ».

Quel est l’impact de la hausse du taux directeur ?

Les hausses de taux d’intérêt visent à ralentir une économie qui peine à fournir à la demande de biens et services et qui manque de main-d’œuvre, ce qui se traduit par une hausse généralisée des prix. Chaque hausse du taux directeur a un impact immédiat sur tous les emprunts à taux variables comme les prêts auto, les prêts personnels, les marges de crédit et les prêts hypothécaires. Depuis la hausse de mercredi, donc, le coût de ces emprunts a été majoré de 50 points de base.

L’augmentation est particulièrement douloureuse pour les détenteurs de prêts hypothécaires à taux variable, qui ont encaissé des hausses de 400 points de base depuis le mois de mars dernier.

Un propriétaire qui aurait contracté au début de l’année un emprunt hypothécaire de 458 000 $ au taux variable de 0,9 % amorti sur 25 ans a donc vu ses paiements mensuels bondir de 933 $ par mois, selon le calcul de ratehub. ca.

Durant l’année 2021 et une partie de 2022, les taux hypothécaires variables étaient beaucoup plus bas que les taux hypothécaires fixes. Selon la Banque du Canada, les prêts hypothécaires à taux variable représentent actuellement 33 % de la dette hypothécaire totale au Canada.