Les automobilistes de la grande région de Montréal ont eu une mauvaise surprise vendredi matin : de Mirabel à Salaberry-de-Valleyfield en passant par Laval, Longueuil et le Plateau Mont-Royal, le coût du litre d’essence a franchi la barre des 2 $.

Selon la Régie de l’énergie, il fallait payer en moyenne précisément 202,7 cents, un sommet, dans l’Ouest-de-l’Île de Montréal, à Dollard-des-Ormeaux et Dorval. Dans les autres secteurs touchés, les prix variaient de quelques décimales au-dessus des 2 $.

Il s’agit de hausses d’environ 8 cents le litre par rapport aux prix enregistrés lundi dernier.

Seule exception notable dans la grande région montréalaise, toujours selon le relevé de la Régie de l’énergie, on a établi une moyenne de 196,9 cents dans les secteurs d’Anjou et de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles. Dans tous les cas, il s’agit d’un prix inférieur à celui que CAA-Québec estime « réaliste », en tenant compte du coût d’acquisition et de la marge de profit des détaillants, dans sa section Info Essence. Pour Montréal, en date de vendredi, ce prix réaliste est de 202,8 cents.

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« Ça fait mal au portefeuille », dit Érika Lepage, rencontrée alors qu’elle fait le plein à une station de Petro-Canada de l’avenue Papineau, dans Villeray. Elle doit conduire environ 40 km tous les jours pour le travail, donc « c’est sûr que moi ça m’affecte quand même beaucoup ».

« Ça me coûtait 45 $ avant pour faire le plein, maintenant ça coûte 110 $, 120 $ », observe un homme qui se présente simplement comme Armando. « Parfois, je veux aller quelque part, mais je pense toujours à l’essence […] et le gouvernement n’aide pas, pas comme en Ontario », soupire-t-il, où les progressistes-conservateurs de Doug Ford ont réduit temporairement les taxes sur l’essence et le diesel.

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Suzanna Aguilar ne met que ce dont elle a « vraiment besoin » dans son réservoir aujourd’hui, alors que le prix à la pompe est affiché à un peu plus de 2,01 $ le litre à cette station. « Je vais attendre que ça descende avant de faire le plein », dit-elle.

« Les indicateurs pétroliers sont en forte progression depuis quelques semaines et les hausses qui s’enchaînent constituent d’ailleurs de nouveaux records dans toutes les régions du Québec, autant que nous sachions », indique Nicolas Ryan, directeur Affaires publiques au CAA-Québec.

À l’heure actuelle, il demeure impossible de savoir combien de temps cette situation durera.

Nicolas Ryan, directeur Affaires publiques au CAA-Québec

Selon la Régie de l’énergie, le prix minimal de l’essence pour les détaillants dans l’agglomération de Montréal est de 189,7 cents. L’essentiel de ce montant est le prix payé pour le chargement, de 132,36 cents, auquel il faut ajouter 29,20 cents en taxe d’accise fédérale et en taxe sur les carburants provinciale (TCP), ainsi que les taxes de vente.

Ailleurs au Québec, les prix de l’essence ont généralement grimpé au cours de la semaine, mais se sont maintenus sous les 2 $ le litre. C’est à Saguenay qu’on profite du meilleur prix, soit 187,9 cents.

Pas comme en 1973 et 1979

Pour George Iny, directeur de l’Association pour la protection des automobilistes (APA), ces hausses devraient amener les consommateurs à reconsidérer leurs choix de véhicules. « On est “gaspilleux”, tranche-t-il. On pourrait tous rouler dans des voitures qui consomment 6 litres aux 100 km ; on serait un peu plus à l’abri de la montée en flèche du prix du carburant. Mais la moyenne est plus dans les 10 litres. Les gens abandonnent les compactes pour passer à un VUS. »

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

George Iny, directeur de l’Association pour la protection des automobilistes

Il reconnaît cependant que le passage aux véhicules hybrides ou électriques est considérablement compliqué par les problèmes d’approvisionnement. « Un consommateur aujourd’hui qui veut faire cette transition va avoir son véhicule en 2023. Le marché est étranglé et les prix sont élevés. »

Il doute que la hausse récente du prix de l’essence ait le même effet que lors des chocs pétroliers de 1973 et 1979, qui avaient poussé les automobilistes à se procurer des véhicules plus petits. « Les gens à l’époque étaient prêts à réduire la taille et le poids de leur auto, c’était un petit sacrifice. Aujourd’hui, c’est l’inverse : la technologie permet des économies d’essence, mais il y a un effet de déplacement, on achète plus gros. »

Sur les marchés internationaux, le prix du pétrole a connu une hausse notable cette semaine. Selon Yahoo ! Finance, le cours du pétrole brut (crude) est passé de 101,57 $ US lundi à 109,23 $ US au moment où ces lignes étaient écrites, en hausse de 7,5 %. La guerre en Ukraine et les difficultés d’approvisionnement, notamment, ont engendré une volatilité extrême des cours du pétrole.