Le rythme annuel d’augmentation de l’indice des prix à la consommation (IPC) a ralenti en août pour le deuxième mois d’affilée, a fait savoir Statistique Canada mardi. Après une hausse de 7,6 % en juillet, la croissance annuelle des prix s’établit à 7 %. D’un mois à l’autre, l’IPC a diminué de 0,3 %, sa plus forte baisse depuis 2020, ce qui semble indiquer que les hausses successives des taux d’intérêt commencent à porter leurs fruits. Le point en quatre questions.

Est-ce que l’inflation a commencé un retour vers la cible de 2 % ?

Le ralentissement plus prononcé que prévu de l’IPC en août pourrait être un tournant dans la lutte contre l’inflation, estiment plusieurs économistes. Certains y voient un signe que la politique monétaire de la Banque du Canada commence à porter ses fruits.

« Le resserrement des conditions monétaires commence à marteler l’inflation », croit Sébastien Lavoie, économiste en chef de la Banque Laurentienne. Il prévoit que ce recul n’est pas une anomalie et qu’il se poursuivra au cours des prochains mois.

Le chemin est encore long, mais « l’inflation au Canada a fait un pas dans la bonne direction en août », a commenté pour sa part Leslie Preston, économiste en chef de la Banque TD.

La Banque du Canada a augmenté cinq fois son taux directeur, pour un total de 300 points de base, depuis le début de l’année. Il s’établit maintenant à 3,25 %. L’effet de ces hausses commence seulement à se faire sentir dans l’économie, souligne l’économiste, qui prévoit lui aussi que la croissance des prix continuera de ralentir au cours des prochains mois.

Pourquoi y a-t-il des raisons d’être optimiste ?

Parce que le ralentissement de la croissance des prix n’est pas dû uniquement à la baisse du prix de l’essence, contrairement à ce qui se passe aux États-Unis. À part le prix des aliments, qui continue d’augmenter au rythme inquiétant de plus de 10 %, la croissance des prix de la plupart des biens et des services montre des signes d’apaisement. Sans l’essence, la croissance des prix d’une année à l’autre s’établit à 6,3 %, comparativement à 6,6 % en juillet. « Il s’agit du premier mois où l’IPC sans l’essence affiche un ralentissement d’une année à l’autre depuis juin 2021 », souligne Statistique Canada.

À part l’IPC, la moyenne des autres mesures de l’inflation plus spécifiques que suit la Banque du Canada a aussi ralenti en août, et cette moyenne se situe maintenant à son niveau le plus bas depuis avril 2022.

Les économistes de la Banque Nationale Alexandra Ducharme et Kyle Dahms soulignent que la baisse du prix de l’essence fera baisser le prix des autres composantes de l’IPC et que l’inflation dans les services est aussi en recul.

À quand une baisse des prix des aliments ?

Le prix des aliments continue d’augmenter rapidement. La hausse de 10,8 % en août pour les aliments achetés en magasin est la plus importante depuis 1981, observe Statistique Canada. D’une année à l’autre, les produits dont le prix a le plus augmenté sont la boulangerie (+ 15,4 %), les condiments, épices et vinaigres (+ 17,2 %) et les fruits frais (+ 13,2 %).

Le prix des aliments ne réagit pas à l’augmentation des taux d’intérêt, explique Sébastien Lavoie, mais à d’autres facteurs comme les conditions climatiques extrêmes (sécheresses ou inondations) et les perturbations des chaînes d’approvisionnement.

La baisse des prix du pétrole, si elle se poursuit, pourrait ralentir la hausse des prix des aliments pour lesquels le coût du transport est important. Par ailleurs, l’amélioration dans le fonctionnement des chaînes d’approvisionnement et la baisse des prix de certaines céréales de base devraient finir par avoir un effet jusque sur les tablettes des épiceries.

D’autres hausses de taux d’intérêt sont-elles nécessaires ?

Oui. À plus de 5 %, la mesure moyenne de l’inflation de base reste plus de deux fois plus élevée que la cible de 2 % de la Banque du Canada. Il est beaucoup trop tôt pour que la Banque du Canada déclare « mission accomplie », estime Randall Bartlett, directeur principal chez Desjardins. Il croit que les autorités monétaires maintiendront la ligne dure et qu’une augmentation de 50 points de base est au menu du 26 octobre prochain, ce qui porterait le taux directeur à 3,75 %.

Toutefois, comme les mesures de l’inflation sont plus basses que ce que prévoyait la Banque du Canada, le rythme d’augmentation des taux pourrait ralentir après la prochaine hausse, selon Desjardins.

À la Banque TD et à la Banque Laurentienne, les économistes prévoient que le taux directeur devrait atteindre 4 % ou un peu plus, avant de se stabiliser.