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Où vont les profits faramineux des grossistes en fruits de mer ? Soit la différence entre le prix payé aux pêcheurs et le prix demandé aux consommateurs, par exemple pour le crabe et le homard ?

Lucette Durand

« Ce n’est jamais facile de dire qui empoche les profits », répond d’emblée Jean Côté, biologiste et directeur scientifique du Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie. Il y a des cas où il n’y a pas de « profits faramineux », tient-il à souligner.

À titre d’exemple, M. Côté rappelle qu’au début de la saison de pêche aux homards, le pêcheur recevait 8 $ la livre pour ses prises et son prix affiché en supermarché était de 8,77 $.

« Il y a beaucoup de cas différents. Ce n’est jamais noir ou blanc », ajoute-t-il. Un point de vue partagé par Gabriel Bourgault-Faucher, chercheur à l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC).

« Je ne suis pas dans le secret des dieux. Je ne connais pas les marges de tous les intermédiaires des chaînes d’approvisionnement, reconnaît-il. Mais il y a un biais dans cette question-là. On suppose que les grossistes font des profits faramineux. Mais les grossistes ne touchent pas toujours aux poissons et fruits de mer. Il y a des pêcheurs qui vendent directement à des restaurants ou à des transformateurs. »

Oui, il y a des profits tout au long de la chaîne, ce qui est normal. Est-ce qu’il y a vraiment des maillons qui s’en mettent plus que d’autres dans les poches ? On n’a pas les données pour y répondre.

Gabriel Bourgault-Faucher, chercheur à l’Institut de recherche en économie contemporaine

« C’est difficile pour moi de dire qui s’en met plein les poches. Ce n’est pas nous », tient à assurer Marc-Antoine Fortier, propriétaire des Pêcheries Océanic, entreprise importatrice de poissons. « Les marges restent les mêmes. Tout coûte plus cher. »

Il rappelle notamment l’explosion des prix des conteneurs. Avant la pandémie, M. Fortier payait de 7000 à 8000 $ US un conteneur réfrigéré. Aujourd’hui, il doit débourser 30 000 $ US.

Différence de prix

Pourquoi y a-t-il une différence de prix entre ce qui est payé au pêcheur et celui affiché à la poissonnerie et à l’épicerie ? « Ça vient du fait qu’il y a plusieurs intermédiaires qui, à chaque étape, ont leurs frais d’exploitation », souligne pour sa part M. Bourgault-Faucher.

Le pêcheur doit entretenir son bateau et payer ses aides-pêcheurs. Les transformateurs doivent aussi rémunérer leurs employés, entretenir leur bâtisse, payer les coûts fixes. Et à cela s’ajoutent les frais de transport.

L’offre et la demande

L’offre et la demande viennent évidemment jouer dans l’équation, comme dans le cas du crabe des neiges, dont le prix a atteint des sommets au début de la saison qui s’est amorcée en mars. La Presse rapportait alors que les premiers arrivages s’étaient vendus à plus de 38 $ la livre pour le crabe cuit à Montréal, contre 26 $ l’an dernier.

« Son prix est fixé sur les marchés internationaux. Le crabe est principalement vendu aux États-Unis », explique Gabriel Bourgault-Faucher, qui ajoute que 70 % du crabe pêché au Québec est expédié chez nos voisins du Sud.

L’inflation, le prix du carburant et l’absence de crabes en provenance de Russie, un important exportateur, ont eu une incidence sur le prix payé par les amateurs.

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