Le taux d’inflation au Canada a ralenti à 7,6 % en juillet, en baisse par rapport au taux de 8,1 % qui avait été mesuré en juin.

Au Québec, le taux d’inflation s’est replié à 7,3 % en juillet, comparativement au taux de 8 % mesuré en juin.

Selon Statistique Canada, la décélération de l’inflation est surtout attribuable à la baisse des prix de l’essence de juin à juillet.

Si on exclut l’essence, les prix des biens et services de consommation, en particulier les aliments et boissons, ont encore augmenté de 6,6 % d’une année à l’autre en juillet, après avoir augmenté de 6,5 % en juin.

De l’avis d’économistes, cela indique que les pressions haussières sur l’ensemble des prix sont demeurées généralisées en juillet.

Par conséquent, ce repli de l’inflation s’annonce insuffisant pour dissuader la Banque du Canada de poursuivre sa forte remontée des taux d’intérêt.

« Pour la première fois depuis juin 2021, le taux d’inflation annuel est inférieur à celui du mois précédent. Mais l’heure n’est pas à la complaisance », avertit Royce Mendes, directeur général et chef de la stratégie macroéconomique chez Desjardins.

« Malgré le ralentissement de l’inflation, elle demeure beaucoup trop élevée, et la croissance des prix demeure généralisée. En juillet seulement, plus de 75 % des composantes du panier [de l’indice des prix à la consommation ou IPC] ont augmenté de plus de 3 % sur une base annuelle, et plus de la moitié ont augmenté de plus de 5 %. »

« Les consommateurs et les entreprises canadiens peuvent considérer l’annonce d’un repli de l’inflation en juillet comme une bonne nouvelle, mais ils doivent quand même tenir compte des conséquences des prix encore plus élevés », constate Kiefer Van Mulligen, économiste au Conference Board du Canada.

Par ailleurs, les tensions socioéconomiques et les revendications salariales suscitées par l’inflation élevée continuent de s’amplifier. Manifestement, l’été de notre mécontentement inflationniste n’est pas encore terminé.

Kiefer Van Mulligen, économiste au Conference Board du Canada

Chez BMO Marchés des capitaux, l’économiste en chef et directeur général, Douglas Porter, estime que « ce rapport sur l’inflation est clairement un pas dans la bonne direction », mais que « le parcours [vers la cible de la Banque du Canada] s’annonce encore long ».

« L’économie canadienne a peut-être enfin dépassé le pic d’inflation, à condition que les prix du pétrole ne redeviennent pas fous. Mais il est aussi probable que l’inflation reste stable à près de 8 % d’ici la fin de cette année avant de vraiment baisser en 2023 », ajoute-t-il.

Les aliments encore en forte hausse

Entre-temps, qu’est-ce qui accroche dans ce rapport d’un repli de l’inflation ?

À la Banque Nationale, les économistes Jocelyn Paquet et Alexandra Ducharme résument ainsi leurs observations.

« L’inflation globale a décéléré en juillet, comme on s’y attendait, en grande partie grâce à la diminution mensuelle des prix de l’essence [de juin à juillet] », écrivent-ils dans une note aux clients de la Banque Nationale.

« D’autres catégories ont également contribué à la baisse, comme les transports – en plus forte baisse mensuelle depuis avril 2020 – ainsi que les vêtements et chaussures, en plus forte baisse mensuelle depuis septembre 2020. »

En contrepartie, soulignent les économistes de la Banque Nationale, « les prix des aliments ont continué leur ascension en juillet pour atteindre leur plus gros gain annuel depuis 1982. Également, les loyers ont enregistré une autre forte progression mensuelle qui s’est traduite par un gain annuel de 4,9 %, le plus important depuis 1989 ».

Hausses de taux ?

Dans ce contexte, quelles sont les perspectives pour la suite de la remontée des taux d’intérêt par la Banque du Canada ?

Du point de vue de Royce Mendes, chez Desjardins, « lorsque l’on exclut les aliments et l’énergie, l’inflation [fondamentale] demeure presque trois fois plus élevée que la cible de 2 % de la Banque du Canada ». Ainsi, il « reste d’avis qu’elle relèvera ses taux de 50 points de base en septembre ».

À la Banque TD, l’économiste principale Leslie Preston juge « encourageant que l’inflation globale ait évolué dans la bonne direction en juillet ».

Mais étant donné que « les mesures de l’inflation de base ont encore progressé à un rythme supérieur à 5 % », l’économiste estime que « la Banque du Canada a encore du travail à faire pour réduire les pressions inflationnistes ».

« Je m’attends donc à ce qu’elle continue de relever son taux directeur par au moins 50 points de base [0,5 point de pourcentage] lors de sa prochaine annonce dans trois semaines », indique Mme Preston.

À la Banque Nationale, les économistes Jocelyn Paquet et Alexandra Ducharme constatent aussi que « bien que [les données de juillet] suggèrent que le pire est derrière nous, l’inflation reste trop élevée. Ce qui devrait inciter la Banque du Canada à hausser de 75 points de base [0,75 point de pourcentage] son taux directeur en septembre ».

Néanmoins, ils anticipent que « ça se compliquera ensuite » pour la Banque du Canada, alors que « la croissance économique devrait ralentir avec la réduction de la demande et l’affaiblissement du marché immobilier ».

Dans ce contexte, estiment les économistes de la Nationale, « un autre resserrement de la politique monétaire [hausse de taux] pourrait s’avérer contre-productif, ce qui nous porte à croire que la Banque du Canada fera une pause [après la hausse de septembre] pour mesurer les effets des mesures prises jusqu’à présent ».

Biens et services les plus touchés

(en juillet 2022, variation de prix sur un an)

Transport aérien : + 57,7 %

Essence : + 35,6 %

Œufs : + 15,8 %

Café : + 14,5 %

Produits de boulangerie : + 13,6 %

Appareils électroménagers : + 11,5 %

Source : Statistique Canada