Pour la deuxième plus importante cryptomonnaie au monde, l’ethereum, le temps de la « Fusion » avec un grand F est arrivé. Dans la nuit de mercredi à jeudi, on prévoit un changement radical de la gestion des transactions qui ferait baisser sa consommation électrique gargantuesque de 99,5 %. Quatre questions pour comprendre cette innovation, « le plus importante pour les cryptomonnaies des dernières années », selon un expert.

Qu’est-ce que la « Fusion » ?

Depuis le 1er décembre 2020, la communauté Ethereum prépare une transformation radicale. Cette nouvelle méthode pour vérifier l’intégrité du registre de l’ethereum, ce qu’on appelle une « chaîne de blocs », a dans un premier temps été testée dans un système parallèle, sans toucher au réseau principal. Dans la nuit de mercredi à jeudi, à un moment défini par un calcul complexe appelé « Difficulté terminale totale », ce système parallèle et expérimental doit être fusionné avec le réseau principal. « Avec la chaîne phare, la communauté a construit un nouveau moteur et une coque renforcée, explique-t-on sur Ethereum. org. Quand il sera temps, le vaisseau actuel s’arrimera à ce nouveau système, fusionnant en un seul vaisseau, prêt à parcourir des années-lumière et à s’emparer de l’univers. »

Pourquoi faut-il un changement ?

Comme le bitcoin créé en 2009, l’ethereum né six ans plus tard est une monnaie électronique dont les transactions sont enregistrées dans un registre décentralisé de plus en plus gros, appelé « chaîne de blocs » ou blockchain en anglais. Des millions d’ordinateurs détenus par des « mineurs » ont la tâche de vérifier continuellement l’intégrité de ce registre et de ses transactions. Ils sont récompensés de ce travail en recevant des bitcoins ou des ethers. Ce salaire est appelé « preuve de travail ».

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Martin Lalonde, président et gestionnaire de portefeuille chez Rivemont.

Les cryptomonnaies ayant été conçues pour copier les ressources naturelles comme l’or, elles sont de plus en plus rares et difficiles à miner. Le résultat, c’est que le minage de l’ethereum engouffre aujourd’hui des ressources immenses en électricité, plus de 112 TWh par année, la moitié de la production d’Hydro-Québec. Pourquoi cette activité est-elle si énergivore ? « Des milliers d’ordinateurs se battent pour trouver la réponde et le gagnant est récompensé, explique Martin Lalonde, président et gestionnaire de portefeuille chez Rivemont. Il y a beaucoup d’énergie dépensée pour rien, des milliards de dédoublements. »

En quoi consiste la nouvelle méthode ?

« On fait le ménage dans les efforts inutiles », résume M. Lalonde. Les millions de mineurs sont remplacés par beaucoup moins de « valideurs », qui doivent posséder au moins 32 ethers, d’une valeur d’environ 67 000 $, qui sont mis en dépôt de garantie. Ce sont ces valideurs qui s’assurent dorénavant de l’intégrité du registre avec un logiciel. Les mineurs classiques n’auront plus de travail. De la « preuve de travail », on passe à ce qu’on appelle la « preuve d’enjeu », la traduction française proposée par Ethereum. org. La formule « preuve de participation », proposée par certains sites français, a l’avantage d’être plus claire.

La transformation, espère-t-on, permettra de réduire de 99,5 % la consommation électrique, ce qui ne sera démontré qu’à l’usage.

N’est-ce pas risqué ?

Toucher à un système financier où 120 millions d’ethers sont en circulation, pour une valeur totale de 252 milliards, est évidemment audacieux. On assure que les détenteurs actuels n’ont rien à faire pour protéger leurs avoirs, les contrats resteront enregistrés dans la chaîne de blocs et les transactions continueront d’être effectuées sans changement notable.

Les premiers risques, soulignent nombre d’experts, concernent les fraudeurs qui pourraient profiter de la transition pour effrayer les détenteurs et proposer des protections malhonnêtes.

Quant à la transition elle-même, on se montre d’un optimisme prudent chez Rivemont. « C’est l’innovation le plus importante pour les cryptomonnaies des dernières années, estime Martin Lalonde. C’est une avancée qui sera spectaculaire si elle est fonctionne, décevante si elle ne se réalise pas. » On ne compte pas modifier la composition du Fonds Rivemont Crypto, dont le tiers est composé d’ethers. « On est confortables avec notre position à long terme. En finance, s’il n’y a pas de risque, il n’y a pas de rendement. »