(Washington) Les États-Unis et leurs alliés sont encore montés d’un cran dans l’escalade des sanctions contre Moscou, en ouvrant la voie à des tarifs douaniers punitifs et en asséchant les échanges avec le pays, en réponse à l’invasion de l’Ukraine.

« Les États-Unis, nos alliés et partenaires continuent de travailler de concert pour accroître les pressions économiques sur [Vladimir] Poutine et isoler davantage la Russie sur la scène mondiale », a déclaré vendredi le président américain depuis la Maison-Blanche.

L’UE et le G7 se sont joints à Washington pour révoquer le statut dit de « nation la plus favorisée » dont bénéficie Moscou, qui facilite le libre-échange de biens et services.

Joe Biden a en outre annoncé l’interdiction d’importations de « secteurs phares de l’économie russe, notamment les produits de la mer, la vodka et les diamants ».

Dans la foulée de cette annonce, le département américain du Commerce a annoncé l’interdiction des exportations de produits de luxe, dont les bijoux, voitures, vêtements et antiquités, à destination de la Russie et de la Biélorussie.

« Nous ne permettrons pas à Poutine et à ses amis de continuer à vivre dans l’opulence tout en causant d’énormes souffrances dans toute l’Europe de l’Est », a justifié la secrétaire américaine au Commerce Gina Raimondo.

PHOTO PATRICK SEMANSKY, ASSOCIATED PRESS

Gina Raimondo, secrétaire américaine au Commerce

L’Union européenne a emboîté le pas à Washington, en annonçant à son tour une interdiction de l’exportation de ses propres produits de luxe.

Cuba et Corée du Nord

En privant la Russie de sa « clause de la nation la plus favorisée », un principe de réciprocité qui fonde le libre-échange, les Occidentaux la coupent de facto du jeu mondial du libre-échange, et se donnent le droit de taxer lourdement les importations de produits russes.

Cette clause, appliquée par l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dont la Russie est membre depuis 2012, exige que tout avantage commercial – comme une réduction des tarifs douaniers – accordé par un membre soit automatiquement appliqué à tous les autres.

Les États-Unis respectent par exemple ce principe avec tous les partenaires commerciaux, à l’exception de deux pays, que va donc rejoindre la Russie : Cuba et la Corée du Nord.

La décision finale sur cette nouvelle sanction revient côté américain au Congrès, ce qui devrait être une formalité, démocrates et républicains ayant d’ores et déjà signalé leur soutien à l’arrêt des relations commerciales normales avec la Russie.

La Chambre des représentants votera dès la semaine prochaine.

Washington, faisant monter la pression sur les oligarques russes et les proches de Vladimir Poutine, a par ailleurs rallongé vendredi la liste des personnalités visées par des sanctions individuelles, c’est-à-dire dont les biens aux États-Unis seront gelés, et qui seront interdits de toute transaction avec une personne ou une entité américaine.

Le département américain du Trésor va ainsi sanctionner, entre autres, la femme et les deux enfants adultes de Dmitri Peskov, fidèle porte-parole de Vladimir Poutine, lui-même déjà visé.  

« Tous ont un train de vie luxueux difficilement compatible avec le salaire de haut fonctionnaire de Peskov et certainement fondé sur les richesses mal acquises issues de la relation entre Peskov et Poutine », note l’administration américaine.

Les États-Unis ont aussi mis sur leur liste des hommes d’affaires ainsi que des membres de la Douma, le Parlement russe.

Tout cela s’ajoute à la salve de mesures occidentales destinées à couper peu à peu les liens économiques et financiers du pays dirigé par Vladimir Poutine avec le reste du monde.

Ces sanctions ont déjà eu un impact dévastateur sur l’économie russe, au point que le pays est désormais, selon l’agence Fitch, menacé d’un défaut de paiement.

Kristalina Georgieva, la directrice générale du Fonds monétaire international, a elle-même souligné jeudi que ce n’était plus « un évènement improbable » et prévenu que la Russie allait connaître « une profonde récession ».

La guerre en Ukraine a aussi des conséquences pour l’économie mondiale tout entière, qui se remet à peine de la pandémie de COVID-19, en raison notamment de l’explosion du cours des matières premières.