(Ottawa) La Banque du Canada est toujours sur la bonne voie pour annoncer mercredi une importante hausse de taux d’intérêt, même si les dernières données de Statistique Canada ont montré que la croissance économique du pays avait ralenti au premier trimestre, ont estimé des économistes.

L’agence fédérale a indiqué mardi que le produit intérieur brut (PIB) réel avait crû à un taux annualisé de 3,1 % au premier trimestre, soutenu par les investissements des entreprises et les dépenses des ménages.

Cette progression était moins prononcée que celle de 6,6 % enregistrée au quatrième trimestre de 2021. Les volumes d’exportation ont chuté de 2,4 % au cours du plus récent trimestre, après avoir grimpé lors des deux trimestres précédents, en partie en raison de la diminution du commerce des produits énergétiques.

Paul Ashworth, économiste en chef pour l’Amérique du Nord chez Capital Economics, a souligné que la croissance pour les trois premiers mois de l’année était bien inférieure à la prévision consensuelle, mais qu’elle restait globalement conforme au rapport sur la politique monétaire d’avril de la Banque du Canada.

« La faiblesse inattendue de la croissance du PIB au premier trimestre était principalement attribuable à une révision à la baisse des données de janvier, qui montrent désormais une contraction de 0,2 % d’un mois à l’autre, car les restrictions liées (au variant) Omicron ont eu un impact plus important qu’on ne le pensait auparavant », a observé M. Ashworth dans un rapport.

Cependant, il a ajouté que l’économie réelle s’appuyait toujours sur une base solide, ce qui signifie que la Banque du Canada peut aller de l’avant avec une augmentation de son taux directeur d’un demi-point de pourcentage mercredi.

La plupart des économistes s’attendent à ce que la banque centrale relève son objectif de taux d’intérêt directeur d’un demi-point de pourcentage pour le porter à 1,5 %, dans le but de ralentir la plus forte inflation connue par le pays en trois décennies.

L’inflation annuelle a atteint 6,8 % en avril, son niveau le plus élevé depuis janvier 1991, tandis que la Banque du Canada a pour objectif de la maintenir le plus près possible de 2,0 %.

La banque centrale, qui a abaissé les taux d’intérêt au début de la pandémie, a commencé à relever son taux directeur plus tôt cette année, avec une hausse d’un quart de point en mars et une autre d’un demi-point de pourcentage en avril.

La croissance globale du premier trimestre s’est produite alors que l’économie a avancé de 0,7 % en mars. Statistique Canada a précisé que sa lecture préliminaire pour avril annonçait une croissance économique de 0,2 % pour le mois, mais a prévenu que ce chiffre serait révisé lors de la publication de ses données officielles, le 30 juin.

L’économiste Tu Nguyen, de RSM Canada, a souligné que les chiffres du premier trimestre, inférieurs aux attentes, ne changeraient probablement rien pour la Banque du Canada, puisque la croissance est toujours solide.

« Et lorsque nous observons les chiffres sur les exportations au premier trimestre, nous constatons que la demande intérieure des entreprises et des consommateurs est toujours très solide, et je pense que c’est là-dessus que la Banque du Canada va appuyer sa décision », a-t-elle noté.

Mme Nguyen a ajouté que les restrictions contre la COVID avaient continué de s’assouplir, de sorte que le secteur des services continuera probablement à se redresser à mesure que les choses reviendront à pleine capacité.

Croissance dans plusieurs secteurs

Selon Statistique Canada, les dépenses des ménages ont augmenté de 0,8 % au premier trimestre, enregistrant une troisième augmentation trimestrielle consécutive.

Les dépenses en biens durables ont augmenté de 2,6 % au premier trimestre, grâce à une augmentation de 16,1 % des dépenses en véhicules automobiles neufs et à une hausse de 3,5 % pour les camions, fourgonnettes et véhicules utilitaires sport neufs.

Cependant, Statistique Canada a noté que malgré les augmentations, les dépenses pour les véhicules automobiles étaient restées inférieures à leurs niveaux prépandémiques, car les problèmes de chaîne d’approvisionnement ont continué de nuire à ce secteur.

La construction résidentielle a progressé de 4,3 %, les dépenses de rénovation ayant augmenté de 9,3 %, les coûts de revente de 4,6 % et la construction de logements neufs de 0,2 %.

Les investissements des entreprises dans les bâtiments non résidentiels ont augmenté de 2,9 % et ceux dans les machines et le matériel, de 0,9 % au cours du trimestre, tandis que les dépenses en ouvrages de génie ont augmenté de 3,5 %.

Statistique Canada a également indiqué que la rémunération des employés avait augmenté de 3,8 % sur une base nominale pour le trimestre. En excluant le troisième trimestre de 2020, l’agence fédérale a noté qu’il s’agissait de la plus forte augmentation trimestrielle depuis le deuxième trimestre de 1981.

L’agence a ajouté qu’une croissance significative des salaires avait été observée dans l’ensemble de l’économie, y compris dans les services professionnels et personnels, le commerce, la fabrication, les soins de santé et l’assistance sociale et les industries de la construction.

Mme Nguyen a estimé que la Banque du Canada craignait que des salaires plus élevés n’entraînent une inflation persistante.

« Ce n’est pas du tout ce que veut la banque, alors ils essaieront d’entraver cela et de contrôler les anticipations d’inflation à long terme », a-t-elle prédit.